Plus facile avec les Villes qu’avec le gouvernement

La Granbasiloise Corinne Voyer, présidente de la Coalition Poids, est favorable à la taxation de 20 % des boissons gazeuses proposée au gouvernement par Regroupement pour un Québec en santé cette semaine.
Boissons gazeuses, sloches, boissons pour sportifs, boissons énergisantes, laits aromatisés, eaux vitaminées/enrichies… toutes ces boissons sucrées « contribuent à l’obésité, au diabète et aux maladies cardiovasculaires », indique la Coalition québécoise sur la problématique du poids (Coalition Poids), qui a pour mandat de revendiquer des modifications législatives et réglementaires et des politiques publiques afin de prévenir les problèmes de poids et les maladies chroniques.
Il était naturel pour sa présidente, Corinne Voyer, citoyenne de Saint-Basile-le-Grand, de voir favorablement la demande faite au gouvernement de la province par le Regroupement pour un Québec en santé, afin d’instaurer une taxe sur les boissons sucrées de 20 % du coût de la boisson.
« Les boissons sucrées sont faciles à trouver, se vendent à bas prix et font l’objet d’une promotion intensive. Il est plus facile de s’acheter une boisson sucrée que de trouver une fontaine d’eau. Cela fait plus de cinq ans que nous demandons une taxe sur ces boissons comme le suggèrent plusieurs juridictions internationales. Le fait de cibler les boissons sucrées est largement justifié : leur consommation quotidienne contribue à l’obésité, au diabète, aux maladies cardiovasculaires et à la carie dentaire. La littérature scientifique identifie la boisson sucrée comme étant le seul produit alimentaire constamment associé à l’obésité chez les enfants. De plus, elle est non essentielle au point de vue nutritionnel », relève Mme Voyer.
Les premières informations sur la Politique de prévention du ministère de la Santé, qui devrait être bientôt dévoilée, ont été ébruitées par le journal , mais rien sur les boissons gazeuses. Ce n’est de toute manière pas une priorité pour la ministre Lucie Charlebois.
« Je n’ai pas l’intention de parler de taxation, j’ai plutôt l’intention de parler de prévention, mais ça ne veut pas dire que pour toujours on ne parlera pas de taxation », indiquait par la voie de son attachée de presse Mme Charlebois.

Des municipalités plus sensibilisées

« Les municipalités sont bien au-devant des gouvernements dans ce domaine. Ils sont plus près du citoyen et leurs mesures ont un impact direct. Cependant, les Villes n’ont pas tous les pouvoirs pour agir et les avancées ne peuvent se faire qu’au cas par cas, par sur l’ensemble de la province », précise Mme Voyer.
Saint-Basile-le-Grand, en 2015, à l’occasion du lancement d’un nouveau mouvement visant à permettre à tous d’avoir accès à l’eau d’aqueduc plus facilement dans les lieux publics, a proclamé son engagement à y adhérer, devenant ainsi la première ville au Québec à appuyer cette initiative. La municipalité s’engageait ainsi entre autres à ce que les gens aient accès à au moins une fontaine d’eau dans chaque parc, espace ou édifice municipal.
Afin de mettre l’eau en valeur comme choix numéro un pour s’hydrater lors des événements spéciaux, la Ville de Longueuil a mis en place un système de fontaines d’eau mobiles.
Saint-Basile-le-Grand s’est aussi engagé à ne plus offrir des sodas dans les distributeurs automatiques situés dans les bâtiments publics de la Ville. « Dans les édifices publics, il est censé ne plus y en avoir depuis plusieurs mois. Les citoyens ne sont pas toujours d’accord, surtout à l’aréna, mais on a choisi d’aller dans cette direction, comme le font de plus en plus de municipalités », soutient Jean-Marie Beaupré, directeur général de Saint-Basile-le-Grand.
Pour Sainte-Julie, « la Ville travaille actuellement sur l’élaboration d’une politique sur les saines habitudes de vie. Dans les prochains mois, elle sera présentée aux citoyens », avance Julie Martin, porte-parole de la municipalité.
En ce qui concerne l’aréna et la piscine intérieure, elles sont gérées par un organisme privé qui ne compte pas retirer de ses installations les boissons gazeuses, bien au contraire. « Nous avons retiré les fritures de notre offre de restauration à l’aréna et notre achalandage a de suite baissé. Les gens allaient chercher cette nourriture à l’extérieur. Nous avons donc préféré les réintroduire en menant une politique de prévention », explique Éric Hervieux, du Centre de la culture et du sport de Sainte-Julie. C’est ainsi que le Centre a plutôt opté pour mettre de l’avant 60 % d’offres de service santé et ne pas faire de publicité sur des produits qui ne seraient pas santé. « De plus, les produits santé que nous proposons ne sont pas plus chers que les autres produits », précise M. Hervieux.
Au sein du conseil d’administration de l’organisme privé, deux des huit membres viennent de la Ville.
Saint-Bruno-de-Montarville, un peu comme Sainte-Julie, se dit plus attirée par une vision globale. « La nourriture santé, ça ne fonctionne malheureusement pas. Nous tentons de suivre les recommandations de la Direction de santé publique. On n’est pas en mode interdiction. Dans notre plan d’urbanisme, dont le projet sera déposé en décembre, nous allons proposer une vision globale pour réduire les émissions de particules fines, le bruit, un aménagement urbain qui favoriseront les saines habitudes de vie », affirme Martin Murray, maire de Saint-Bruno.

Plusieurs villes

Comme Saint-Basile-le-Grand, plusieurs Villes ont pris l’initiative d’interdire la vente de boissons énergisantes dans les édifices municipaux : entre autres, dans la région, Beloeil, Carignan, Chambly, Longueuil, McMasterville, Mont-Saint-Hilaire, Otterburn Park, Saint-Constant, Saint-Lambert, Varennes
Selon un sondage mené en 2015, lorsque la taxation des boissons sucrées est associée à un investissement en prévention de l’obésité et des maladies chroniques, 77 % des répondants ont dit appuyer la mesure.
« Une telle taxe envoie un signal clair sur un important contributeur à l’obésité et favorise une réduction de la consommation de ce sucre liquide », de dire Mme Voyer. Chaque tranche de taxe de 10 sous par litre de boissons sucrées rapporterait au gouvernement plus de 80 millions de dollars à réinvestir dans la prévention de l’obésité et des maladies chroniques associées.
D’autres juridictions ayant déjà adopté cette mesure fiscale ont, pour leur part, utilisé les revenus de la taxe pour garantir un meilleur accès aux fontaines d’eau dans les écoles ou pour soutenir des actions de promotion de saine alimentation et d’activité physique dans la communauté.

Quelques faits

Selon la Coalition Poids, au Québec, un enfant sur cinq (ISQ, 2005) et le quart des adolescents boivent des boissons sucrées tous les jours (ISQ, 2012); boire une boisson sucrée par jour augmente de 60 % le risque d’obésité chez les enfants et de 27 % chez les adultes; l’obésité chez les 15 ans et plus est passée de 16 % à 19 % entre 2008 et 2014-2015 (ISQ, 2016); au Québec, les coûts associés à l’obésité des adultes sont estimés à près de 3 milliards de dollars annuellement (INSPQ, 2015).