Nouvelle plainte entre élus à Saint-Bruno-de-Montarville

Les élections municipales du 7 novembre avancent à grands pas et des élus municipaux se mobilisent pour en appeler à la ministre des Affaires municipales.

La majorité des élus de Saint-Bruno dénoncent, depuis plusieurs années maintenant, un manque d’éthique au sein de la Municipalité et certains réclament même le respect de la démocratie.

Jacques Bédard, conseiller du district 7, va plus loin et vise directement le maire de Saint-Bruno-de-Montarville, Martin Murray, dans un courrier adressé à la ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest, sous le titre « Comme à Saint-Bruno-de-Montarville, trop de municipalités du Québec ont un ‘’Mini Donald Trump’’ comme maire! »

Le conseiller indique faire appel à la ministre « pour accélérer le traitement des plaintes contre des élus municipaux et imposer des sanctions qui seront plus ‘’qu’une tape sur les doigts!‘’ (…) Madame la Ministre, selon vous, est-ce normal que depuis 2014 des dizaines de plaintes aient été transmises à votre Ministère par des citoyens, des élus et même par un des DG de la Ville et que la plupart de ces plaintes soient toujours en analyse à votre Ministère? La majorité des « Mini Donald » du Québec s’en sortent grâce à la lenteur de votre Ministère. Ils ont le temps de quitter la politique bien avant que les citoyens sachent! »

Il ajoute à la lettre, adressée à la ministre, des exemples de dérive qu’aurait commis le maire. « Un bénévole dans un comité consultatif de la Ville a critiqué certaines de ses décisions. Il l’a convoqué dans son bureau et l’a carrément intimidé pour qu’il démissionne. Le bénévole a eu peur et a quitté! Malgré le refus de la majorité des membres du conseil de Ville, notre ‘’Martin’’ a décidé de dépenser 15 000 $ pour inviter 35 entrepreneurs industriels de sa ville à un 5 à 7, et ce, au nom du comité de développement économique de la Ville… qui n’existait pas! Depuis, aucun suivi ni action. À la toute fin de la négociation de la convention collective d’un groupe de fonctionnaires, notre ‘’Martin’’ s’en est mêlé! Après son habile intervention, d’une convention qui était presque réglée, un vote d’urgence des syndiqués s’est ensuivi avec un résultat à 97 % pour la grève! Pour régler l’impasse, ça coûtera à la Ville, à la fin de leur convention en 2024, la rondelette somme de 600 000 $. »

« Madame la Ministre, selon vous, est-ce normal que depuis 2014 des dizaines de plaintes aient été transmises à votre Ministère par des citoyens, des élus et même par un des DG de la Ville et que la plupart de ces plaintes soient toujours en analyse à votre Ministère? La majorité des « Mini Donald » du Québec s’en sortent grâce à la lenteur de votre Ministère. Ils ont le temps de quitter la politique bien avant que les citoyens sachent! » – Jacques Bédard

L’ancien membre du parti du maire dans un premier mandat, indépendant désormais, ne se représentera pas aux prochaines élections.

À la suite des derniers événements au sein de la Municipalité, il se dit « dégoûté de la politique municipale. Je n’ai pas écrit cette lettre dans un but politique. Je ne me représente pas aux prochaines élections municipales et le maire non plus. Je le fais pour la suite des choses. ÀSaint-Bruno, il est déjà trop tard. On est à l’heure des constats, mais je suis certain que plusieurs municipalités sont dans ce cas. Il faut qu’il y ait un raffermissement des choses pour les prochaines élections ».

Réponse du maire
Sur la première accusation concernant un bénévole, le maire confirme le fait que cette personne a été amenée à démissionner. « Mais on ne donne pas toute l’information. Cette personne coulait de l’information confidentielle pour l’amener dans un autre organisme pour éventuellement s’en servir. Tout le monde était à l’aise avec cette décision. Il y avait là un problème d’éthique. On avait toutes les preuves. Si Mme Laforest veut me rencontrer sur ce point, je pourrais lui expliquer. »

Concernant l’invitation des entrepreneurs industriels, là encore, M. Murray confirme le montant, environ 15 000 $, et l’invitation en 2018. « C’était une rencontre pour socialiser avec les nouvelles entreprises. Les grandes entreprises étaient présentes et ç’a été un immense succès. C’est drôle, quand c’est pour des éléments positifs, on dit que cela a coûté trop cher, alors que ces mêmes élus ont engagé des dizaines de milliers de dollars en frais d’avocat pour la Ville en me reprochant plein de choses pour que ces derniers me donnent raison. Quant à l’accord des membres du conseil, à ce moment-là, le conseil municipal était majoritaire.

Quant au comité de développement économique, il existait. Une première rencontre a eu lieu au mois de septembre 2018 et l’événement a eu lieu au mois de novembre 2018. Donc, il y avait déjà eu une rencontre de ce comité avant et il n’y en a pas eu d’autres. »

Quant à l’ingérence dans les affaires administratives, M. Murray voit là « de la démagogie pure. La convention a été signée, et c’est une très bonne convention collective et heureusement que l’on a mis les pieds sur les freins, car on s’en allait vers autre chose. Où est-ce qu’il prend ces chiffres? Cela prouve une chose, c’est qu’il ne sait pas compter. J’ai indiqué qu’il y avait des éléments qui me dérangeaient et j’ai envoyé un courriel à tous pour demander que l’on regarde ça d’un peu plus près. Ce sont les conseillers qui l’ont votée par la suite. C’est facile de discréditer un maire de cette manière. Et puis, vous savez, un maire a très peu de pouvoir. Le maire ne vote jamais, c’est toujours le conseil municipal qui prend les décisions ».

M. Bédard parle d’une dizaine de plaintes contre le maire. « Une dizaine de plaintes, cela ne me paraît pas beaucoup. J’ai l’impression qu’il y en a une par semaine. Pour moi, il faut regarder ce qui se passe ailleurs. Il y a cette même façon de faire. Il y a des élus qui n’acceptent pas que le maire puisse faire des choses qu’eux ne peuvent pas faire. C’est pour cela que ces plaintes ne reçoivent aucune suite », indique le maire.

Les deux élus s’entendent pour dire qu’une réglementation plus stricte de Québec permettrait plus d’harmonie dans les municipalités.

Plusieurs mouvements
La coalition Cartes sur table (www.cartessurtable.ca) est un mouvement d’élus au Québec qui a fait des demandes similaires à la ministre des Affaires municipales. « Les situations qui nous ont déjà été rapportées se ressemblent partout avec certaines particularités. Nous réclamons plus de transparence dans les municipalités. Nous demandons dans les municipalités un cadre légal plus adéquat. Les villes sont des gouvernements de proximité, avec de plus en plus de responsabilités, qui se comportent comme des conseils d’administration. La coalition Cartes sur table invite la population à rejoindre le mouvement pour réclamer des actions du gouvernement avant les prochaines élections municipales, explique au journal Véronique Proulx, conseillère municipale à Rimouski et porte-parole de la coalition. On remarque des problèmes partout au Québec dans les municipalités.

Certaines villes rencontrent des problèmes liés à leur maire, d’autres à l’administration. Il y a une sorte de vide juridique qui doit être réglé et qui ne doit pas reposer sur les épaules des municipalités. »

Afin de documenter la question de la transparence dans les municipalités, la coalition invite les élus à répondre à une enquête. En septembre 2020, l’organisation avait déposé une lettre cosignée par une cinquantaine d’élus aux bureaux du MAMH à Québec. La coalition Cartes sur table demandait entre autres l’application de la recommandation 51 de la Commission Charbonneau, qui commandait un meilleur encadrement des séances à huis clos des conseils municipaux du Québec.

« Le gouvernement ne peut plus tolérer ces problèmes de gouvernance importants qui minent la vitalité démocratique de nos localités. Il doit agir dès maintenant », d’ajouter la coalition.

En prévision du scrutin municipal de novembre prochain, une campagne de l’UMQ, intitulée ‘’La démocratie dans le respect’’ a pour objectif de donner le goût aux gens de se présenter en politique et de s’investir dans la sphère publique. Une campagne de sensibilisation qui s’adresse aussi bien aux citoyens qu’aux élus.

Réaction de la ministre

« La politique municipale est essentielle et c’est une excellente façon d’avoir une influence directe sur sa communauté et son milieu de vie. J’ai d’ailleurs lancé la campagne ‘’Je me présente‘’ pour encourager les femmes, les jeunes de 18-34 ans et la population en général à faire le saut en politique municipale lors des prochaines élections. Maintenant, c’est certain que je souhaite redorer le rôle d’élu municipal et notre projet de loi 49 fait partie de la solution. Ce sera une occasion en or de parler transparence, dignité, respect et de bien d’autres sujets qui me tiennent à cœur et qui sont importants », a répondu au journal Andrée Laforest, ministre des Affaires municipales et de l’Habitation.

Mme Laforest n’a cependant pas voulu commenter la situation à Saint-Bruno. « Nous ne commenterons pas de situation particulière. »

Le Ministère a rappelé qu’il existait des mécanismes « que ce soit à travers la Commission municipale du Québec ou encore le Commissaire à l’intégrité municipale et aux enquêtes, pour assurer le respect des lois et des règles d’éthique et de déontologie actuelles ».

La ministre Laforest compte cependant améliorer la performance de ces institutions avec les dispositions contenues dans le projet de loi 49. « Il ne faut pas oublier que les municipalités et les élus municipaux peuvent toujours s’adresser à leur Direction régionale du ministère. Ils sont très bien outillés pour accompagner. »

Coalition Cartes sur table
« D’abord, notre projet de loi 49 vise principalement à resserrer les règles d’éthique et de déontologie dans le milieu municipal. Dans cet ordre d’idées, il est déjà prévu d’aborder les notions telles que la transparence, la dignité, le respect entre élus. Ce sera donc l’occasion parfaite pour échanger à ce sujet prochainement et avoir un effet concret. »

Le Ministère invite, dans le cadre des consultations particulières, « toute personne intéressée, dont le groupe Cartes sur table, qui pourra déposer des propositions, des mémoires à ce propos », nous indique-t-on pour répondre à la demande de rencontre avec la ministre soumise par la Coalition d’élus au Québec.

Afin de remettre de l’ordre dans les municipalités et d’encourager plus de citoyens à se lancer en politique municipale, le MAMH compte avant tout sur son projet de loi 49. Cela sera-t-il suffisant pour les élections municipales du 7 novembre?

Séance d’information
Le MAMH invite les Montérégiens à participer à une séance d’information virtuelle, entre le 13 mars et le 14 avril, en vue des prochaines élections municipales. Les séances, organisées par secteur, visent à informer et à inciter la population à prendre part à la vie démocratique municipale en se présentant à titre de conseiller ou de maire. Plus d’information à www.sondageonline.com/s/7a97f88.