Le BAPE de Benoît Charette

Le ministre de l’Environnement, Benoît Charette, a admis la semaine dernière que Northvolt aurait été perdue pour le Québec si le projet s’était soumis à une évaluation du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). Une révélation qui en a fait réagir plusieurs, dont le maire de Saint-Basile-le-Grand. 

« Enfin, que je me suis dit », répond le maire Yves Lessard.    

Un BAPE aurait allongé le processus d’au moins 18 mois, peut-être 24, selon le ministre Charette. Pour Yves Lessard, c’était « quasiment prévisible » que la vérité sorte un jour. « Il possédait les réponses, on le savait. C’est la déduction à laquelle on se devait d’arriver. Pour Northvolt, le ministre de l’Environnement a pris une décision économique d’abord, puis il s’est dit on va gérer après. Je crois qu’il ne s’attendait pas à un vent de face comme ça », mentionne M. Lessard. 

Décision économique

Selon lui, si Benoît Charette avait dit dès le départ, en octobre, que c’était pour l’économie du Québec mais que rien ne serait négligé en environnement, le projet aurait mieux passé dans l’opinion publique. Il faut dire que Northvolt soutient qu’elle ne peut attendre au-delà de 2026 pour mettre sur le marché la batterie

« la plus verte au monde ». D’où la contrainte de temps. « Les gens ne sont pas stupides. Ils auraient compris. Ils n’auraient peut-être pas été d’accord, mais au moins, le ministre aurait fait preuve d’honnêteté. »

Quand on lui demande s’il qualifierait Benoît Charette de menteur, M. Lessard préfère évoquer un cachottier. « Mais ce n’est pas loin de la menterie! »

Pour sa part, le maire de Saint-Basile croit que même si Northvolt n’est pas soumis à un BAPE, il y a quand même moyen de faire les choses de façon sérieuse pour protéger l’environnement. « Les milieux humides d’intérêt, la faune d’intérêt seront préservés. Nous surveillons pour que ça soit appliqué. »

En entrevue

Le 6 février, M. Charette accordait une entrevue au journal Les Versants. À la question de savoir pourquoi le projet n’a pas été soumis à un BAPE, l’élu a répondu : « Il faut tout d’abord dire que l’on n’a modifié aucune règle pour Northvolt. Il n’y a pas eu de passe-droit. […] On n’a pas modifié les règles pour Northvolt, on s’est donné une règlementation pour la filière batterie et cette règlementation doit être prévisible. »

Le Comité action citoyenne Northvolt, dont la mission est de militer pour la tenue d’un BAPE avant la construction de l’usine à cellules de batteries sur le territoire, a aussi réagi aux propos de Benoît Charette. Contactée par le journal, l’une de ses porte-parole, Jacinthe Villeneuve, estime que le ministre aurait pu faire preuve d’honnêteté plus tôt. « Le chat est enfin sorti du sac!, lance-t-elle. Il était plus qu’évident que les règles avaient été changées pour permettre à Northvolt de s’installer au Québec. Pourquoi avoir attendu plus de cinq mois avant de le dire? Ça ne fait qu’augmenter le sentiment de méfiance à son égard. Il s’est permis de mentir en niant ce qu’il confirme maintenant », dénonce Mme Villeneuve. 

Elle pense qu’à la lumière de ce qui a été révélé la semaine dernière, le gouvernement caquiste perd de la crédibilité. « Ça nuit à l’acceptabilité sociale. Au début, plusieurs personnes disaient que c’était un excellent projet économique pour le Québec. Maintenant, le discours a changé. Avec toutes les révélations, les gens sont de plus en plus craintifs. Les représentants du gouvernement n’ont même pas été en mesure de nous rassurer lors des assemblées publiques, car il y a encore trop d’inconnu sur le projet », ajoute-t-elle.   

Transparence

« Pour des projets de cette envergure, si vous voulez mettre toutes les chances de votre côté, il faut de la transparence », résume Yves Lessard.