Limiter les dépenses à 2 %, tout un défi!

S’il est élu, le chef du Parti montarvillois, Martin Murray, promet de limiter les dépenses à un maximum de 2 %. Afin d’y arriver, il dit qu’il va s’asseoir avec l’administration pour revoir les dépenses. Michèle Archambault, conseillère sortante du district 8, a assisté à cet entretien.

(Q) : Pierre Filion s’engage s’il est élu à geler le taux de taxes pour les deux premières années de son mandat. Il entend aussi les maintenir au même niveau que l’IPC pour le reste de son premier mandat. Qu’en pensez-vous?

Martin Murray (MM) : Irresponsable! Nous, on veut limiter la croissance des dépenses à un maximum de 2 %, ça va être extrêmement difficile. Entre 2006 et 2012, les dépenses locales ont augmenté en moyenne de 6,2 % par année, donc 43 % sur une période de 6 ans. De passer de 6,2 % à 2 % c’est déjà un effort considérable. Nous n’allons pas agir de façon brutale. Nous allons nous asseoir et réfléchir avec l’administration. Oui, il y a des contraintes en 2014 vu que nous n’avons pas préparé le budget, mais pour 2015, 2016 et 2017, nous allons avoir le temps de corriger le tir. Si on réussit en 2014 à ramener les dépenses autour de 2 %, l’impact sur l’avis d’imposition sera modeste. Aller vers un gel de taxes? 2 % de 34 millions de dollars (budget local), c’est 700 000 $ si on peut aller chercher de nouvelles constructions et de nouvelles entreprises. Mais nous avons un sérieux problème : la taxe sur la mutation immobilière qui rapportait énormément. Ça veut dire que le marché est mort! Il y a donc une contrainte de 1 million. Il n’y aura pas de gel pour 2014.

Q : Pour une maison moyenne de 144 312 $ en 2005 et de 367 51 3$ en 2013, Saint-Bruno, par rapport à Boucherville, avait un bon avis d’imposition, soit 10 % de plus en 2005; aujourd’hui, l’avis est 1,5 % inférieur. En comparaison à Brossard, Saint-Bruno avait un meilleur avis d’imposition, soit 14 % de plus; aujourd’hui, cet avis a un manque à gagner de 4,6 %. Malgré votre promesse de gel, l’avis d’imposition ne reste-t-il pas défavorable à Saint-Bruno en comparaison à celui de Brossard et de Boucherville ?

MM : Depuis 2006, la performance de Saint-Bruno a été moins bonne au niveau local. Entre 2008 et 2013, l’avis d’imposition destiné à l’agglomération a baissé pour la majorité des contribuables. Le mien, personnellement, il a baissé de 11 %. La baisse est attribuable au fait que le poids de Saint-Bruno dans l’ensemble de la richesse foncière de l’agglomération s’est accru moins rapidement que dans les autres villes. Sur le plan local, l’augmentation a été de 25 % pour une maison moyenne, soit environ 5 % par année au cours des cinq dernières années. Se comparer à Boucherville et Brossard, oui, je suis d’accord; cependant, ces villes ont vu leur poids relatif augmenter dans l’ensemble. Nous, on performe moins depuis 2006 par rapport à Boucherville et Brossard.

Q : Mais Brossard a le boulevard Taschereau et son Quartier DIX30; Boucherville a ses commerces et industries le long de l’autoroute 20. Ces deux villes retirent des revenus très intéressants en termes de taxe en comparaison à Saint-Bruno. Il y a donc moins de pression sur l’avis d’imposition que si l’on est à Saint-Bruno?

MM : L’écart n’est pas très important. Oui, ça peut expliquer que les revenus autres que ceux en provenance du résidentiel permettent de subvenir aux besoins en termes de taxes. Ce sont des vases communicants. On peut faire le lien tout à l’heure sur le fameux dossier de Jean-Coutu…

Q : Vous vous êtes engagé à réduire l’importance de la dette par rapport aux revenus. Pouvez-vous être plus explicite à cet égard tout en précisant jusqu’où vous entendez utiliser les surplus budgétaires de l’année pour réduire la dette?

MM : Il faut faire attention au remboursement de ceci et cela. Je regarde l’élément final qui est la dette nette. Tout le reste, c’est de l’esbroufe. La dette nette en 2006 est de 30 millions; elle est de 58 millions en 2012. Elle va dépasser les 60 millions en 2013, j’en suis convaincu! Elle a doublé en l’espace de 6 ans. La dette représente 100 % des revenus de la Ville. Mon objectif à moi est de ramener ce niveau de dette autour de 90 %. Les revenus vont croître et on va s’assurer que la dette croisse à un rythme moindre. Il faut être conscient aussi que d’arrêter la croissance de la dette, on le voudrait bien. Est-ce possible ? Il y a des investissements majeurs dans le réseau routier qui ne peuvent pas attendre. On va s’obliger à réorienter les revenus vers les dépenses de ce type-là, de telle façon qu’on puisse couvrir une bonne partie des nouveaux engagements en termes financiers. Donc, emprunter le moins possible, payer le plus possible comptant.

Q : Vous avez mentionné que la municipalité peut compter sur de substantiels revenus de taxes provenant des secteurs commercial et industriel. Vous savez, par ailleurs, que les commerçants et les industriels ont été échaudés en 2006 par la nouvelle façon de les taxer beaucoup plus élevée que celle du secteur résidentiel. Je vous soumets deux questions :

a) Êtes-vous d’accord avec cette affirmation et si oui,  avez-vous pensé à réduire ce déséquilibre fiscal et rendre leur taxation beaucoup plus compétitive?

b) Si la taxation que vous proposez n’est pas véritablement compétitive, comment pensez-vous attirer de nouveaux commerces et industries?

MM : En matière de taxation industrielle et commerciale, Saint-Bruno ressemble aux autres villes de l’agglomération. À Sainte-Julie, une entreprise dont la valeur est de 12 millions paie 15 000 $ de moins que si elle était à Saint-Bruno. Le problème ne pourra pas se régler tant qu’il y aura ce déséquilibre, tant qu’il y aura ce surcoût avec l’agglomération. En comparaison à Sainte-Julie, ça nous coûte 5 à 6 millions de plus pour appartenir à l’agglomération. C’est un différentiel énorme qui se résorbe lentement, mais on n’est jamais sûrs de l’avenir. Il s’agit que Saint-Bruno ait un investissement important au cours des prochaines années pour que notre poids à l’ensemble augmente et qu’on paie davantage.

Il y a deux moyens pour réduire la pression sur les taxes. Regarder comment la machine administrative fonctionne, faire l’analyse de fond en comble de toutes les dépenses. Il y a probablement des choses qu’on fait qu’on ne devrait plus faire. Le second élément est qu’il faut régler la question de l’agglomération. On est taxés sur la richesse financière au lieu du principe de l’utilisateur/payeur. On est perdants; dans les 15 mois qui vont suivre notre élection, on va faire une proposition à la population

Q : Ne craignez-vous pas d’autres déchirements?

MM : Dans un questionnaire que nous avons soumis à des électeurs, les gens nous ont révélé que l’appartenance à l’agglomération ne pose pas seulement le problème sur le plan fiscal. Ils ont l’impression que la Ville ne leur appartient plus, qu’il y a moins de services qu’avant.

Michèle Archambault (MA) : Regardez le palmarès fait par HEC. La fusion/défusion est un échec. Je pense au transport en commun. On fait partie du RTL. Les autres villes sont dans la couronne 3 et nous dans la 5, mais on est pénalisés. On paie le bus express à Longueuil, mais on ne l’utilise pas. Le RTL ne veut pas couvrir Saint-Basile pour
nous permettre d’aller à la gare plus rapidement. C’est une aberration simplement et purement administrative.

Q : Vous écrivez dans votre plateforme vouloir «développer des partenariats avec ses voisines pour les services plus spécialisés». De quelles villes et de quels services s’agit-il?

MM : Les villes ont des responsabilités additionnelles, ce qui amène à embaucher des spécialistes pour faire face à ces obligations. Ma vision : dans un contexte semblable, il y a au sein des administrations municipales des employés compétents dont on peut partager leur services et le coût afférent avec des villes voisines comme Sainte-Julie et Saint-Basile. Dans un contexte où l’on fait une relecture complète de l’administration municipale, on peut identifier ces ressources.

MA : Et aussi les acteurs sur la scène régionale. Souvent, le gouvernement met en place des politiques ou des objectifs provinciaux. Je pense à la politique de la gestion des eaux. On peut agir en vase clos ou en collaboration avec des acteurs régionaux. Nous, on a la chance d’avoir le COVABAR (Comité de concertation et de valorisation du bassin de la rivière Richelieu) qui s’occupe des bassins versants. Essayer de s’ouvrir aux experts au lieu d’internaliser au sein de l’administration. On peut aussi exporter les compétences qui existent au sein de notre administration.

MM : Même sur le plan de l’ingénierie, et du suivi des travaux de voirie.

Q : Vous êtes au courant que les recommandations du rapport D’Amours sur le déficit du régime des retraites sont renvoyées aux calendes grecques. Croyez-vous possible d’arriver à une entente avec les syndicats en ce qui a trait à ce dossier?

MM : Pour le moment, je n’en sais rien, car nous n’avons pas les informations. Le régime est-il entièrement capitalisé? Souffre-t-il à moyen et à long terme d’un débalancement qui oblige l’employeur à intervenir beaucoup. Ça m’étonnerait que le régime puisse supporter dans les conditions actuelles une augmentation de ses dépenses avec des revenus qui sont relativement moins élevés annuellement, à long terme. Peut-être que je me trompe.

MA : Il y a des déficits actuariels qui ont amené la Ville à injecter des fonds additionnels. C’est un enjeu qui concerne tout le Québec.

MM : Il faut savoir où est rendu l’équilibre. On le verra avec les états financiers 2013. Pour nous, c’est très important de statuer à ce stade-ci et de s’asseoir avec les syndicats et les autres employés. On n’arrivera pas avec nos grands sabots. C’est dans notre ADN de discuter.

Nous avons la capacité de trouver une solution : on peut jouer sur l’âge de retraite, sur la pénibilité de la tâche. Il y a toutes sortes de variantes possibles. Je sais pertinemment étant comptable que le meilleur régime est celui à prestation déterminée, car il te prémunit contre les aléas, mais en même temps, il y a une contrainte sur l’employeur si jamais il y a une difficulté à maintenir l’équilibre financier.

(NDLR : Martin Murray a jugé essentiel d’ajouter certains points : la dette doit représenter de moins en moins une part importante des revenus; augmentation de la masse salariale de 53 % en six ans; 1,7 million qu’aurait dû retirer la Ville si elle avait accepté la venue de Jean-Coutu. En plus de ces points, Michèle Archambault avance que la Ville aurait dépensé 600 000 $ par an pour les Fleurons depuis 4 ans. Lire l’article Le budget des travaux d’horticulture et d’arboriculture est le même qu’en 2005 à ce propos).