L’univers fascinant d’Albert Gauthier

Collectionneur d’articles à l’effigie du Canadien de Montréal

Ancien propriétaire du restaurant La Casquette, le Grandbasilois Albert Gauthier est aussi connu en tant que collectionneur. De l’avis de plusieurs, il posséderait l’une des belles collections d’articles à l’effigie du Canadien de Montréal, plus particulièrement concernant le gardien de but Patrick Roy. Bienvenue dans l’univers fascinant d’Albert Gauthier.

Pénétrer dans la crypte d’Albert Gauthier, c’est comme si on entrait dans la caverne d’Ali Baba, c’est retourner très loin dans son enfance, là où résident des dizaines de souvenirs reliés au club du Canadien et qu’on croyait avoir depuis longtemps oubliés. Ici, accroché au plafond, un disque en vinyle de la chanson « Bleu-Blanc-Rouge, les Canadiens, les Canadiens »; là, une panoplie de cartes de hockey, du Upper Deck, du O-Pee-Chee, du Topps, du Parkhurst, illustrant Patrick Roy dans l’uniforme du CH et dans celui de l’Avalanche du Colorado; de ce côté de l’antre aux trésors, des épinglettes de gardiens de but et des rondelles officielles; de l’autre, des jeux de hockey sur table et des figurines de hockeyeurs encore dans l’emballage original.  

Pour les partisans de hockey, mettre les pieds dans le sous-sol de monsieur Gauthier, là où il rassemble toutes ses trouvailles, c’est ne plus vouloir en sortir. Voir tout cela suscite un certain respect envers cet homme de 75 ans qui a passé les quelque 25 dernières années à faire grandir sa collection. Tout y est : fanions, figurines, livres, masques de gardien de but, tirelires, pièces de monnaie, répliques de patinoire, timbres, cartes de Noël, photos, horloges et montres, tasses, toutous, boîtes de mouchoirs, caricatures, un grille-pain, une bouteille de vin, bouchons de bière, macarons, casquettes, chandails officiels, affiches, panneaux, pancartes, cadres, un néon, un gnome de jardin, répliques de la coupe Stanley (dont l’une, un cadeau du tourneur sur bois et concitoyen, Jean-Claude Perreault), et ainsi de suite. « Quand je me lance dans quelque chose, j’aime aller jusqu’au bout. Je suis toujours à la recherche de ce qui me manque. Un bon collectionneur doit être patient, ambitieux, et ne jamais prétendre tout posséder. Une collection, ça ne se termine jamais. Parce que la définition d’un collectionneur, c’est de collectionner, pas de tout avoir », mentionne Albert Gauthier. Selon lui, il dépasse un peu 14 000 articles dans son sous-sol, dont quelque 3 000 cartes de hockey à l’effigie de l’ancien n° 33 du Tricolore.

Plus jeune, dans les années 70, Albert Gauthier a accumulé toutes sortes de choses : antiquités et cartes postales, mais surtout des épinglettes des Jeux du Québec et des Jeux olympiques. À un moment donné, il a possédé 90 000 de ces épinglettes. Aujourd’hui, il en a encore 40 000. Sa collection d’insignes est tellement impressionnante que son nom est mentionné dans le bouquin Histoire du pin’s olympique 1896-1992, deCécile Tremblay-Matte. « C’est facile pour moi d’accumuler les objets. J’ai ça dans le sang, on dirait. Et puis un jour, je me suis fait avoir : j’ai décidé de ramasser les cartes sportives. Toutes sortes de cartes. Puis j’ai réalisé que c’était impensable d’en avoir autant, alors je me suis concentré pendant quatre ou cinq ans uniquement sur celles de Patrick Roy » relate le collectionneur, reconnu jusqu’en Colombie-Britannique et en France. Mais pourquoi Patrick Roy en particulier? « Contrairement à d’autres joueurs, comme Martin Brodeur, par exemple, Patrick est difficile à collectionner. Après Wayne Gretzky, Roy est celui dont les objets sont les plus ardus à dénicher. »    

Plus tard, monsieur Gauthier amoncelle les articles du Canadien de Montréal, en se concentrant surtout sur des joueurs comme Maurice Richard, qu’il rencontre pour lui faire autographier un bâton le 1er novembre 1999, quelques mois avant son décès, Bernard « Boom Boom » Geoffrion, Jean Béliveau, Guy Lafleur. « Ce sont de grands Canadiens français à qui je voue un culte. Je crois que ce sont des messieurs pour lesquels il valait la peine de prendre du temps. »

Albert Gauthier se dit collectionneur, et non vendeur. Pas question pour lui de se départir de certains de ses petits trésors afin d’encaisser 5, 50 ou 500 $. Sinon, à quoi bon les collectionner? Il le répète d’ailleurs à quelques reprises au cours de l’entretien : « Je ne fais pas ça pour l’argent, mais parce que je suis un passionné. Admettons que je vends une carte de hockey 5 $. L’argent, dans quelques jours, je ne l’aurai plus… et la carte non plus! » À condition d’avoir l’objet en double (comme 1 500 cartes de Patrick Roy), ce Grandbasilois parle plutôt de faire des échanges avec d’autres collectionneurs. « Il ne faut jamais m’amener dans certains endroits, comme les conventions ou les encans, parce que je n’en ressors jamais les mains vides! » de poursuivre celui qui a été président d’honneur du Grand salon du passe-temps, à Saint-Basile-le-Grand, en avril 2010.      

Albert Gauthier a pris une première retraite en 1992, après avoir travaillé près de 30 ans pour la Commission de transport de Montréal, mieux connue aujourd’hui comme la Société de transport de Montréal. C’était en 1992.

Peu de temps après, les Gauthier accueilleront le frère d’Albert, qui est trisomique. Ils s’occuperont de lui pendant 10 ans, avant que celui-ci soit placé en famille d’accueil. « Ça n’a pas bien été, alors il est allé chez notre fille pour une dizaine d’années encore. Aujourd’hui, il est de retour avec nous et on s’en occupera jusqu’au bout. »

La Casquette et La Boutique du Sommet

Monsieur Gauthier et sa femme Francine ont été pendant 22 ans les propriétaires du restaurant La Casquette. Au menu, il y avait notamment une excellente poutine. Après l’achat du restaurant, en 1989, les Gauthier ont acquis la bâtisse complète en 1992, ce qui permettait au père de deux enfants d’entreposer ses articles de collection, de les exposer aux amis, de rencontrer des gens et d’organiser des réunions de passionnés comme lui. Certains se souviendront de La Boutique du Sommet, au deuxième étage du 53, rue Robert. Aujourd’hui, cette construction leur appartient toujours, mais à la suite de leur retraite prise le 3 avril 2011, La Casquette a fini par laisser la place à une épicerie fine qui se spécialise dans les bières de microbrasseries québécoises et les produits alimentaires du terroir. « C’est très ironique parce qu’aujourd’hui, le sous-sol de la bâtisse, qui sert d’entreposage, est rempli de caisses de bières, alors que je n’ai jamais bu d’alcool de ma vie! » Sa femme, qui le soutient dans sa folie, confirme la chose : « Il préfère mettre son argent ailleurs… dans ses collections, par exemple! Après près de 48 ans de mariage, je peux dire que c’est fascinant, tout ce qu’il a ramassé. Il est même allé jusqu’à transporter quelque 7 000 pierres dans son Volkswagen pour construire notre maison au début des années 70. » Ces roches provenaient des sites de construction de l’autoroute 30, à proximité de leur terrain. « Ma fille m’a déjà dit de me considérer chanceuse : « Tout ce que papa n’a pas collectionné, ce sont les femmes! » ».

« Nous avons passé 20 ans au restaurant. Je suis quelqu’un qui aime le monde, qui apprécie la compagnie des gens. Aujourd’hui, je ne m’ennuie pas de vendre des hot dogs, mais les rencontres que je faisais avec les clients et mes employés, c’est un aspect qui me manque », d’expliquer l’homme qui qualifie sa collection d’articles de hockey de magnifique et prestigieuse.

Albert Gauthier possède une
collection impressionnante, mais il est aussi conscient qu’elle prend bien de l’espace. Par contre, il a la ferme intention de la conserver jusqu’à son départ, lorsqu’il ira rejoindre Maurice, Boom Boom et tous les autres fantômes. « Je veux la donner au complet, et non morceau par morceau, comme la famille de Maurice Richard a dispersé son patrimoine afin d’en récolter de l’argent. J’en ai parlé à ma fille et mon garçon. Ils sont conscients de l’effort que j’ai mis dans cette passion. Ils savent aussi que ça prend de la place. Après, je n’aurai plus rien à décider. »

Et un musée au nom d’Albert Gauthier, avec toute cette collection pour en faire profiter les gens? « Je serais d’accord avec l’idée, mais il faudrait que ça reste ici à Saint-Basile-le-Grand. »