Lisez-vous bleu?

Mouvement #jelisbleu

Le Panier bleu, projet du gouvernement québécois lancé le 5 avril dernier, fait des petits en temps de confinement. Le mouvement #jelisbleu, par exemple, une initiative de l’auteure jeunesse Nadine Descheneaux, priorise l’achat de livres québécois.

Le 7 avril, soit deux jours après la mise en ligne du Panier bleu, Nadine Descheneaux lance le mot-clic #jelisbleu sur Facebook. « Le projet rassembleur #jelisbleu encourage l’achat de livres québécois afin de soutenir le travail de dizaines d’acteurs de la grande chaîne du livre : auteurs, illustrateurs, éditeurs, correcteurs, commis d’entrepôt, infographistes, coordonnateurs, graphistes, réceptionnistes, comptables, opérateurs d’imprimerie, concierges, libraires, représentants, distributeurs, relationnistes et bien d’autres encore », peut-on lire sur les réseaux sociaux.

Depuis, des écrivains ont adhéré au mouvement. C’est le cas de la Montarvilloise Maryse Pagé, à qui l’on doit le roman Rap pour violoncelle seul, publié chez Leméac en février dernier. « Pour être franche, j’adhère à ce mouvement pas mal à l’année. Je n’ai pas énormément le temps de lire alors je préfère lire ce qui s’écrit chez nous, ce qui ne veut pas dire que les histoires ne sortent pas du Québec », commente Maryse Pagé.

Pour sa part, la romancière Rébecca Mathieu, originaire de Saint-Basile-le-Grand, estime « l’idée du Panier bleu excellente dans sa forme générale ». Elle précise : « Que les différentes sphères de la société en dérivent un appel spécifique tombe sous le sens. J’applaudis Nadine Descheneaux pour son cri du cœur! »

Même constat pour l’auteur Emmanuel Lauzon, interrogé à propos de #jelisbleu par Les Versants. « Évidemment que j’adhère au mouvement! En fait, étant moi-même écrivain québécois, c’est tout naturel de soutenir la littérature d’ici et le travail de mes pairs. Et, bien honnêtement, je n’ai pas à me forcer », dit-il.

Le romancier Patrick Blay, originaire de Saint-Bruno, se dit adepte du mouvement : « Oui, j’adhère à #jelisbleu. Simplement parce que c’est encourager la culture d’ici, l’économie d’ici. Le Québec regorge de talents; de plus, c’est très varié dans les genres et les styles. En souhaitant que les gens adhèrent maintenant et après la crise au mouvement, pour les livres et pour beaucoup d’autres produits fabriqués ici. »

« Le Panier bleu encourage les Québécois à privilégier les produits et les commerces d’ici tout en favorisant la pérennité des entreprises de toutes les régions du Québec. Rappelons-nous que chaque dollar investi compte et contribue à appuyer nos produits locaux et notre expertise, ce qui stimule davantage notre économie. Achetons local », soulignait le ministre de l’Économie et de l’Innovation, Pierre Fitzgibbon.

« Pour être franche, j’adhère à ce mouvement pas mal à l’année. » -Maryse Pagé

Des propos qui font écho chez Maryse Pagé : « En ce temps de pandémie, il est primordial d’opter pour des produits québécois si on veut survivre et remonter la pente le plus vite possible. Les dommages sont énormes dans le monde du livre et déjà des librairies qui étaient des institutions doivent fermer leur porte. » Mme Pagé fait référence à la fermeture, la semaine dernière, de la librairie montréalaise Olivieri, qui a dû mettre la clé sous la porte après 35 ans d’existence. La fin d’une institution culturelle qui s’explique en partie par la pandémie, mais aussi en raison de travaux sur Côte-des-Neiges. « En achetant un livre québécois, c’est toute une chaîne qui est soutenue : les écrivains, les éditeurs, les attachés de presse, les libraires, les livreurs et j’en passe », insiste la Montarvilloise, qui reprend en partie les propos de sa collègue Nadine Descheneaux sur les réseaux sociaux.

Auteur de plusieurs romans destinés aux adolescents et jeunes adultes, dont le plus récent, Addik, paru aux éditions De Mortagne en février, Emmanuel Lauzon vante le talent québécois. « Sérieusement, nous n’avons absolument rien à envier à aucune autre littérature dans le monde. Déjà, avant cette crise, je dirais que je lisais et achetais environ 70 % de livres québécois. Il y en a pour tous les goûts chez nous. Les québécois ont la fibre artistique. Nous sommes des créateurs. C’est dans notre ADN. Je lis bleu et j’achète bleu parce qu’il faut soutenir le talent d’ici. »

Maryse Pagé abonde aussi dans le même sens quand il s’agit d’achat local. « C’est la moindre des choses de lire des romans d’auteurs québécois autant que d’acheter des aliments locaux », mentionne-t-elle. Coup du sort, le 1er avril, la biographie Woody Belfort – Pourquoi marcher quand on peut voler?, écrite par Maryse Pagé, devait paraître aux Éditions de l’Homme. Il venait tout juste de passer à l’imprimerie lorsque le monde a basculé. « La sortie est remise au 30 septembre », confirme-t-elle.

Enfin, Rébecca Mathieu, celle qui « n’arrête jamais d’écrire », plaide pour la mise en valeur du livre québécois. « En période d’isolement, les livres se dressent entre nous et la solitude. Il y en a pour tous les goûts, mais ce n’est pas en temps de quarantaine, avec les librairies fermées et les salons du livre annulés, avec l’entièreté de l’Internet comme principal interlocuteur, que le livre québécois est mis en valeur. Nous sommes nombreux à écrire au Québec, rappelle la Grandbasiloise, qui a rédigé entre autres Mémoire et compulsion, un pavé paru chez ADA. Mais à l’échelle mondiale, nous ne représentons qu’un fil d’une grande tapisserie. Chaque fil a besoin d’amour pour continuer de vibrer avec passion. #jelisbleu, c’est offrir une loupe à la ronde, se rendre compte qu’il y a de chouettes bouquins à découvrir, écrits par des tisserands répartis à travers la province. L’un d’entre eux habite peut-être le palier juste au-dessus du vôtre… »

Vous hésitez encore à lire québécois? Demandez des suggestions dans votre entourage, à un ami, un libraire… ils sauront vous proposer des titres et des auteurs.

QUESTION AUX LECTEURS :

Que lisez-vous de bleu?