L’adaptation des villes à la COVID-19 : maires à distance

Les maires et mairesses ont dû changer presque entièrement leur façon de travailler avec la crise sanitaire actuelle. Notre équipe s’est entretenue avec les élus de Sainte-Julie, de Saint-Basile-le-Grand et de Saint-Bruno-de-Montarville pour comprendre comment a évolué leur emploi depuis que la COVID-19 a frappé le Québec.

Un texte de Gabriel Provost

Suzanne Roy, mairesse de Sainte-Julie

Comment se déroule une journée de travail typique pour vous?
Il s’agit de longues journées qui débutent dès le premier café avec la lecture des journaux et de la revue de presse. Par la suite, en déjeunant, je souhaite joyeux anniversaire aux citoyens qui sont « amis » avec moi sur Facebook. Ensuite, j’ai une alternance de rencontres et de périodes de lecture de dossiers, car chaque rencontre doit être minutieusement préparée. En temps normal (avant la COVID), j’ai souvent des déjeuners ou des dîners de travail lorsque ce sont les seuls moments libres pour approfondir certains dossiers. Je soupe rapidement à la maison et par la suite, je peux avoir jusqu’à quatre réunions ou événements en soirée par semaine. La fin de semaine est un moment privilégié pour rencontrer les citoyens dans les divers organismes.

Qu’est-ce qui a changé depuis le début de la pandémie dans votre travail?
J’ai beaucoup moins de déplacements et beaucoup plus de réunions virtuelles. Depuis le début de la pandémie, les véritables relations humaines avec les citoyens, les organismes, mes confrères, consœurs et collègues me manquent.
Nous devons aussi nous adapter rapidement selon l’évolution de la pandémie. En raison de mon rôle à l’UMQ, je partage aussi mes préoccupations et mes solutions avec mes collègues maires et mairesses des autres villes.

Comment vous êtes-vous adaptée au télétravail?
Difficilement, car je fais de la politique pour le contact humain. Ce n’est donc pas sur le plan technologique, mais relationnel.

À quel point le lien que vous avez avec les citoyens a-t-il changé avec la COVID-19?
Ma présence soutenue sur les réseaux sociaux a remplacé ma présence physique. Je suis donc toujours présente pour eux.

Yves Lessard, maire de Saint-Basile-le-Grand

Comment se déroule une journée de travail typique pour vous?
Chaque jour est une routine dans la diversité des obligations. Je commence par lire le courrier, prendre mes appels et faire beaucoup de lecture pour préparer les différentes réunions. Je siège aux comités des finances et des retraites pour la Ville, et je suis à la MRC, au conseil d’administration de la Régie de police, au conseil des eaux usées, au comité ferroviaire de l’UMQ, et j’en passe. Ce qui fait que l’on n’entend pas parler souvent du maire, mais si l’on n’en entend pas parler, c’est qu’il travaille! Ma journée commence avant le déjeuner et finit en soirée avec des retours d’appels et la planification des réunions du lendemain.

Qu’est-ce qui a changé depuis le début de la pandémie dans votre travail?
Le rapport aux autres, le contact humain. Les rencontres virtuelles n’apportent pas le lien humain, qui nous manque. L’expression corporelle est aussi importante que l’expression verbale, mais n’est plus présente en virtuel. Les échanges que l’on avait avec les autres finissent par nous manquer beaucoup. Ce qui a changé, c’est donc en deux volets, soit le côté personnel, mais également le volet organisationnel, pour respecter les obligations de la santé publique liées à la pandémie.

Comment vous êtes-vous adapté au télétravail?
Relativement bien pour l’adaptation technologique, mais relativement mal pour ce qui est du contact humain. Pour les téléconférences, parfois, c’est plus simple au chapitre des déplacements, mais ça réduit grandement les rapports humains.

À quel point le lien que vous avez avec les citoyens a-t-il changé avec la COVID-19?
Radicalement. J’allais régulièrement prendre un café ou un sandwich dans les restaurants du coin et les gens m’abordaient. C’est différent de quand on se fait questionner dans une assemblée publique. Au conseil municipal, il y a un petit stress, tandis que dans la rue, le lien est spontané. C’est regrettable d’avoir perdu ces échanges spontanés avec les citoyens.

Martin Murray, maire de Saint-Bruno-de-Montarville

Comment se déroule une journée de travail typique pour vous?
Autant avant la pandémie, on pouvait avoir des journées où l’on se rendait à l’hôtel de ville, on restait à l’hôtel de ville, on feuilletait quelques dossiers et on avait des contacts avec l’appareil administratif. Aujourd’hui, il faut prendre des rendez-vous. Donc, il faut que je puisse faire le tour de mes questions dans une rencontre. On concentre en deux heures une multitude de questions et de sujets que l’on voudrait aborder, ce qui oblige à aller en accéléré.

Qu’est-ce qui a changé depuis le début de la pandémie dans votre travail?
On est chez nous, on travaille en fonction d’un horaire plus strict, plus structuré et organisé. Par contre, le travail à distance crée une rigidité et réduit l’élément humain. Ça crée une distance physique, mais aussi de proximité dans le travail comme tel. Avant, si vous vouliez discuter d’un dossier avec un collègue, vous pouviez aller dîner ensemble durant la semaine. On peut le faire par visioconférence, mais il y a une différence en termes d’humanité et de convivialité.

Comment vous êtes-vous adapté au télétravail?
Le télétravail, c’est à la fois faire usage des outils techniques et travailler seul dans son environnement. Pour moi, être isolé n’a pas posé de problème puisque je suis comptable de formation et que je suis habitué à travailler seul. Je n’ai pas ressenti d’isolement social. Ça n’a pas été un problème, mis à part ce qui a trait aux rencontres avec les personnes avec qui on était au bureau.

À quel point le lien que vous avez avec les citoyens a-t-il changé avec la COVID-19?
Je continue à beaucoup marcher dans la ville de Saint-Bruno et j’y rencontre des citoyens qui me parlent et me posent des questions. Là où il y a de grandes différences, ce sont les séances du conseil municipal. Lorsque le conseil se tenait en présentiel, 30 ou 40 personnes venaient assister et posaient des questions aux élus. Maintenant, ce n’est plus le cas. Il n’y a plus autant de questions par écrit et il n’y a plus de deuxième période de questions. Les élus venaient également parler avec les citoyens après le conseil s’ils avaient des questions et maintenant, on ne peut plus le faire.