Saint-Bruno : une construction légale dont ne veut pas le Parti montarvillois

Le 29 mars, un tract signé par deux élus du Parti montarvillois a été distribué dans les districts 4 et 5. Le district 4 est soumis à une élection partielle. Ce tract demande aux citoyens de s’opposer à un projet immobilier qui respecte pourtant les normes d’urbanisme de la Ville.
Est-ce que la campagne de l’élection partielle dans le district 4 a déjà débuté? On peut se le demander avec la distribution de tract signé de la main de la conseillère du district 5 Isabelle Bérubé, et l’ancien conseiller du district 4 Martin Guevremont, tous deux membres du Parti montarvillois au moment des événements.
Le 29 mars, alors que M. Guevremont démissionnait le 1 avril de son poste d’élu, les deux conseillers ont remis des tracts aux résidants du quartier de la rue des Tilleuls où un projet immobilier devrait voir le jour à l’entrée de Saint-Bruno le long du boulevard Seigneurial.
On peut y lire : « Ce projet de 64 portes (datant de 2011) n’a jamais vu le jour. Selon nous, la raison principale expliquant pourquoi ce projet ne s’est pas réalisé est qu’il ne répondait pas aux besoins de gens qui cherchaient dans le secteur. » Les conseillers ajoutent que le projet a été révisé en 2018 « augmentant le nombre de portes à 110. Il n’est pas clair s’il s’agit d’un projet de logements ou de condos. »
Dans le tract, il est clairement assumé que les deux élus ne veulent pas du projet. Ils encouragent la population du district à venir à la séance du conseil du 15 avril pour s’y opposer.
Contacté sur le sujet, le maire indique clairement qu’il a une « volonté de protéger l’entrée de la Ville. Il n’y a aucun lien avec l’élection partielle. Lors de la distribution des tracts, M. Guevremont était en poste. Notre préoccupation depuis le début de notre mandat, c’est de protéger l’environnement. »

Une information incomplète

Les détracteurs du projet indique que plusieurs choses n’ont pas été dites par les deux élus du Parti montarvillois dans leur communication.
Le 3 décembre 2018, la résolution de modification du projet Riopel, validé par le Comité consultatif d’urbanisme (CCU), a été rejetée par cinq conseillers contre trois lors de la séance du conseil municipal. Le promoteur est retourné à sa planche à dessin pour changer la couleur des briques de l’édifice et ajouter des conifères matures pour ne pas voir le bâtiment depuis le boulevard Seigneurial. Ces modifications ont été une nouvelle fois validées par le CCU. À l’ordre du jour du conseil municipal du 15 avril, le projet sera de nouveau soumis au vote.
Non seulement le CCU a validé ce projet à deux reprises, mais d’autre part, le terrain constructible est la propriété de plusieurs associés habitant à Saint-Bruno. Ces derniers pourraient demander d’être indemnisés par la Ville si elle voulait empêcher le projet.
Enfin, pour les investisseurs à ce projet, il n’y a aucune ambiguïté sur le fait que ces logements seront des appartements qui répondent en tous points aux exigences urbanistiques de la Ville. Le projet est aussi dans une zone où il y a du transport en commun, ce qui permet d’avoir une plus forte densité.

« Le Comité comprend qu’il y a là une dimension politique. Nous sommes toujours très respectueux du travail du CCU. Dans 98 % des cas, nous suivons leurs recommandations. » – Isabelle Bérubé

« Je ne comprends pas! Nous sommes propriétaires du terrain depuis 10 ans. Nous sommes tous résidants de Saint-Bruno, mes parents vont habiter le projet, les parents d’un des associés vont habiter ce projet et lui-même va l’habiter. Voilà ici une preuve que nous voulons faire un beau projet respectueux de l’environnement », explique Richard Bourbeau, l’un des associés au projet.
Il indique d’autre part que Saint-Bruno a besoin de logement locatif. « Nous proposerons du locatif plus, destiné à une population de 55 ans et plus, sans que cela soit une résidence pour personnes âgées. Il y a un manque à Saint-Bruno de logement locatif. Ce projet permettrait de libérer des habitations à Saint-Bruno et d’attirer de nouvelles familles. »
Lors de son Plan d’urbanisme, la Ville avait pris la décision de ne pas protéger ce terrain et de permettre à des promoteurs d’investir. Aujourd’hui, les élus du Parti montarvillois semblent aller à l’encontre de cela et souhaitent empêcher ouvertement ce projet de se réaliser pour y construire un parc.
Après que les élus du Parti montarvillois ont été contactés par Les Versants, une communiqué officiel de la formation politique indiquait sur son site que « Le Parti montarvillois est prêt à défendre le parc des Tilleuls lors de la séance du conseil municipal du 15 avril prochain », invitant encore les citoyens à s’y présenter.

Un geste politique

Mme Bérubé, signataire du tract, reconnaît qu’il s’agit là d’un geste politique. « Nous n’avions pas beaucoup d’autres moyens que de diffuser ces tracts pour informer la population de ce que le Parti montarvillois souhaite. » L’élue, siégeant au CCU, a indiqué avoir expliqué au Comité sa décision. « Le Comité comprend qu’il y a là une dimension politique. Nous sommes toujours très respectueux du travail du CCU. Dans 98 % des cas, nous suivons leurs recommandations. Ici, il y a un problème d’acceptabilité sociale. Il n’y a pas de parc public dans cette zone et il faut protéger l’entrée de la ville. C’est un symbole pour le Parti montarvillois. » La conseillère ne cache pas qu’il y aurait un coût à tout cela. Elle n’était pas en mesure d’évaluer la dépense de l’achat du terrain. Elle reconnait par contre qu’il y a un manque de logement locatif à Saint-Bruno.
Malgré cela, à aucun moment, le Parti montarvillois n’a indiqué dans ses communications que sa volonté de faire un parc aux abords du boulevard Seigneurial pourrait coûter très cher à la Ville. « Comment faire en sorte que si la Ville transforme l’endroit en réserve foncière, elle ne soit pas poursuivie? Il faudrait acheter le terrain. Cela coûterait entre 7 et 10 millions de dollars, sans compter le coût des procédures judiciaires, ni les taxes que la Ville pourrait percevoir s’il y avait des logements. J’avoue ici ne pas comprendre et être sous le choc! », d’indiquer M. Bourbeau.
Marilou Alarie, qui est entrée en politique en se battant pour la préservation du boisé des Hirondelles, indique aux Versants que « le projet n’est pas protégé dans le Plan de conservation des milieux naturels. » Elle dénonce les élus du Parti montarvillois de ne pas tout dire aux citoyens pour les encourager à contester le projet.
« Il faut donner toute l’information. La démarche des élus du Parti montarvillois n’est pas très appréciée auprès du Service de l’urbanisme qui a validé le projet. D’autre part, l’emplacement d’un parc n’est pas impossible, un projet dans le Plan triennal d’immobilisation (PTI) prévoit d’ailleurs un investissement de 600 000 dollars pour cela, et le terrain du projet Riopel ne serait pas touché. »
Un projet qui devrait passer
Le 3 décembre le projet a été rejeté à 5 voix contre 3. Après les modifications apportées par le promoteur, changements acceptés par le CCU, qu’adviendra-t-il le 15 avril?
Joël Boucher, conseiller indépendant du district 8, qui avait voté contre le projet le 3 décembre, a décidé de se raviser et de voter en faveur le 15 avril. Avec son vote, le projet Riopel pourrait aller de l’avant.
« Nous avons un plan de conservation des plus audacieux de la CMM. 96% de nos milieux humides sont protégés. Nous avons collectivement fait le choix de privilégier les milieux naturels d’intérêts et celui de l’îlot Riopel ne fait pas partie de ces milieux. Je suis donc très à l’aise de donner le feu vert à un projet comme celui qui nous est présenté lundi soir puisqu’il est en tout point conforme à notre règlementation. La cohérence nous invite à approuver le projet pas le contraire, sinon à quoi sert l’adoption d’un plan d’urbanisme si l’on cherche à s’y soustraire. C’est tout de même le Plan d’urbanisme du Parti Montarvillois! », a t-il indiqué au Journal.