L’intimidation change vos enfants

Une étude de chercheurs de l’Université McGill dévoilée la semaine dernière démontre les effets de l’intimidation sur les jeunes et les risques à long terme.

L’équipe de Marie-Claude Geoffroy, chercheuse au département de psychiatrie de l’Université McGill, a mis au point une étude basée sur 2120 Québécois nés en 1997 ou 1998, suivis jusqu’à l’âge de 15 ans.

La recherche éclaire le phénomène de l’intimidation, et plus particulièrement du suicide. Selon celle-ci, les enfants victimes d’intimidation sont deux fois plus à risque de développer des idées suicidaires et trois fois plus susceptibles de faire une tentative de suicide. À 15 ans, la proportion des jeunes qui ont des idées suicidaires « sévères » est de 15 % chez les jeunes qui ont subi de l’intimidation, soit près de 320 jeunes, comparativement à 7 % chez les autres.

Christine Gingras, Nancy Woods, Sonia Grenon et Véronique Perreault, dont les enfants ont vécu de l’intimidation à l’Académie des Sacrés-Coeurs à Saint-Bruno, sont bien au fait des effets et des conséquences de l’intimidation sur les jeunes élèves.

Par exemple, la fille de Christine Gingras a vécu de l’intimidation de manière persistante et traumatisante. Un cas d’intimidation qui a été reconnue par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et des droits de la jeunesse et de la jeunesse. L’intimidation était telle que la jeune fille a eu des propos suicidaires et a été amenée à l’hôpital par ses parents, où les médecins ont constaté que son fonctionnement global était atteint. « Je vais me souvenir toute ma vie de ces agressions. Je me faisais détruire peu à peu », a témoigné sa fille dans une lettre.

« Le fait que l’intimidation perdure dans le temps et qu’il y a eu une agression physique, ça a augmenté son sentiment d’impuissance, son désespoir, et de fil en aiguille, ça a mené à des propos suicidaires, raconte Christine Gingras. Depuis ces événements, ma fille est restée en hypervigilance, elle avait toujours peur d’où allait venir la prochaine attaque, elle associe désormais l’école au danger. »

« Les gens ne comprennent pas les effets à long terme de l’intimidation, il faut se battre pour prouver que ça a changé nos enfants et que ça va les suivre toute leur vie. » – Nancy Woods

Pour Sonia Grenon, les actes d’intimidation n’ont pas fait germer des idées suicidaires dans la tête de son fils, mais celui-ci a indéniablement une perte d’estime de soi : « Mon garçon est devenu très nerveux avec les gens de son âge, il reste à l’écart et veut rester invisible, car il se sent impuissant devant le danger. » Selon elle, puisque l’intimidation peut s’installer sur une longue période de temps, le jeune garçon a perdu confiance qu’il y aurait une fin à cette violence envers lui et il se questionnait sur le message éducatif qui encourage la dénonciation, puisque ça ne lui a pas réussi par le passé.

Mais c’est un tout autre effet que l’intimidation a eu sur le fils de Nancy Woods. Elle explique : « Au début, c’était un sentiment de gêne, il était honteux que ça lui arrive à lui, ensuite de l’incompréhension, de l’humiliation et maintenant on est à un stade de colère. » Les enfants sont aujourd’hui beaucoup plus susceptibles et réactifs à leur milieu, leurs parents ont peur que ceux-ci commettent un geste irréparable. « Les gens ne comprennent pas les effets à long terme de l’intimidation, il faut se battre pour prouver que ça a changé nos enfants et que ça va les suivre toute leur vie », de souligner Nancy Woods.

Dès un jeune âge
L’intimidation se fait à un âge plus précoce que la croyance populaire ne le laisse croire. Non seulement leurs enfants en ont été victimes au primaire, ce qui peut surprendre beaucoup de gens, mais l’étude des chercheurs de l’Université McGill confirme que c’est souvent le cas. Au Canada, 17 % des enfants de 11 ans ont été victimes d’intimidation.

Au dire de Marie-Claude Geoffroy, comme la victimisation a un développement très précoce, il faudrait prévenir l’intimidation dès la garderie. « Ça arrive pour vrai l’intimidation au primaire, et c’est sérieux, ce n’est pas juste de la gestion de conflit ou des chicanes, ajoute Christine Gingras. Et comme ces enfants sont en plein développement, en recherche identitaire, les impacts sont permanents. »

Selon elle, cette étude démontre l’importance de lutter contre l’intimidation et de continuer à conscientiser les gens sur ce fléau. « Je crois que cette étude et nos histoires démontrent l’importance de ne pas banaliser, il faut alors qu’il y ait une connaissance des impacts de l’intimidation sur les enfants et qu’idéalement, la consigne de « tolérance zéro » soit réellement prise pour ce que cela dit », conclut-elle.