L’amusement sous haute tension

L’UMQ et Hydro-Québec signent une entente-cadre visant l’utilisation des espaces sous les lignes de transport d’électricité à des fins récréatives ou communautaires. L’endroit n’est pas forcément approprié pour certains.

La présidente intérimaire de l’Union des municipalités du Québec (UMQ) et mairesse de Sainte-Julie, Suzanne Roy, et le président d’Hydro-Québec TransÉnergie, Marc Boucher, ont annoncé la signature d’une entente-cadre. Cette entente précise les conditions avantageuses offertes aux municipalités lors de la location d’emprises de lignes de transport d’électricité afin de réaliser des aménagements récréatifs ou communautaires compatibles avec le réseau électrique, tels qu’une piste cyclable, un terrain sportif ou un jardin communautaire.

« Ça se faisait déjà, mais les ententes financières étaient trop onéreuses pour certaines villes. Cela permettra d’avoir de la place pour de l’aménagement récréatif. Ce seront pour les villes des baux à court terme, d’une année. Ce qui est intéressant pour les municipalités qui investissent dans ces endroits, c’est qu’Hydro-Québec s’engage à les indemniser si elle doit reprendre possession de leur bien », explique au journal Mme Roy.

Ainsi, les parties conviennent que l’exploitation de ces espaces favorise une intégration harmonieuse des équipements d’Hydro-Québec dans le milieu et permet une utilisation polyvalente des emprises au bénéfice des citoyens. « L’entente témoigne de la volonté des municipalités et d’Hydro-Québec de travailler en étroite collaboration afin de mettre en valeur des actifs dans l’intérêt des collectivités », a souligné M. Boucher.

L’entente prévoit entre autres :

– l’application d’un loyer forfaitaire n’excédant pas 1 000 $ par année pour certains usages récréatifs ou communautaires plutôt qu’un loyer à la valeur du marché;

– la possibilité de signer des baux assortis d’options de renouvellement d’une durée maximale de 15 ans;

– dans l’éventualité de la reprise des lieux loués par Hydro-Québec avant la fin du bail, le versement de compensations pour dédommager les municipalités ayant effectué des investissements;

– dans l’éventualité de la vente du terrain loué par Hydro-Québec, un droit de premier refus aux municipalités visées.

« Cela permettra d’avoir de la place pour de l’aménagement récréatif. » – Suzanne Roy

Les modalités envisagées ne visent que les baux signés entre Hydro-Québec et une instance municipale dans le cadre de la réalisation d’aménagements récréatifs ou communautaires dans une emprise de ligne de transport d’électricité en exploitation.

« Moi, je serai le dernier à installer de l’équipement municipal sous les lignes électriques. » – Martin Murray

Des voix discordantes

« Il n’y a aucun danger d’avoir une activité sous une ligne à haute tension. C’est évident, certaines activités ne pourront pas être pratiquées si celles-ci présentent un risque avec la proximité les lignes. Il n’y a aucune crainte à avoir », souligne Mme Roy.

Une croyance populaire démentie également par le porte-parole d’Hydro-Québec, Louis-Olivier Batty : « Toutes les activités qui pourraient toucher les lignes à haute tension ne seront pas permises, mais il n’y a aucun danger pour le public d’avoir un parc, une piste cyclable ou un terrain de sport en dessous. »

Des dangers « possibles »

Des lignes à haute tension inoffensives, ce n’est pas l’avis de tout le monde et notamment de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). L’organisme est un établissement public français qui a pour mission principale d’évaluer les risques sanitaires dans les domaines de l’alimentation, de l’environnement et du travail, en vue d’éclairer la décision publique. L’Anses est placée sous la tutelle des ministères de la Santé, de l’Agriculture, de l’Environnement, du Travail et de la Consommation. Elle mettait en garde le public, en 2019, quant aux « risques possibles » par les champs magnétiques à basse fréquence, émis notamment par les lignes à haute tension. Le risque « possible » à long terme étant la leucémie chez les enfants qui habitent à proximité. Une inquiétude déjà émise en 2010 par l’organisme.

Dans ses recommandations, l’Anses préconise même au gouvernement français « de ne pas implanter de nouvelles écoles près des lignes à très haute tension ».

L’Institut national de la Santé publique du Québec (INSPQ) indiquait en 2014 qu’il y avait « une possibilité d’un risque accru de leucémie chez l’enfant à la suite de l’exposition aux champs magnétiques d’extrêmement basses fréquences (CMEBF) ». Cependant, « dans l’ensemble, le comité est d’avis que les preuves d’une association entre l’exposition aux champs magnétiques de 50 à 60 Hz et la leucémie chez l’enfant sont faibles et non convaincantes, rejoignant la position de l’OMS (2007) ».

Principe de précaution

Contrairement à la Ville de Sainte-Julie qui n’a pas de ligne à haute tension traversant son territoire, le maire de Saint-Bruno-de-Montarville, Martin Murray, est moins enthousiaste par cette nouvelle entente entre l’UMQ et Hydro-Québec. « Dans le futur, il se pourrait qu’à Saint-Bruno, il y ait des installations récréatives sous des lignes à haute tension, mais pour moi, ce n’est pas la vision que je vais privilégier. Ils (UMQ et Hydro-Québec) ont leur vision des choses. »

M. Murray ne remet pas en cause l’entente, mais personnellement, il a exprimé au journal Les Versants toutes ses réticences à vouloir occuper les lieux. « Nous avons déjà déplacé le parc à chiens en 2011, car il se situait sous les lignes à haute tension. Il peut arriver que des personnes qui circulent à vélo sous les lignes électriques du côté du parc Marie-Victorin reçoivent des décharges électriques. Il y a des personnes plus sensibles que d’autres et c’est sans compter avec le bruit que les lignes à haute tension font en permanence. Moi, je serai le dernier à installer de l’équipement municipal sous les lignes électriques. »

Question aux lecteurs : Avez-vous peur de rester trop longtemps sous des lignes à haute tension?