La fierté polonaise d’Eugene Jankowski

Eugene Jankowski est intervenu lundi dernier, le 7 mars, à l’assemblée de Saint-Basile-le-Grand afin de s’adresser aux membres du conseil municipal.

Le Grandbasilois s’est présenté à la dernière séance du conseil municipal de Saint-Basile-le-Grand pour remercier la Ville d’appuyer les Ukrainiens dans la guerre contre la Russie.

« Je suis fier du peuple polonais, qui vient en aide à ces gens qui s’enfuient, sans rien attendre en retour, sans préjudice. » – Eugene Jankowski

Rappelons qu’en appui au peuple ukrainien, la Municipalité a dressé le drapeau jaune et bleu, aux couleurs de l’Ukraine, la semaine dernière. De plus, l’hymne national a été interprété au piano en début d’assemblée.

Le père d’Eugene Jankowski demeurait en Ukraine. Il a fui le pays alors qu’en 1932 et 1933, Staline, qui avait pris le pouvoir, a créé une grande famine, provoquant près de 5 millions de morts. Un des grands génocides de l’histoire, rappelle le citoyen de Saint-Basile-le-Grand.

Après la fuite de son père et de sa famille vers l’ouest, Eugene Jankowski est venu au monde en Pologne, en 1948. « Je suis doublement fier parce que la Ville a mis le drapeau des Ukrainiens. Mais aussi parce qu’étant d’origine polonaise, nous avons subi les mêmes conséquences que le peuple ukrainien. Aujourd’hui, nous les accueillons à bras ouverts. Je sais que les membres de ma famille encore là-bas accueillent plusieurs réfugiés chez eux en ce moment », de mentionner le citoyen de Saint-Basile-le-Grand.

Rencontre

Le journal Les Versants s’est assis avec Eugene Jankowski à la suite de son intervention municipale pour en savoir plus sur son histoire. « Mon père, sa sœur, son frère et leur mère ont fui vers la Pologne. Mon grand-père est resté en Ukraine. Il faisait du sabotage contre les Russes. C’était son effort contre eux. »

Son père, lorsqu’il s’est exilé en Pologne, était âgé de 15 ou 16 ans. La famille s’est installée en banlieue de Varsovie. « C’est une distance qui est similaire à celle entre Saint-Basile et Montréal », précise le Grandbasilois.

« Durant la Deuxième Guerre mondiale, ma mère était dans les camps de concentration. Mon père était dans l’armée polonaise, en Angleterre. Plus tard, parce qu’il avait fait l’armée, mon père a eu l’opportunité d’immigrer. Il ne voulait pas retourner en Pologne, à cause du communisme. Il avait le choix d’aller en Australie, en France, aux États-Unis ou au Canada. »

C’est en raison d’une rencontre avec des soldats francophones du Royal 22e Régiment que le père de M. Jankowski a décidé de s’établir en Abitibi, au Canada. « Mon père est parti seul, pour travailler dans les mines d’or pendant une année. Nous l’avons rejoint ensuite, ma mère, mon frère Richard et moi. J’avais quatre ans », relate M. Jankowski, dont l’arrivée au Canada date de 1952, en Nouvelle-Écosse.

À bras ouverts

En entrevue, il revient au présent. « Ils arrivent paniqués, attristés. Les Polonais les reçoivent avec le sourire. Les Ukrainiens retrouvent ensuite le sourire. Je regarde ce qui se passe, la réaction des Polonais face à cet exode des Ukrainiens. Je ne suis pas surpris. Ils les accueillent à bras ouverts », confie-t-il fièrement.

Celui que l’on connaît aussi en tant que sculpteur sur pierre raconte qu’il a très peu de contacts avec la famille de son père, là-bas. Par contre, la famille de sa mère est encore en Pologne. Il a visité les siens il y a quelques années. Aujourd’hui, ils se parlent régulièrement, grâce à la technologie. De ces conversations, il comprend que les gens en Russie, en Ukraine et en Pologne n’identifient pas cette invasion de guerre en Ukraine, mais plutôt comme « la guerre à Poutine ».

« J’ai parlé à mon cousin. Avec des amis à lui, ils ont ramassé des denrées. Ils ont pris une voiture et sont partis à Varsovie avec des réfugiés à bord. Tout le peuple polonais s’est mobilisé. Ce geste ne m’a pas surpris. C’est dans notre sang. Quand quelqu’un est dans la misère, on l’aide! Je suis fier du peuple polonais, qui vient en aide à ces gens qui s’enfuient, sans rien attendre en retour, sans préjudice », raconte-t-il.

Or, dans ses conversations avec M. Jankowski, ce cousin a critiqué le premier ministre du Canada. Il estime que Justin Trudeau devrait débloquer la réglementation pour l’immigration des réfugiés. « Pour eux, le Canada est un immense pays, avec des terres inhabitées dans l’ouest. Il dit que Trudeau devrait les embarquer dans un avion et les accueillir », conclut le septuagénaire.