La crise du verglas de Gaétan Boulet

En janvier, il y a maintenant 25 ans qu’est survenue la crise du verglas. À la retraite depuis 2018, Gaétan Boulet en a été un témoin privilégié en tant que responsable du centre d’hébergement établi à l’école secondaire du Mont-Bruno.  

Gaétan Boulet a participé au documentaire 35 jours de noirceur, diffusé la semaine dernière à TVA. La production a contacté la Ville de Saint-Bruno au début de l’année 2022 pour son documentaire sur le 25e anniversaire du phénomène météo. Il y avait un intérêt pour le centre d’hébergement mis en place à Saint-Bruno. Celui-ci avait été fonctionnel pendant 17 jours, du 8 au 24 janvier. Gaétan Boulet n’a pas hésité à prendre part au documentaire.

« Au total, nous avons servi 35 000 repas. » -Gaétan Boulet

Au début des précipitations de pluie verglaçante, quelques Montarvillois ont manqué d’électricité. Puis leur nombre est allé en augmentant. Le 6 janvier, 50 % de la ville n’avait pas de courant électrique. Ces gens avaient été réunis au centre communautaire actuel. Mais le 8 janvier, lorsque la totalité de la municipalité était plongée dans le noir, les autorités municipales ont transféré le centre d’hébergement à l’école secondaire du Mont-Bruno. « La Ville avait un plan de mesures d’urgence de base, pas très élaboré, qui avait été instauré à la suite de la crise des BPC à Saint-Basile. Les rôles de chacun étaient identifiés », explique Gaétan Boulet, qui travaillait alors comme directeur-adjoint au Service des loisirs.

Selon le plan de mesures d’urgence, M. Boulet était entre autres responsable du Service aux sinistrés et de la coordination du ou des centres d’hébergement. « Nous avions un plan, mais nous avons appris beaucoup sur le tas. Nous n’étions pas prêts à faire face à un tel événement », reconnaît M. Boulet.

L’école secondaire avait été privilégiée pour ses locaux, sa génératrice, ses cuisines, ses douches, ses gymnases… « C’était le lieu idéal pour accueillir un grand nombre de personnes », mentionne celui qui avait l’impression de gérer une mini-ville. Au centre d’hébergement, des dortoirs occupaient les lieux, mais pas tous au même endroit. « Les gens ne dormaient pas tous à la même place. Nous avions une zone pour les citoyens à mobilité réduite, une autre pour les aînés, une pour les bénévoles, encore une pour les familles… Il y avait tellement de locaux, c’était facile de placer tout le monde. »

Au plus fort de la crise, le centre avait accueilli 450 personnes pour dormir. Mais au cours des 24 jours qu’a duré l’hébergement, ce sont 5000 citoyens qui auront quitté, à un moment ou à un autre, leur demeure pour aller se réfugier, ne serait-ce que pour manger. « Chaque jour, 2500 repas étaient préparés par des chefs sur place. Au total, nous avons servi 35 000 repas. Évidemment, nous avions besoin de bénévoles, de 300 à 400, mais ils étaient faciles à trouver; ils n’avaient rien à
faire! »

Aujourd’hui, M. Boulet est fier de dire que les sinistrés ont eu droit à une belle qualité de vie tout au long de leur séjour au centre d’hébergement. Ils avaient accès à des douches, à un service téléphonique, à un service de garde, à des spectacles (Kevin Parent, France D’Amour, Anthony Kavanagh…), ainsi qu’à la possibilité de rencontrer médecin, infirmière, psychologue. Des messes étaient organisées le dimanche, puis un espace avait été dédié aux animaux de compagnie. « Je crois que la plupart des gens conservent un bon souvenir de cette expérience, malgré le désastre. »

Quand on lui demande ce qu’il retient de ces 24 jours en tant qu’employé de la Ville, le retraité évoque une expérience qui est passée du stress à l’enrichissement. Puis parle de solidarité, d’entraide, de tolérance, de bénévolat. Par contre, le citoyen en lui déplore d’avoir été loin des siens. Alors qu’il passait le plus clair de son temps au centre d’hébergement – jusqu’à dormir sur les lieux – ses enfants et sa conjointe étaient plutôt hébergés chez de la famille et des amis. « Ç’a été le bout le plus difficile; de ne pas pouvoir les voir ni leur parler », se rappelle celui qui a eu 40 ans le 17 janvier 1998. « Les gens du centre ont organisé une fête pour mon 40e anniversaire. Ils avaient eu le soin d’inviter ma famille. Ça avait fait du bien », de conclure Gaétan Boulet.

À Saint-Basile-le-Grand

De son côté, le Grandbasilois Richard Pelletier indique qu’il conserve bien des souvenirs de cette époque. « Je me souviens des Forces armées, qui passaient de porte en porte pour s’assurer que tout allait bien, de la distribution du bois de chauffage, des douches prises au club de golf, des moments de lecture. La situation était stressante, ne sachant pas dans quel état on retrouverait notre toiture, notre plomberie. Malgré tout, lorsqu’on en reparle, nos enfants nous racontent leurs beaux souvenirs : dormir au sous-sol, devant un foyer, chez des amis… », illustre M. Pelletier.