La cicatrice qui sépare Saint-Basile

Le chemin de fer du CN

Est-ce que les citoyens de Saint-Basile-le-Grand qui demeurent au sud de la route 116 se situent dans un secteur enclavé de la municipalité?

« En temps normal, on se sent souvent otages des passages à niveau », souligne Alberto Sanchioni, un Grandbasilois avec qui le journal Les Versants a abordé le problème. Cette situation, ils sont des centaines, voire quelques milliers, à la vivre quotidiennement sur le territoire de Saint-Basile-le-Grand.

« La voie ferrée est une cicatrice qui sépare en deux la ville de Saint-Basile-le-Grand. Nous sommes enclavés par les trains de marchandises. » – Yves Lessard

Notons qu’à la fin du mois d’octobre, des travaux effectués par le CN sur la voie ferrée ont forcé la fermeture du boulevard du Millénaire pendant près de deux jours. En raison d’un manque de communication entre le CN et le ministère des Transports du Québec (MTQ), plusieurs automobilistes ont dû prendre leur mal en patience pour sortir et entrer dans Saint-Basile-le-Grand. « Alors, des situations semblables sont moins tolérées par les citoyens », poursuit Alberto Sanchioni.

Peut-être en raison des conséquences qui pourraient se produire en de telles occasions. Quand on demande au maire de Saint-Basile-le-Grand, Yves Lessard, si la municipalité est enclavée, il n’hésite pas à répondre : « Définitivement! » Il précise son point de vue sur le sujet : « La voie ferrée est une cicatrice qui sépare en deux la ville de Saint-Basile-le-Grand. Nous sommes enclavés par les trains de marchandises. »

Imaginons un début d’incendie à l’École de la Mosaïque, au Centre communautaire Lise-B.-Boisvert, au local de la Maison des jeunes La Butte ou, encore pire, un incident majeur dans l’une des stations d’essence de la route 116. Il s’agit de sites situés tous au nord de la voie ferrée. Les services incendie les plus proches, localisés au sud de celle-ci, se trouvent actuellement sur la rue Savaria, et d’ici quelques années, dans la future caserne de la montée Robert. Même en traversant la route 116, les pompiers atteindraient tous les endroits mentionnés plus haut en l’espace de quelques minutes. Mais si un train de marchandises traversait Saint-Basile-le-Grand au même instant, que se passerait-il? Les pompiers basés à Beloeil interviendraient.

Rappelons qu’à Saint-Basile-le-Grand, la nouvelle Régie intermunicipale de sécurité incendie de La Vallée-du-Richelieu (RISIVR) est effective depuis le 1er janvier 2019. La RISIVR regroupe les cinq services de sécurité incendie (Saint-Mathieu-de-Beloeil est desservie par McMasterville) des municipalités signataires (Saint-Basile-le-Grand, McMasterville, Saint-Mathieu-de-Beloeil, Beloeil, Otterburn Park et Mont-Saint-Hilaire) et forme une seule et unique entité.

« D’un côté ou de l’autre, le train bloque le sud. Pour un événement majeur, nous aurions besoin de la participation des autres services parce que nos pompiers auraient un détour à effectuer par le chemin du Richelieu. C’est très grave! », martèle Yves Lessard. Il faut noter que la montée Robert débouche sur le chemin du Richelieu, contrairement à la rue Bella-Vista, qui se termine par un cul-de-sac. Selon lui, le CN ne serait pas montré du doigt en cas d’incident malheureux, car « nous sommes tributaires de tout le pouvoir du CN ».

Pour sa part, le CN dit comprendre « les préoccupations des résidants, et ce, même si les opérations ferroviaires requièrent parfois des arrêts non planifiés, le CN travaille constamment afin de minimiser les conséquences de ces arrêts qui ont également un impact sur la fluidité de notre réseau. » Le conseiller principal, relations médias et affaires publiques du CN, Alexandre Boulé, poursuit : « En cas d’urgence, lorsqu’un passage à niveau est bloqué, toute personne devrait rapidement contacter le centre de communications de la police du CN au 1 800 465-9239. Le numéro est également indiqué sur les passages à niveau. »

L’idée de viaducs, au-dessus de la route 116 et de la voie ferrée, est possible, admet le premier magistrat, mais il faudrait que ces constructions soient longues pour inclure la 116 et le rail, et elles déborderaient dans les secteurs bâtis de Saint-Basile.

D’après le maire, la seule façon de régler ce problème, c’est de voir le transport ferroviaire d’une autre façon et de modifier l’usage du chemin de fer.

En septembre, Saint-Basile a présenté un Mémoire au MTQ dans le cadre des consultations en prévision du Sommet sur le transport ferroviaire. L’objectif : envisager l’avenir de ce mode de transport afin qu’il soit moins dérangeant et plus sécuritaire. Suivant une analyse effectuée en 2014 par Transports Canada, une liste des 500 passages à niveau présentant un potentiel de risques élevé a été dressée, incluant ceux du territoire grandbasilois, au croisement de la montée Robert (25e rang) et du boulevard du Millénaire (36e rang). « On parle d’avenir et de transporter le Québec vers la modernité; on n’y arrivera jamais avec le transport du rail à travers 500 villes », constate M. Lessard. D’après ses dires, il n’y pas d’autres solutions que « de se débarrasser de ça dans les municipalités ».

Parmi ses solutions, il propose de dégager le transport de marchandises du chemin de fer existant et de l’ancrer sur une nouvelle voie, par exemple dans le centre des autoroutes, et de consacrer la voie ferrée actuelle aux passagers. « Nous sommes rendus là, croit-il. Sans rêve, on n’avance pas! »

QUESTION AUX LECTEURS :
Quelles solutions proposez-vous face à cette problématique?