Être paresseux peut aider l’environnement

La patrouille verte de Saint-Bruno veut sensibiliser les citoyens à l’herbicyclage; une pratique de tonte de pelouse élémentaire, mais très importante pour l’environnement.

un texte de Cybèle Olivier

L’herbicyclage est connu depuis longtemps et même pratiqué inconsciemment par des citoyens. Il s’agit de laisser les rognures de gazon sur le sol après avoir tondu votre pelouse. De retour cet été, la patrouille verte sillonnera la ville pour conscientiser les citoyens aux bonnes pratiques environnementales, dont l’herbicyclage. Cette pratique sera au cœur de sa campagne de sensibilisation, puisque les citoyens seront contraints d’en faire usage.

Selon Sylviane Jinchereau, chargée de projet à la division en environnement de la ville, les citoyens réagissent fortement aux nouveaux calendriers de collectes. Désormais, ce ne sera plus 32 collectes de résidus verts qui seront faites entre avril et novembre, mais bien 8. Le recyclage du gazon sera quasi indispensable, mais pas obligatoire, comme à Rimouski ou Bromont.

« Ce n’est pas dans nos objectifs de rendre cette pratique obligatoire, mais avec ce qu’on vient de faire dans le changement du nombre de collectes de résidus verts, on force le changement de comportement», a déclaré la chargée de projet.

Sauvez l’or bleu

Bien qu’elle inquiète, cette pratique est grandement encouragée par la ville de Saint-Bruno et par les organismes environnementaux. Les bienfaits des rognures de pelouse sont multiples. Elles constituent l’engrais naturel le mieux adapté à votre gazon.

Lorsqu’elles sont coupées et laissées au sol, les rognures forment une couche protectrice qui retient l’humidité et enrichit la pelouse de plusieurs éléments nutritifs. Ce recyclage d’éléments permet de combler environ 30 % des besoins en fertilisants d’une pelouse durable et de réduire significativement les besoins d’arrosage : une partie non négligeable de l’entretien de la pelouse. Rappelons que le Québec est la province qui gaspille le plus d’eau potable au Canada, et ce, particulièrement l’été. Selon le Réseau Environnement en 2014, 75 % de l’eau traitée par les municipalités du Québec était utilisée uniquement pour arroser les pelouses.

« Ce n’est pas dans nos objectifs de rendre cette pratique obligatoire, mais avec ce qu’on vient de faire dans le changement du nombre de collectes de résidus verts, on force le changement de comportement. » – Sylviane Jinchereau

Enrayer la pollution

Pour Paula Berestovoy, chef de service en gestion des matières résiduelles et écocivisme à Nature Action Québec, « l’herbicyclage est un moyen paresseux d’économiser temps et argent ». (exergue) D’ailleurs, on économise 35 minutes, en moyenne, par période de tonte en laissant l’herbe au sol.

Pour la chef de division, jeter cet engrais naturel pour le remplacer par un artificiel n’est pas la solution. « Quand on jette le gazon coupé aux poubelles, c’est la plus grande nuisance et la pire façon de s’en débarrasser. C’est du transport de plus et c’est de la matière organique qu’on enlève de l’environnement et qu’on apporte dans un site d’enfouissement », a-t-elle expliqué.

Dans ces sites, les matières organiques en décomposition sont très compactes et se décomposent sans oxygène, ce qui provoque l’émanation de grande quantité de méthane, un gaz à effet de serre 25 fois plus puissant que le CO. Jeter les rognures dans les résidus verts est une meilleure option, mais cela provoque toutefois le déplacement de camions pollueurs.

Ce qu’il faut changer

Charlotte Legault, de la patrouille verte, et Paula Berestovoy décrivent toutes deux le même problème : un attachement à la beauté de notre herbe. « Au lieu de toujours vouloir quelque chose de parfait sans rien d’autre que des petits brins longs et verts, peut-être qu’il faudrait changer notre perception de ce qu’on voit. Une pelouse variée est plus résiliente à plein de choses », a déclaré Berestovoy. De son côté, la patrouilleuse espère enrayer les craintes non fondées liées à l’herbicyclage, comme le jaunissement du gazon, son étouffement et la pousse de mauvaises herbes.