Densification aux Promenades et deux étages au centre-ville: l’avis d’un urbaniste

Saint-Bruno risque de se développer avec un nouveau plan d’urbanisme, mis de l’avant par l’administration municipale nouvellement élue à la mairie. Pleins feux sur les enjeux liés à ce changement avec un urbaniste.

Le professeur en planification urbaine à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Michel Rochefort, a notamment œuvré au sein de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) comme coordonnateur en aménagement du territoire, en plus d’avoir occupé le même rôle à Québec et de conseiller la CMM et le ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire sur le plan de l’urbanisme.

Questionné à savoir ce qu’il pense de l’idée du maire Grisé Farand comme quoi « la densification, on la déplace, on la fait derrière les Promenades plutôt que de la faire au centre-ville » pour respecter les normes de densité de l’agglomération de Longueuil et de la CMM, l’expert croit que ce n’est pas forcément une solution à privilégier. « Certains secteurs de la ville pourraient être revalorisés avant qu’un espace naturel soit utilisé pour y développer un nouveau quartier. » 

Milieu plus compact

Il décrit le concept de « compacité » comme étant une avenue qui pourrait être d’intérêt pour une Ville comme Saint-Bruno. « Actuellement, si l’on regarde le Provigo et tout ça, on est très loin du milieu de vie à échelle humaine, compact. Pourtant, c’est du deux étages et du un étage. On pourrait apporter une mixité verticale, donc, des commerces au rez-de-chaussée et du résidentiel à l’étage. Avec une réflexion pour avoir un milieu plus compact, tout en respectant des hauteurs pas très élevées, on aurait déjà un gain de densité. »

Quant à la limite d’étages, qui serait de deux pour les immeubles du cœur de Saint-Bruno, M. Rochefort indique que ce n’est pas forcément un problème en soi. « L’administration pourrait choisir de valoriser le logement individuel à deux étages et, pour certains projets identitaires, on pourrait aller plus haut. » Cette permission est d’ailleurs incluse dans le projet de règlement, où il est inscrit qu’ajouter un étage serait possible par une démarche de Projet particulier de construction, de modification ou d’occupation d’un immeuble (PPCMOI).

« Certains secteurs de la ville pourraient être revalorisés avant qu’un espace naturel soit utilisé pour y développer un nouveau quartier. »

– Michel Rochefort 

Redévelopper les Promenades

Pour M. Rochefort, il n’est pas mauvais de penser qu’il pourrait y avoir un redéveloppement du secteur des Promenades St-Bruno qui s’opère. « Il faudrait alors réfléchir au redéveloppement des Promenades et des secteurs déjà urbanisés avant de s’étendre sur les espaces naturels. » 

À son avis, ce type de réflexion doit se faire, notamment en raison des changements majeurs dans la manière de consommer qui surviennent présentement dans nos sociétés. « Tous les centres commerciaux sont en réflexion sur leur avenir dans 20 ans. Le centre commercial de Saint-Bruno peut très bien fonctionner maintenant, mais on sait très bien que notre mode de consommation dans 20 ans risque fort bien de s’être transformé. »

L’expert en urbanisme estime que l’idéal est de réfléchir dès maintenant à la manière dont sera développée la Ville de Saint-Bruno. « On viendra créer une très forte densité à un endroit qui va peut-être venir éteindre ce que l’on cherche à préserver dans le centre-ville. » 

La situation qui pourrait se produire dans l’éventualité de l’aménagement d’un nouveau quartier comme celui prévu derrière les Promenades St-Bruno pourrait, à son avis, avoir le même type d’effet que lorsque les centres commerciaux sont arrivés dans les années 1970 au Québec. « Comme c’est arrivé avec les centres d’achats, qui sont venus tuer les rues principales, déplacer la densité pourrait déplacer l’animation que l’on cherche à préserver dans le vieux centre. » 

L’urbaniste mentionne cependant que créer un nouveau quartier peut s’avérer positif, dans l’éventualité où il est connecté à ceux qui sont existants. Ainsi, les nouveaux résidants utiliseraient les services à proximité du centre-ville et déjà existants pour répondre à leurs besoins. 

Ses observations le poussent plutôt à estimer que ce ne serait pas forcément bénéfique à Saint-Bruno à cause de la manière dont le nouveau quartier serait installé. « On va créer une mixité à un autre endroit et cette mixité demandera sûrement des déplacements en voiture qui ne seraient pas actifs pour accéder au centre-ville et à d’autres points de service. » 

Michel Rochefort indique que les élus qui viennent d’arriver à la mairie ont tous les droits de remettre en question ce qui a été décidé par l’administration précédente. Or, il ajoute qu’« il faut que ça s’inscrive dans une réflexion qui vise tous les aspects du développement durable, pas uniquement la question des hauteurs et de la densité ».