Crise du recyclage en Montérégie

La société Ricova, qui s’occupe notamment de la collecte des matières recyclables à Saint-Basile-le-Grand, se retrouve sans solution devant la crise du recyclage si les Villes n’acceptent pas de l’aider.
La crise du recyclage frappe le Québec entier. Alors que la Chine a décidé en septembre 2017 d’arrêter d’acheter le papier de la collecte du Québec, n’étant pas d’assez haute qualité, et a coupé tous les liens en janvier 2018, les centres de tri et services de collecte se retrouvent avec des montagnes de matières recyclables qui ne vont nulle part.
C’est le cas pour Ricova, pour qui la situation vire au vinaigre. Le centre de tri avec qui Ricova fait affaire, Groupe Tiru, n’étant plus en mesure de vendre les matières recyclables qui s’accumulent, fait payer le prix fort aux services de collecte.
Selon Dominic Colubriale, président-directeur général de Ricova, l’entreprise vendait au coût de 150 $ la tonne de matières recyclables au Groupe Tiru. Maintenant, elle doit payer pour que le centre de tri les prenne. « Ils m’ont envoyé une lettre en avril pour me dire que dès juin, je dois payer 70 $ la tonne, autrement il ne prendra plus nos matières », déplore-t-il.
Le président dit qu’il perd entre 40 000 $ et 50 000 $ par mois depuis le début de la crise.

Refus des municipalités

Afin de faire face à ces pertes, le ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire (MAMOT) a donné l’accord aux municipalités de rouvrir les contrats les liant aux centres de tri et services de collecte, si ceux-ci étaient en mesure de justifier l’augmentation nécessaire, afin de soutenir l’industrie en crise.

« Les Villes ne sont pas intéressées de payer un sou de plus pour soutenir l’industrie, elles ne veulent pas se mouiller là-dedans et ouvrir leur budget. »
– Dominic Colubriale

Certaines municipalités ont accepté, comme la Ville de Montréal qui a accepté de donner 29 millions de dollars supplémentaires à son centre de tri, alors que d’autres ont refusé.
Des municipalités avec qui Ricova a des ententes, Saint-Basile-le-Grand, Chambly et Mont-Saint-Hilaire, ont refusé de renégocier leur contrat.
Dominic Colubriale croit qu’elles ne prennent pas la situation au sérieux : « Les Villes ne sont pas intéressées de payer un sou de plus pour soutenir l’industrie, elles ne veulent pas se mouiller là-dedans et ouvrir leur budget. »
Le maire de Saint-Basile-le-Grand, Yves Lessard, explique sa position en disant qu’il attendra la fin de leur entente, soit à la fin de l’année, pour en négocier une nouvelle. « Ça ne me convient pas de rouvrir les contrats quand tout d’un coup ils sont à perte, justifie-t-il. On va jusqu’au bout du nôtre et on est en plein droit de refuser de renégocier. »

Qui doit payer pour le traitement?

Dominic Colubriale est convaincu que ce n’est pas à son entreprise à payer pour la valorisation des matières recyclables. « Je perds 40 000 $ par mois à payer le Groupe Tiru, ce n’est pas à moi à payer ça », souligne-t-il.
Ricova croit donc que l’augmentation des prix est justifiée pour assurer le traitement des matières. « Oui, les prix ne sont pas les mêmes qu’on a soumissionnés il y a quelques années, mais là, on est en force majeure, ce qui fait que le prix actuel ne reflète plus du tout le vrai prix. On demande aux villes de payer le juste prix », démontre Maria Ouazzani, avocate chez Ricova.
Selon Yves Lessard, l’entente actuelle entre les deux parties demande à la Ville de payer 5 $ la tonne de matières recyclables collectée, et Ricova demande maintenant environ 20 $ la tonne afin de compenser, ce qu’il considère comme inconcevable.
La Municipalité est d’avis que ce n’est pas à elle d’assumer cette dépense. « Nous, notre entente, c’est pour la collecte uniquement. Pour en faire le traitement, Ricova a des ententes avec les centres de tri, donc qu’ils réussissent à en disposer ou pas, ce n’est pas notre problème. »
Dominic Colubriale dit étudier toutes les solutions possibles, mais n’en voit aucune, sauf peut-être suspendre la collecte, a-t-il dit sur un ton alarmiste.