Des élèves indignés

À l’instar de milliers d’élèves à travers le Québec, des étudiants de 5e secondaire à Saint-Bruno-de-Montarville et Saint-Basile-le-Grand se sont révoltés contre leur examen de français du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur.

Que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans les médias, plusieurs élèves ont manifesté leur indignation par rapport à la question de leur épreuve uniforme de français, qui se lisait comme suit : « Peut-on s’adapter aux changements climatiques? »

Le journal Les Versants s’est entretenu avec trois d’entre eux. De prime abord, ces élèves étaient contents de voir que le sujet porterait sur les changements climatiques, en pensant pouvoir partager des visions d’avenir. « C’est délicat que le gouvernement ait décidé de faire l’examen sur l’environnement, alors qu’on sait que la jeunesse est engagée pour la protection de la planète. Ils l’ont vu quand on a manifesté pour le climat dans les rues le 15 mars », indique Amélie, qui fréquente l’École secondaire du Mont-Bruno.

Mais voyant que la question principale suggérait davantage qu’il faille s’adapter aux changements climatiques plutôt que d’y faire face, plus de 35 000 personnes ont dénoncé la « paresse » du gouvernement sur le groupe Facebook « Examen du ministère 2019 ».

« On n’en revient tout simplement pas qu’on nous demande à nous, qui sommes supposés représenter l’avenir, de voir comment on peut se plier aux conséquences des changements climatiques, au lieu de nous demander comment est-ce qu’on peut changer les choses et sauver la planète », ajoute la jeune fille.

« C’est délicat que le gouvernement ait décidé de faire l’examen sur l’environnement, alors qu’on sait que la jeunesse est engagée pour la protection de la planète. » – Amélie, une élève

Des jeunes tournés vers les solutions
De toute évidence, ces jeunes auraient préféré mettre de l’avant des solutions pour tenter d’inverser les changements climatiques. « Je pense que pour notre génération, on est très informés sur la question et je suis sûr qu’on aurait pu apporter plein de pistes de solution, même si on sait que c’est juste un examen de français et que le ministère ne prend pas réellement en compte nos réponses comme idées », souligne un autre élève de l’école secondaire du Mont-Bruno.

Les élèves se servent maintenant de leur nouvelle plateforme pour faire partager des idées : « C’est sûr que nous, comme individus, on peut faire des gestes concrets pour l’environnement, comme être zéro déchet, devenir végétariens, etc. Mais on aimerait que les entreprises arrêtent d’extraire et de brûler du pétrole, par exemple, ou de produire du plastique, de polluer les cours d’eau, etc. »

Ces jeunes souhaitent donc une prise de conscience envers l’urgence d’agir. « Il ne faut pas juste punir ceux qui polluent, mais plutôt penser à une meilleure façon de faire les choses, soutient Léa, de l’École d’éducation internationale de McMasterville. On le voit avec les inondations au Québec que ça va juste revenir plus fort et plus souvent, qu’il faut faire quelque chose de concret pour rétablir le climat. »

Mais globalement, ces jeunes se sentent abandonnés. « Les gouvernements au pouvoir ne font rien et comme on n’a pas pu voter pour faire entendre notre opinion, on sent qu’ils vont nous ignorer jusqu’à ce qu’on puisse le faire. Mais il va sûrement être trop tard et là, on n’aura pas le choix de s’adapter à ce qu’on nous aura laissé », avance-t-elle.

Des adultes fiers
Selon la jeune Amélie, beaucoup de parents aussi sont émus de voir leurs enfants se révolter : « Mes parents et ceux de mes amis sont contents de voir qu’on veut changer les choses et qu’on dénonce l’inaction ouvertement. Peut-être qu’ils pensent aussi qu’on est un peu naïfs, mais peut-être que ça va inspirer d’autres personnes à changer leurs habitudes de consommation. »

Mme Brazeau, une enseignante dans une école secondaire de la Montérégie, se montre fière de ses élèves : « Lorsque mes élèves m’ont parlé du thème de leur examen, des textes et de la question, ils étaient en colère. Ça me rend heureuse de voir qu’ils n’acceptent pas ça et annoncent en grand qu’ils sont beaucoup plus allumés à la question que ce qu’on semble croire. »

De son côté, le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge dit aussi se réjouir de la réaction des élèves. « Drôle de question, en effet. À mon avis, on aurait dû demander comment lutter contre les changements climatiques, et non s’il était possible de s’y adapter, a-t-il commenté. Je suis fier que la jeunesse soit aussi sensibilisée et mobilisée sur cet enjeu. »

Ce n’est évidemment pas lui qui a formulé la question de l’examen, mais son ministère, et il soutient que ça n’a rien à voir avec la politique de son gouvernement.