Carey Price et la santé mentale

Le gardien de but du Canadien de Montréal, Carey Price, est absent du club parce qu’il a intégré le programme d’aide aux joueurs de la Ligue nationale de hockey. Il serait question de santé mentale, selon la femme du joueur étoile. Le journal Les Versants discute du sujet avec deux jeunes cerbères de la région, Tristan Côté-Cazenave et Victoria Rose-Grisé.

Que pensez-vous de la décision de Carey Price?

Tristan Côté-Cazenave : Cette nouvelle m’a bouleversé. Voir un joueur de la trempe de Carey, qui a toujours l’air en possession de ses moyens, demander de l’aide comme il l’a fait est une chose que l’on n’est pas habitué de voir dans le milieu sportif. Cependant, cette nouvelle vient ajouter un poids de plus dans la sensibilisation aux problèmes de santé mentale de tout type. Ce n’est pas parce qu’il est le meilleur gardien de but au monde qu’il est à l’abri de ces problèmes. Je lève mon chapeau à Carey, qui a su trouver le courage afin de demander de l’aide. Même avec tous les efforts mis en place dans les dernières années afin de sensibiliser la population, la santé mentale reste un sujet tabou dans le milieu du hockey.

Victoria Rose-Grisé : J’ai trouvé cela dommage, mais dans un sens, je n’étais pas surprise. Dans le monde du hockey, il y a toujours eu beaucoup de pression sur les gardiens. Dans une ville comme Montréal, où l’attraction principale est le hockey, c’est encore pire, surtout quand tu es le meilleur gardien au monde.

Que pensez-vous de ces athlètes qui lèvent un drapeau pour signaler que ça ne va pas bien, à la Carey Price, Jonathan Drouin, l’athlète olympique Simone Biles…?

T.C-C. : Je pense que ça prend un courage immense pour ces athlètes afin de se mettre à l’écart du jeu pour se soigner. Tous ces athlètes gagnent leur vie avec leur sport. Ils pratiquent et s’entraînent à l’année longue, donc, de dire qu’ils doivent prendre une pause afin de penser à leur santé en premier est un acte de courage immense qui, selon moi, aide grandement les plus jeunes à réaliser qu’il n’y a pas que le sport dans la vie. Cela permet aussi aux jeunes de réaliser qu’ils ne sont jamais seuls; il y a des gens qualifiés pour les aider et les soutenir dans ces moments difficiles.

« Ça prend un courage immense pour ces athlètes afin de se mettre à l’écart du jeu pour se soigner. » – Tristan Côté-Cazenave

V.R-G. : Il faut avoir beaucoup de courage, car beaucoup de personnes quittent en silence ou continuent de souffrir de cette pression toxique jusqu’à la fin de leur carrière. Je pense que c’est nécessaire que le monde du sport et les partisans sachent que ce n’est pas parce que tu es le meilleur de ta discipline ou que tu as l’air d’être en contrôle de la situation que tu ne souffres pas à l’intérieur. Nous ne voyons que les moments de performance de ces athlètes; c’est facile de les critiquer en ne voyant pas l’anxiété et la pression qu’ils peuvent subir.

Anxiété, dépression, pression… en tant que gardien de but, avez-vous vécu des périodes difficiles durant votre carrière?

T.C-C. : J’ai connu des moments plus difficiles dans mon parcours. Cependant, ces moments me permettent de faire une introspection de moi-même et ils m’amènent à découvrir de nouvelles choses que je n’aurais pas réaliser sans ces bas. J’ai appris que mon entourage peut jouer un rôle énorme afin de m’aider à passer au travers de ces moments plus difficiles.

V.R-G. : Oui, et je pense qu’il faut plus en parler, car c’est souvent vu comme un sujet tabou. Beaucoup d’athlètes passent par ces moments et pensent qu’ils sont seuls; ils ont parfois honte, mais au contraire, ils sont loin d’être les seuls à vivre cela.

Un métier stressant, celui de gardien de but?

T.C-C. : Le poste de gardien de but en est un de pression, certes! Cependant, les joueurs subissent le même type de pression et parfois plus qu’un gardien de but. La seule différence, c’est lorsqu’un gardien fait une erreur, tout le monde la voit, car cela résulte souvent en un but. Mais lorsqu’un joueur fait une erreur, ça ne donne pas nécessairement un but. La pression affecte tous les joueurs d’une équipe de hockey et tous ces joueurs doivent y faire face à un moment ou l’autre durant leur carrière. L’important est de s’entourer de personnes qui vont te soutenir quoi qu’il arrive et de ne jamais oublier qu’il y a plus dans la vie que juste le hockey.

V.R-G. : Pour ma part, j’ai fait et je fais encore beaucoup d’anxiété de performance. Je suis une fille parmi beaucoup de gars dans un sport de niveau élite, donc, j’ai souvent l’impression que beaucoup de personnes en attendent plus de moi que de d’autres joueurs. Nous pouvons facilement passer de héros à zéro. Je pense que la première étape pour s’aider est de s’avouer à soi-même que nous avons besoin d’aide. Ensuite, il y a un tas de ressources pour nous aider; pour moi, la méditation, la visualisation, le yoga, un self talk positif, célébrer chaque petite victoire et avoir l’aide d’une préparatrice mentale chaque semaine, c’est ce qui m’aide le plus. Il y aussi plusieurs livres qui font réfléchir et qui donnent d’excellents trucs pour faire de l’anxiété son alliée.