Le voyage de La Chaumière

La Chaumière, connue des citoyens de Saint-Bruno-de-Montarville depuis 40 ans, a choisi de tourner la page. Le journal est allé à la rencontre de Guy Descarries et Sylvie Racine, les propriétaires, pour qu’ils nous racontent l’histoire de cette aventure. 

« L’heure de la retraite est arrivée! » Qui n’a pas eu la surprise de voir la pancarte affichée dans la vitrine de La Chaumière à Saint-Bruno-de-Montarville?

Tout a commencé en 1968, avec Rita Grisé, la mère de M. Descarries, « une pionnière » à l’époque, selon son fils. « Ma mère était artisane, potière, céramiste. Elle produisait pour la Centrale d’artisanat à Montréal. Comme elle avait une forte ambition commerciale, elle s’est dit pourquoi pas vendre ses produits soi-même. La première enseigne était située proche de l’église, dans une petite maison, d’où le nom » La Chaumière « . L’endroit a été détruit depuis pour faire place à une garderie », nous explique M. Descarries.

Les magasins déménagent à Saint-Bruno au fur et à mesure que la notoriété de l’enseigne grandit. La passion débordante de Rita pour son métier déteint sur son fils Guy. « C’est à ce moment que j’ai commencé à apprendre mon métier de joaillier avec un artisan tchécoslovaque à Montréal. Il avait une boutique dans le Vieux-Montréal et on travaillait dans l’atelier. J’avais 19 ans. »

C’est dans ces ateliers qu’il rencontrera sa conjointe, Sylvie Racine, et les deux ne se quitteront plus. « Ma sœur travaillait avec son patron. Moi, j’avais fait deux jours à La Ronde dans un stand à hot-dogs. La bijouterie cherchait une vendeuse et j’ai eu le poste. Nous étions tous les deux de Saint-Bruno, mais je l’ai rencontré à la boutique à Montréal alors que j’avais 17 ans », se rappelle Mme Racine. 

Retour à Saint-Bruno 

Guy et Sylvie ouvrent une boutique à Montréal et débutent, en couple, une vie d’entrepreneurs. La santé fragile de Rita oblige le couple à prendre une décision qui donnera un avenir à La Chaumière. « Ma mère nous a demandé de reprendre le magasin pour l’aider dans la boutique, alors on a accepté. Ça a changé notre vie. Nous avons laissé notre boutique à Montréal pour venir nous installer à Saint-Bruno. J’ai commencé par faire des bijoux sur commande », se souvient Guy.

En 1997, l’enseigne, alors située en face du Provigo, déménage dans le bâtiment actuel de la rue Montarville alors en vente.  Depuis des années, des planches de bois barricadaient les entrées, signalant l’absence d’une quelconque activité. « Nous voulions une enseigne qui avait pignon sur rue. Nous avons pris le risque d’acheter l’immeuble alors qu’il n’y avait aucune activité depuis longtemps, pour implanter La Chaumière. Après notre première année, nous avons été surpris de déjà doubler notre chiffre d’affaires.  »

L’Asie

Il faut dire qu’il fallait voir plus grand que le magasin qui était alors en face du Provigo pendant huit ans. Un voyage en Asie, en 1992, affinera l’identité du magasin, pris en main par le couple depuis 40 ans aujourd’hui. « Leur manière unique de faire des bijoux nous a impressionnés, et même leur manière de faire sur un plan artisanal. On a commencé l’importation tranquillement et on s’est rendu compte qu’ils avaient un savoir-faire pour à peu près tout dans le monde de l’artisanat, du tissu aux sculptures. On a fini par importer à peu près tout par conteneurs. Comme nous avions beaucoup de marchandises, je devais vendre à des boutiques en gros. »

Chaque année, le couple passait de six à huit semaines en Asie pour faire des achats et organiser leur rapatriement en conteneurs à Saint-Bruno. Le dernier voyage a été réalisé en 2017, deux ans avant la pandémie de COVID-19 qui a été l’épreuve la plus difficile à traverser. 

La vente 

Après leur dernier voyage en Asie, l’idée de la retraite a commencé à faire son chemin. « Le moment le plus difficile a été celui de la pandémie. On devait s’arranger pour vendre le commerce avant, et ça nous est tombé dessus. Manque d’employés, de clients, des chiffres d’affaires qui baissent, c’était pas le moment de vendre. » Alors le couple est passé à travers avant de prendre la décision de vendre l’immeuble abritant La Chaumière, « en novembre 2024 », précise Mme Racine.

« Je voulais avoir une suite à La Chaumière, mais parfois, il y a l’âge qui nous rattrape. Il fallait que j’arrête de travailler un peu », explique M. Descarries.

L’enseigne, qui a employé jusqu’à 15 salariés en période d’achalandage, devrait officiellement signer la vente le 19 juin. « Il ne doit plus rien rester dans le magasin le 30 juin. » Le nom de l’enseigne reste en place, comme le site de vente en ligne, mais après avoir remis les clés du bâtiment au nouveau propriétaire, ils s’obligent une chose. « Ne rien faire pendant quelques mois. On ira au chalet. On restera sûrement une boutique en ligne un certain temps, mais même le site sera fermé cet été. On va rouvrir le site peut-être en octobre. »

En cette période de liquidation, c’est une vague d’amour que reçoivent les propriétaires de la part de leurs clients. « On a toujours eu une belle clientèle fidèle qui nous a suivis. On s’en aperçoit maintenant. Ça déborde depuis que l’on a annoncé la fermeture. Beaucoup de gens sont déçus, mais beaucoup comprennent notre décision. La boutique va nous manquer, c’est certain, mais nous avons tellement de projets qui attendent », de conclure le couple.