Des nouvelles de Vincent Lagrange
Un Montarvillois en Chine
Un mois après une première communication avec Vincent Lagrange, un Montarvillois en Chine, le journal Les Versants est allé aux nouvelles avec l’enseignant.
Propos recueillis par Frank Jr Rodi
Quelle est votre situation des dernières semaines?
Rien n’a changé. J’enseigne toujours mes cours en ligne à partir de mon appartement. Nous avons complété la troisième étape entièrement avec les cours en ligne et les bulletins ont été remis aux élèves du secondaire. Nous venons d’entamer la quatrième et dernière étape! Je porte un masque quand je sors. Je me lave les mains régulièrement. Les commerces ouvrent peu à peu, mais plusieurs demeurent encore fermés. Les gens retournent au travail graduellement, mais les points de contrôle sont partout.
« Je suis stupéfait par la facilité et la vitesse à laquelle le virus a conquis tous les continents. » -Vincent Lagrange
Êtes-vous toujours confiné à l’intérieur?
Oui, mais je commence à sortir prudemment. Les gens ont repris confiance. Le nombre de cas actifs de coronavirus est en pente descendante. Il n’en reste plus que 3500 sur une population de 1,437 milliard d’habitants en date du 30 mars 2020. C’est donc très peu. La Chine est en train de gagner la bataille. Dans ma ville, à Qingdao, il n’y a plus aucun cas recensé. Nous avons atteint le zéro.
Le retour en classe est prévu pour quand?
Hong Kong a annoncé que le retour en classe était prévu pour le 20 avril 2020 sur son territoire. J’estime que la Chine continentale fera de même dans ces eaux-là. Au total, nous aurons connu un confinement d’une durée d’environ quatre mois.
Que retenez-vous de cette expérience?
J’ai vécu une gamme d’émotions. Au début, c’était la surprise. Ensuite, la peur. Puis un retour au calme. Maintenant, un regain de confiance. Pour la suite des choses, l’espoir.
Comment passez-vous le temps à l’intérieur?
Je suis toujours au travail. Ce ne sont pas des vacances, loin de là! L’enseignement en ligne, c’est à temps plein. Je dois élaborer une planification hebdomadaire, préparer mes cours, faire des recherches, téléverser les documents sur le réseau, répondre aux courriels de mes élèves, corriger les travaux, rentrer les notes dans le système… Dans mes temps libres, je cultive mon esprit avec le trio films, podcasts et guitare. Je communique aussi constamment avec ma famille et des amis par Facebook et Skype.
Maintenant, le Québec et le Canada font face à ce que la Chine a vécu il y a quelques mois; en tant que Québécois, votre réaction?
J’ai peine à y croire. Je suis stupéfait par la facilité et la vitesse à laquelle le virus a conquis tous les continents et a rejoint ma province natale. C’est sidérant.
Quels conseils donneriez-vous aux Québécois afin de passer à travers cette crise?
Il faut respecter les consignes du gouvernement. Restez chez vous, appliquez la distanciation sociale et lavez-vous les mains. Cela risque de durer un bon bout de temps, donc il faut s’armer de patience. Enfin, rappelez-vous que la vie vaut plus que l’argent.
Quelle est l’importance de rester en confinement à la maison pendant la crise?
Il n’y a pas de remède ni de vaccin. C’est la seule solution pour stopper la propagation et endiguer le virus.
Pour reprendre l’école au Québec, que pensez-vous des cours à distance?
Cela fonctionne très bien. Je suggère même que le Québec offre des cours en ligne comme une option alternative aux élèves du secondaire en tout temps. Cela demande beaucoup d’autonomie de la part de mes élèves, mais à part quelques cas, ils réussissent tous très bien.
Votre réflexion sur ce qui se passe actuellement?
L’homme prend conscience de sa vulnérabilité et de sa place dans l’univers. C’est une leçon d’humilité. Ironiquement, l’humanité presque entière met de côté ses différends et s’unit en tant qu’espèce pour assurer sa préservation. Les partis politiques du Québec ont arrêté leurs sempiternelles accusations partisanes et adoptent maintenant un ton beaucoup plus posé et serein. Le secrétaire général des Nations- Unies a appelé à un cessez-le-feu global pour s’unir contre un ennemi commun, le coronavirus. Le monde tourne au ralenti, mais soyons francs, il tournait trop vite de toute manière. Les usines produisent moins. Il y a moins de trafic sur les autoroutes. Il y a moins d’avions dans les airs. Il en résulte une baisse marquée de la pollution atmosphérique. Cela est particulièrement perceptible en Chine. Le coronavirus force une forme de décroissance et prouve que le système dans lequel nous vivons est fragile et qu’il doit être refondé sur de nouvelles assises.
Les gens apprendront-ils de cette pandémie?
Je nous le souhaite ardemment. Il est clair que globalement nous ne sommes pas préparés pour affronter une pandémie d’une telle ampleur. La prochaine pourrait être encore plus tragique. Il faut qu’un plan d’urgence soit élaboré à titre préventif. La Chine a déjà annoncé que la consommation et la commercialisation d’animaux exotiques étaient dorénavant sévèrement interdites. Rappelons que l’origine du virus se trouve dans un marché de fruits de mer et d’animaux exotiques vivants destinés à la consommation humaine et que le coronavirus aurait vraisemblablement été transmis d’un animal à un humain. L’humanité n’est pas à l’abri d’une prochaine pandémie et des moyens doivent être pris en amont pour réduire les risques.
Aimeriez-vous rentrer à la maison, au Québec?
Pas pour l’instant. Je travaille ici et je me sens en sécurité aussi.
QUESTION AUX LECTEURS :
Avez-vous de la famille dans des pays durement touchés par la COVID-19?