Qu’est-il advenu de la Boutique Presque Neuf?
À tous ceux qui se posent des questions
Il y a bientôt un an, la Boutique Presque Neuf fermait ses portes. Cet événement a suscité du mécontentement auprès de plusieurs citoyens et fait partir la machine à rumeurs. Question d’éclairer ceux qui s’interrogent face à cette situation, le journal Les Versants a rencontré d’anciennes bénévoles, qui souhaitent rester anonymes, et Stéphanie Constantin, la dernière directrice de l’organisme.
Un texte de Claire Duval et Oriane Wion
Tout d’abord, rappelons que la Boutique Presque Neuf, qui aurait 40 ans aujourd’hui, était un comptoir de vêtements usagés venant en aide aux familles montarvilloises démunies ainsi qu’à certains organismes à but non lucratif de la ville dans le financement de leurs activités. Elle était l’initiative de Carlotta Ménard, décédée en octobre 2010.
« Quand je suis allée aux funérailles de Mme Ménard, les bénévoles étaient découragés, la boutique était pour fermer. Tout le monde m’a dit qu’ils étaient restés pour elle et qu’ils n’avaient plus l’énergie de reprendre l’affaire, de raconter Stéphanie Constantin, alors nouvelle bénévole à l’organisme. Après avoir fait un sondage, une quinzaine de personnes m’ont dit être prêtes à poursuivre la mission de la boutique si je reprenais le flambeau. Ce que j’ai fait, avec mon conjoint. »
Le début de la fin
Comme à l’habitude, la Boutique Presque Neuf a fermé ses portes pour le temps des Fêtes cette année-là aussi. Au retour, en janvier, les locaux avaient été entièrement nettoyés, repeints et réaménagés par la nouvelle directrice.
C’est là que les choses se compliquent. Selon les bénévoles rencontrées, Mme Constantin leur aurait dit qu’il n’y avait pas d’ouvrage pour elles, après que celles-ci aient offert leur service; ce qui fut un gros choc pour ces femmes et toute l’ancienne équipe, dont certains membres oeuvraient à la boutique depuis 10, 20, 30 ans. Cependant, pour Mme Constantin, les choses se sont passées autrement. « Peu de temps après la réouverture des locaux, rares étaient les bénévoles qui venaient donner de leur temps, pour des raisons personnelles à chacun, que je respecte. Toutefois, comme j’avais besoin de gens pour faire rouler la boutique, j’ai recruté de nouvelles bénévoles, plus jeunes et plus rapides à la tâche. C’est pourquoi il est arrivé des moments où les anciennes se sont présentées et que je n’avais pas de travail à leur faire faire », de préciser Mme Constantin.
Le manque de bénévoles pouvant venir en dehors des heures d’ouverture et le constat d’abus dont ont fait preuve certains citoyens, pourtant en moyens financiers, ont tôt fait de décourager la directrice. « Quand j’ai vu que les anciennes bénévoles ne revenaient plus, j’ai placé une affiche dans la vitrine du magasin pour en recruter de nouveaux, mais il n’y en a pas beaucoup qui sont venus me rencontrer. »
C’est après avoir donné 40 heures par semaine, pendant des mois, en plus de son travail à temps plein, et effectué de grands changements (plus d’heures d’ouverture, entre autres) que Mme Constantin décide donc de fermer; on est au mois de mars. La Boutique Presque Neuf aura alors bénéficié de six mois de vie supplémentaires.
Les livres
Un mois plus tard, les bénévoles de la première heure tentent d’avoir rendez-vous avec la comptable et la nouvelle administration afin de trouver réponse à leurs interrogations; réunion qui n’a eu lieu qu’en juin. À un moment donné, les femmes auraient réclamé de voir les livres de comptabilité, ce qui leur aurait été refusé.
« La raison pour laquelle une des bénévoles a demandé à voir les livres est, selon moi, parce qu’elle pensait que j’avais volé. Aucun bénévole n’a fait une demande semblable en 40 ans, alors pourquoi aujourd’hui? D’autant plus que depuis janvier, l’organisation n’était plus entre les mains des anciennes bénévoles, mais dans les miennes », de mentionner Mme Constantin.
Les profits réalisés au cours de 2011, totalisant environ 12 000 $, ont été attribués à neuf organismes de Saint-Bruno, ainsi qu’à Enfant-Retour Québec, aux fondations de l’Hôpital de Montréal pour enfants et de l’Hôpital Sainte Justine. Les vêtements ont, quant à eux, été donnés à l’église Saint-Gabriel, dans le quartier Pointe-Saint-Charles à Montréal.
Les personnes rencontrées par Les Versants avouent regretter beaucoup cette fermeture pour la communauté montarvilloise et que ce ne serait pas elles qui auraient laissé tomber les clients. «C’était enrichissant. Nous avions la satisfaction de rendre service, avouent-elles. La Boutique Presque Neuf, c’était une institution de Saint-Bruno, un organisme nécessaire qui n’aurait pas dû disparaître. Il y aurait eu moyen de la sauver si des décisions précipitées n’avaient pas été prises.»
Pour sa part, Stéphanie Constantin conclut : « Je n’avais aucunement l’intention de reprendre les choses en main pour fermer la boutique. Je voulais que ça fonctionne.»