Les premiers volontaires se souviennent…

De Saint-Bruno à Minta

La date du 25 décembre 1975 a marqué la vie de six jeunes étudiants, alors que ceux-ci prenaient pour la première fois l’avion en direction de Minta, un village du Cameroun en Afrique. Accompagnés de sœur Thérèse Lemay, ils ont été les premiers et les derniers volontaires, envoyés par l’organisme Minta Saint-Bruno, à s’être présentés dans ce petit coin du monde. Le journal Les Versants a eu la chance d’assister aux retrouvailles de quatre d’entre eux.

Assis autour d’une table, Manon Mandeville, Ann Dubé, Kenny Minogue, Richard Bégin, sœur Thérèse Lemay, et René Didier, cofondateur de Minta, se sont rappelé de beaux souvenirs, ce qui a laissé place à plusieurs fous rires.

L’expérience Minta a débuté pour ces jeunes à l’été 1973. Pendant un an et demi, ils se sont préparés à leur premier voyage de découvertes africaines, en compagnie de sœur Thérèse Lemay, qui était alors agente de pastorale à la paroisse Saint-Bruno. « Comme Internet n’existait pas à ce temps-là, c’est dans les livres et les récits que M. Didier nous racontait que nous nous sommes préparés. Ce n’était pas du concret. On ne savait pas vraiment dans quoi on s’embarquait. Ç’a été tout un choc! », se souvient Ann Dubé, âgée de 17 ans à l’époque.

« Du côté des organisateurs, le but du voyage était de créer des relations directes et  humaines entre deux cultures, deux communautés totalement différentes, d’expliquer René Didier. Le projet Minta était existant depuis quelques années, mais le concept restait abstrait. Avec l’abbé Lucien Foucreault, nous avions alors décidé d’envoyer de jeunes volontaires qui découvriraient ce que sont les véritables pauvreté et souffrance. »

Avant leur départ, les jeunes ont organisé plusieurs campagnes de financement, parce que, faut-il le mentionner, en 1975, un billet d’avion aller-retour pour le Cameroun coûtait 740 $! Ce qui représentait toute une somme.

L’aventure commence

C’est alors que le jour fatidique arriva, le 25 décembre 1975. Après 26 heures de vol, l’équipe arrive à Yaoundé, capitale politique du Cameroun. En 17 jours, ils visiteront une vingtaine de villages, dans lesquels ils découvrent les travaux réalisés grâce aux dons envoyés chaque année par Minta, depuis déjà 5 ans : puits d’eau potable, transport du café, des fagots de bois par les ânes, et autres.

Malgré toute la pauvreté à laquelle ils étaient confrontés, les six jeunes sont restés très marqués par le sourire, la joie de vivre et la générosité des Camerounais. « Les gens étaient très accueillants. Dans chaque village, ils nous recevaient avec des chants et des danses, et nous offraient des cadeaux. C’était impressionnant de voir leur sens de la communauté, de l’entraide », se rappelle M. Minogue qui, avec les deux autres garçons, profitait du voyage pour filmer, lui qui étudiait en cinéma au cégep. Durant leur séjour, certains d’entre eux ont participé à une chasse aux singes, à la construction d’un pont, à la cueillette d’ananas et de café, notamment.

« Il y a plusieurs villages dans lesquels nous étions les premiers » blancs » à mettre les pieds là, se souvient Richard. Ils étaient très impressionnés de nous voir. »

Petite anecdote de Mme Mandeville : « À l’époque, je portais des broches dentaires. Et quand j’ouvrais la bouche, les jeunes se roulaient par terre tellement ils riaient. Je me souviens aussi qu’il ne fallait pas allumer nos lampes de poche devant eux parce qu’ils ne comprenaient pas le phénomène de la lumière. À la limite, ils pouvaient penser que c’était de la sorcellerie! »

Qui dit nouveau pays, dit aussi nouvelle alimentation! En effet, les aventuriers ont eu l’occasion de gouter des mets très locaux : du poulet « entier », du singe, du toucan, mais aussi beaucoup de zébu.

L’après-Minta

Un an après, Mme Mandeville est retournée à Minta avec sa famille.

De son côté, Kenny Minogue a gardé de précieux souvenirs de son voyage : lettres échangées, billets d’avion, photos, rapports de réunions préparatoires, photo de passeport, entre autres.

Et encore aujourd’hui, ils sont unanimes : ils sont revenus marqués, transformés de leur voyage. « Je me rappelle être assise un jour dans le salon et m’être dit que ça n’avait pas de sens, que l’on avait trop d’argent, que l’on était trop riches, que l’on avait trop de choses, de nourriture, trop de tout. Tout à coup, je ressentais une honte de vivre ainsi. J’avais un sentiment de malaise, avoue Mme Dubé. Par la suite, j’ai décidé de prendre le positif de cette expérience et de continuer à faire du bénévolat près de chez moi. »

Les quatre amis retrouvés invitent bien entendu les jeunes à s’impliquer bénévolement. Qui sait, y aura-t-il un prochain groupe qui se rendra à Minta…?