« Les dessins de mes enfants me manqueront » – Le dentiste Maurice Tapiero

Incendie à Saint-Bruno-de-Montarville

L’entrevue du journal en compagnie du dentiste Maurice Tapiero est constamment interrompue par des gens abordant l’homme qui vient de perdre son cabinet de dentistes. Vingt-sept ans de travail ont disparu en l’espace de quelques minutes, une vingtaine d’employés et plus de 6 000 patients se questionnent maintenant sur la suite des choses.

Un automobiliste s’arrête près de nous et, le pouce en l’air, lui dit : « Maurice, bon courage! » Un autre citoyen, cette fois à vélo, s’arrête en lui demandant ce qui va arriver. Le père de famille de cinq enfants reçoit aussi une panoplie d’appels téléphoniques, auxquels il doit couper court, prétextant qu’il discute avec un jeune homme. Visiblement, il est reconnu à Saint-Bruno-de-Montarville et la communauté le lui fait sentir. « Tu sais ce qui est fort de cette catastrophe? Tout ça! Toute cette énergie, cette solidarité qui en découle, c’est palpable. Les gens se rassemblent, s’entraident, comme une grande famille », lance le dentiste Maurice Tapiero, qui promet qu’une nouvelle clinique sera rapidement construite sur un terrain acquis il y a cinq ans sur le chemin De La Rabastalière.

Le 5 octobre, monsieur Tapiero accompagne sa fille au football à 8 h. À leur retour à la maison, il se rend dans une pâtisserie pour apporter des viennoiseries au déjeuner. Il téléphone à la maison pour dire à sa famille de les attendre, qu’il arrivait avec le déjeuner. « Mon fils a répondu et m’a dit que maman était déjà partie pour la clinique parce qu’il y avait un feu. Nous habitons à Montréal. J’ai quitté la pâtisserie et je suis venu ici. Ma femme était là avec des patients, des voisins. C’était irréel. Une minute, tu es au foot, et l’autre, tu vois ton bureau qui s’envole », raconte monsieur Tapiero, pour qui cette vision est un choc. « L’humain n’est pas habitué à des trucs comme ça. Du coup, tu te retrouves complètement démuni. Tu ne peux rien arrêter et moi, je m’engueulais avec les policiers parce qu’ils ne voulaient pas me laisser passer. Tout le monde est venu me voir; les émotions étaient fortes. »

Celui-ci sort de son manteau deux cartes d’identité carbonisées et aux coins racornis. Deux documents, dont sa carte d’assurance-maladie. Elles étaient dans son bureau et sont passées à travers le plafond pour se retrouver sur le plancher de la Tabagie Saint-Bruno.

À un moment durant la conversation, un autre homme vient s’entretenir avec le dentiste, pleure en le serrant dans ses bras, lui offre son aide pour quoi que ce soit. Il s’agit de Richard Denis, l’un des trois frères propriétaires de la bâtisse. Celui-ci est trop fragile pour parler aux journaux. « Désolé, c’est trop tôt. J’aime mieux pas. C’est le choc. »

Maurice Tapiero reprend, après que le journal lui a demandé ce qui va lui manquer le plus : « Ce n’est pas l’équipement. C’est du matériel et ça se remplace. Ce sont plutôt les dessins de mes enfants accrochés au mur de mon bureau, sa collection de personnages et les cadeaux offerts par mes patients. Comment tu peux remplacer ça? »

Mentionnons que la Clinique dentaire Tapiero, Bouhadana & Associés est déménagée temporairement au Centre orthodontique Saint-Bruno, Dr Di Battista, situé au 100, rue Landsdowne.