La leçon sur l’ONU et le conflit au Rwanda
École secondaire du Mont-Bruno
Ils sont près de 75 étudiants de 5e secondaire à l’École du Mont-Bruno à recevoir la leçon sur le fonctionnement de l’ONU et sur le génocide du Rwanda, donnée par M. Jean-Guy Plante, major à la retraite et citoyen de Saint-Bruno-de-Montarville. Il est venu leur faire part de son expérience comme témoin privilégié de cette guerre interne, qui a suscité des atrocités « auxquelles on ne s’habitue jamais, même en les voyant jour après jour », dira le conférencier aux étudiants dont le regard est avide de connaître. En ce mercredi 6 juin, M. Plante présente : « La faillite de l’humanité envers le Rwanda ».
Le professeur d’histoire, Éric Vanier, a invité Jean-Guy Plante pour parler à ses élèves du conflit de 1994, au Rwanda, à l’intérieur du cours « Le monde contemporain », qui étudie les conflits actuels sur la planète. Afin que les étudiants comprennent la raison de la non-intervention de l’ONU en ce pays, M. Plante choisit, d’entrée de jeu, d’en expliquer le fonctionnement et plus particulièrement celui de son Conseil de sécurité formé de cinq pays : les États-Unis, l’Angleterre, la France, la Russie et la Chine. Ce Conseil prend toutes les décisions concernant l’envoi des Casques bleus dans les zones de conflits. Il précise que chacun de ces pays prend les décisions en fonction de ses intérêts personnels. « Important à retenir, dira-t-il aux étudiants, pour comprendre la suite des choses. » Si l’un des pays n’est pas d’accord sur une intervention proposée, parce qu’elle ne répond pas à ses intérêts, il exerce son droit de veto, et rien ne se fait.
Ces explications données, le conférencier demande à l’auditoire pour quelle raison l’aide militaire n’a pas été accordée au Rwanda. Une étudiante répond que c’est parce que le pays n’a pas de ressources naturelles, comme du pétrole. Il répond que ceci est la deuxième raison, mais que la principale est le veto mis par les États-Unis. Voici la cause : l’année précédente, ce pays avait envoyé des militaires en Somalie pour distribuer de l’aide alimentaire. Deux hélicoptères se sont fait descendre, tuant 15 à 18 militaires dont les cadavres ont été traînés à travers la ville et d’autres soldats ont aussi été tués. Après cette mauvaise expérience, le président Bill Clinton et Madeleine Albright décident que plus jamais ils n’enverraient des militaires en Afrique. « Ceci fait comprendre pourquoi malgré les demandes persistantes du général Roméo Dallaire, rien n’a été fait. Nous étions seulement 285 militaires, dont neuf Canadiens », révèle Jean-Guy Plante. Le principe illustre aussi la non-intervention militaire de l’ONU en Syrie actuellement. « La Russie a mis son droit de veto, à cause des armes qu’elle y vend », explique le conférencier.
Le génocide du Rwanda
Jean-Guy Plante qui a été le porte-parole de l’ONU au Rwanda et l’attaché de presse du général Dallaire explique aux étudiants ce conflit qui prend son origine dans les Accords d’Arusha. Les Hutus qui représentaient 20 % de la population occupaient le pouvoir et selon ces Accords, ils devaient intégrer des Tutsis dans le gouvernement, la fonction publique et l’armée. Ceci ne faisait pas l’affaire des Hutus radicaux. Le 6 avril 1994, l’avion du président Juvenal Habryarimana, un Hutu modéré, est descendu et il décède. « L’assassinat du président a été perpétré par les membres radicaux des Hutus, non contents de devoir céder du pouvoir aux Tutsis. Ils font croire que cet assassinat est l’œuvre des Tutsis. » Le conférencier précise que cette version n’est pas officielle, mais largement reconnue. Pour supposément se venger, dans les heures qui suivent le décès, les Hutus montent des barrages routiers dans le but d’éliminer tous les Tutsis. Ainsi commence le génocide. Il ajoute que nombre de Hutus modérés, dont la première ministre, madame Agathe, et ses gardes sont assassinés.
Ce génocide de 100 jours, sur fond de guerre civile, aura fait 800 000 morts. « Je voyais des scènes de massacre et d’horreur du matin au soir, dans les rues, les écoles, les églises. Ils n’avaient aucune pitié, tuant femmes, enfants, vieillards », confie-t-il, encore imprégné par la douleur de ces atrocités. Comme porte-parole des Nations Unies, M. Plante recevait tous les jours de 15 à 20 journalistes de partout à travers le monde et il était responsable de les véhiculer sur le terrain et de leur sécurité.
Finalement, l’armée du Front patriotique rwandais (les rebelles tutsis) sous la direction du général Paul Kagamé, marche sur Kigali et chasse les Hutus du pouvoir. « Le général Kagamé sera plus tard élu à la présidence et il l’occupe toujours après trois élections. », précise M. Plante. Il révèle aux étudiants que lors du tournage du film sur ce génocide, J’ai serré la main du diable, en 2006, il est retourné au Rwanda comme conseiller technique. Il a constaté avec bonheur que ce pays « aux mille collines », qu’il aime tant, ainsi que ses habitants, était reconstruit. Il affirme que c’est en grande partie l’œuvre du président Kagamé et de son gouvernement.
Jean-Guy Plante est originaire de l’Abitibi, il est entré dans les Forces armées à l’âge de 17 ans et s’est orienté du côté de la police militaire. Son travail l’a amené un peu partout à travers le monde. À sa retraite, en 1995, il a été engagé par les Nations Unies, comme civil, et a été envoyé en Afrique pour une période de 12 ans. Dans toute sa carrière, il aura en tout passé 14 ans en Afrique.
Les étudiants ont manifesté beaucoup d’intérêt pour la politique internationale, posant des questions intelligentes et pertinentes, révèle M. Plante. Le questionnant après la conférence, deux étudiants ont démontré de l’intérêt pour la vie militaire et particulièrement pour le travail des Casques bleus.