La famille Lambert: le commerce au détail depuis quatre générations

« Ah, Monsieur Bruno Lambert, comme je suis contente de vous voir, vous m’avez toujours tellement aidée à trouver ce que je voulais quand j’allais à votre magasin. » Ainsi s’exprime une dame âgée croisée par hasard au Manoir Saint-Bruno, ce qui en dit long sur un aspect de la qualité du service des Marchés Lambert. C’est d’ailleurs au Manoir qu’a lieu notre rencontre avec Bruno, de Saint-Bruno, ainsi qu’avec son père Gérald Lambert, qui, à Saint-Basile-le-Grand, a été le premier épicier à adhérer à la bannière IGA au Québec. Une famille de commerçants depuis quatre générations.

(avec la collaboration de la Société d’histoire de Saint-Basile-le-Grand – 1re partie)

Gérald Lambert et son frère Yvan ont fondé « Les Marchés Lambert et frères ». Cependant, ils ne sont pas issus de la première génération de leur lignée à tenir commerce à Saint-Basile, mais bien de la troisième, comme le révèle l’ouvrage de Bruno Labrosse sur cette famille, intitulé Une page d’histoire, source importante de renseignements historiques contenus dans cet article. L’histoire de la famille Lambert à Saint-Basile-le-Grand a débuté quand Augustin Lambert, né en 1807 à Saint-Mathieu-de-Beloeil, vient s’y établir après son mariage avec Marie Adèle Préfontaine dit Fournier, en 1829. Il s’installe dans la paroisse voisine de Saint-Joseph de Chambly, aujourd’hui Saint-Basile, et il y achètera trois terres. Le couple aura cinq enfants, dont Aimé, qui sera le premier Lambert à tenir un magasin au détail dans cette municipalité.

Aimé Lambert

Seul fils de la fratrie, Aimé naît le 28 novembre 1845, dans la paroisse de Saint-Bruno, sur le territoire qui deviendra Saint-Basile. Après ses études à l’école primaire du rang des Vingt-Quatre, il fréquente le Collège de Chambly. Aimé suit tout d’abord les traces de son père comme agriculteur. Et, tout comme lui, il s’intéresse au développement du territoire de la municipalité. Il signera une requête pour l’érection d’une paroisse dans la seigneurie de Jacobs (Saint-Basile). En 1867, il épouse Victorine Laporte, qui décédera six ans plus tard à la suite de son troisième accouchement. La même année, il convole en secondes noces avec Ernestine Tremblay et ils auront onze enfants.

Le cœur du village s’organise autour de la nouvelle église, car la paroisse a été créée en 1870. Voilà un endroit propice pour y installer un commerce! Sur le chemin de la Reine (rue Principale), à l’angle de la montée du Bord de l’eau (montée Robert), Aimé achète une partie de terre, située de biais avec le terrain où se trouve aujourd’hui une boutique de fleuristerie. Il y construira une maison en briques avec un magasin général attenant.

Il s’associe, en 1879, à trois autres résidants pour construire un aqueduc qui fournira l’eau potable au Village. Il siège aussi au conseil d’administration de la beurrerie-fromagerie de Saint-Basile et « lors des recensements de 1881 et 1891, il compile les données à titre de secrétaire de la municipalité », mentionne M. Labrosse. Au printemps de 1891, un incendie détruit sa maison et son magasin général. Il reconstruit rapidement, son épouse étant enceinte. Elle décédera en 1904. Trois ans plus tard, il se marie en troisièmes noces avec Marie Oudma Viau, mais ils n’auront pas d’enfants. En 1913, Aimé Lambert demande à son fils Roméo de la seconder dans l’entreprise. Le premier propriétaire du magasin général décédera à son domicile, en 1921.

Roméo Lambert

Roméo Lambert fréquente l’école primaire du rang des Vingt-Quatre. Il ira par la suite faire son cours classique au Collège de Marieville. Tout comme son père, il est secrétaire-trésorier de la municipalité, poste qu’il occupera jusqu’en 1941. En 1917, il épouse Albina Lafrance. De leur union naîtront huit enfants, dont six survivront. Parmi eux, mentionnons les deux seuls fils, Gérald et Yvan, qui formeront la troisième génération dans le commerce familial. Pour ces parents, l’éducation est très importante et, ce qui est peu commun à l’époque, tant pour les filles que pour les garçons. Jusqu’à leur mariage, les filles travailleront à la première Banque provinciale du Canada, sous la supervision de leur père. En 1932, un important incendie ravage la beurrerie-fromagerie et la salle du conseil municipal, emportant dans les flammes les précieuses archives municipales sous les yeux impuissants du secrétaire-trésorier.

Roméo s’approvisionne auprès des cultivateurs des environs. Pour ce qui est des sacs de farine et de sucre, des clous, des barils de mélasse et du charbon, ces marchandises sont livrées par train. À partir des années 1940, ses fils, Gérald et Yvan, vont les chercher à la gare. La fin des années 40 voit l’apparition des réfrigérateurs, les camions se chargent de plus en plus de la livraison, le clos de bois est abandonné de même que la balance pour la pesée des grains. Déjà se dessine la transformation du magasin général en épicerie.

La troisième génération : Gérald et Yvan

Mais il faudra attendre le début des années 1950, quand Gérald et Yvan prendront les commandes, pour concrétiser cette transformation. Dès 1953, les deux frères s’associent à l’entreprise et la même année, à la suite de l’adhésion de leur fournisseur Hudon et Orsali à la bannière IGA (Independant Grocerers Association), ils sont les premiers au Québec à faire de même comme marchand indépendant, précise Gérald, lors de l’entrevue. Pour améliorer l’offre comme épicerie, « j’ai décidé de suivre un cours sur les viandes à l’Institut national de la coupe de viande, à Montréal », se souvient-il.

En 1951, Gérald épouse Fernande Caillé, issue de la famille Caillé de Saint-Bruno-de-Montarville. De leur union naîtront cinq enfants, Lise, Nicole, Luc, Bruno et Pierre, qu’ils élèvent dans la belle et vieille résidence d’Aimé Lambert, rue Principale. (à suivre)

 

(Sources : Une page d’histoire, de Bruno Labrosse, Une page d’histoire… depuis 1873, par Les Marchés Lambert, Entrevue avec Gérald et Bruno Lambert)