Gérard Filion parmi les siens (Troisième partie)
Gérard Filion installe sa famille à Saint-Bruno-de-Montarville, en 1945. Elle compte déjà cinq enfants, et quatre autres verront le jour dans cette municipalité. Neuf enfants en tout : pas toujours facile! Il y a quand même eu beaucoup de plaisir dans la grande maison blanche du chemin De La Rabastalière. Les souvenirs de la vie familiale nous sont racontés par Pierre et Marcel Filion, lors d’une entrevue.
Au printemps de 1945, Gérard Filion vient à Saint-Bruno rencontrer Aldéric Caillé en compagnie de son épouse, Françoise Servêtre. En roulant sur le chemin De La Rabastalière, ils aperçoivent une grande maison blanche. Les deux frères Pierre et Marcel racontent. « Notre mère s’est exclamée : « Ces maisons-là ne sont jamais à vendre, mais c’est une comme celle-là que j’aimerais avoir! » » Le lendemain, monsieur Filion passe un coup de fil et, surprise, elle est à vendre! Il l’achète pour 11 500 $. C’est ainsi que le 3 mai 1945, monsieur et madame Filion, avec leurs cinq enfants, Nicole, Monique, Pierre, Jean et Marcel, s’installent au 211, chemin De La Rabastalière. Quatre autres enfants y naîtront : Marc-André, Louise, Michel et Claudine. « Numéro de téléphone : 33, avance Marcel. Ernest Dulude avait le numéro 1. Et il y avait en tout huit autos dans Saint-Bruno. Le matin, vers 8 h 30, sachant que notre père se rendait à Montréal, quelques personnes se rassemblaient devant la maison pour faire le trajet. » Et les souvenirs défilent.
Pierre raconte : « La terre des Dulude étant tout près, avec Pierre Dulude, j’ai appris à traire les vaches et à conduire un tracteur. » En façade, le terrain familial mesure 1000 pieds. À l’ouest de la maison se trouvent une piscine et un terrain de tennis. Un grand terrain de jeu où se rassemblera une partie des jeunes de la municipalité. « Il pouvait y avoir jusqu’à 35 personnes dans la piscine. Il fallait la vider et la nettoyer une fois par semaine! », se souviennent les deux frères.
En 1952-1953, leur père participe à la table ronde de l’émission Chacun son métier, animée par Fernand Séguin. Il y fait la connaissance de Jeannette Bertrand et Jean Lajeunesse, Roger Duhamel, Lise Roy, Jean Desprez, le père Ambroise et René Lévesque, journaliste à l’époque. Ces personnes et d’autres sont invitées à la maison et profitent du tennis ou de la piscine. Pierre se rappelle avoir joué au tennis avec René Lévesque.
À tour de rôle, les deux frères racontent : « Notre père n’était pas souvent à la maison, mais c’était un homme de famille. Son travail l’amenait à voyager beaucoup. Il est allé jusqu’en Inde, au Japon, en Russie, en Sibérie. » Marcel précise : « Il a été le premier journaliste à franchir le rideau de fer, après la Seconde Guerre mondiale. Ces voyages l’exilaient parfois pendant un ou deux mois et même plus. Notre mère était souvent inquiète, les communications n’étant pas ce qu’elles sont aujourd’hui. » Cependant, ils affirment : « Lorsqu’il était à la maison, il ne parlait pas de son travail. Il aimait jouer avec les enfants, se baigner et s’adonner au tennis. »
Était-il un père sévère? – « Il nous laissait libres, mais nous devions vivre avec les conséquences de nos actes. Quand nous nous chamaillions, si c’était entre garçons, il sortait les gants de boxe, et si c’était avec l’une de nos sœurs, il fallait l’embrasser. « Ouah! » » se souviennent-ils en rigolant.
La pêche et la chasse sont deux passions pour lui. Pierre se souvient qu’il l’accompagnait lorsqu’il cherchait un territoire de pêche. « Nous avons trouvé le bassin de la Manicouagan. Il a possédé un camp entre Manic 5 et Manic 2. Il y retournait chaque année avec quelques-uns d’entre nous. » Sur le mont Saint-Bruno, il a sa cabane à sucre. Marcel relate qu’il allait sur la montagne avec lui pour mettre des collets à lièvres et, la semaine suivante, ils allaient les relever.
Quand Gérard Filion devient maire de Saint-Bruno, en 1960, constatant le grand nombre de coups de téléphone qu’il reçoit des citoyens, par exemple : « M. Filion, j’ai de l’eau dans ma cave, venez voir », etc., il s’adjoint rapidement un directeur général. En riant, les frères racontent : « Par la suite, lorsque le téléphone sonnait pour des raisons semblables, les cinq garçons, devenus adolescents, nous répondions en imitant sa voix : « Appelez le directeur général. »»
Avec admiration et affection, les deux frères parlent de leur mère « C’était une femme très grande, belle et forte. Il n’aurait pas fallu que quelqu’un touche à ses enfants. Elle défendait la famille bec et ongles. » Elle est décédée à l’âge de 80 ans.
Lorsque les enfants sont jeunes, une fois par année a lieu la rencontre des 16 frères et sœurs de Gérard Filion, à L’Isle-Verte, où ils sont tous nés. « Ils riaient beaucoup en se racontant toujours les mêmes histoires, ce qui nous amusait, nous, les enfants.» Ces derniers ne connaîtront pas trois de leurs grands-parents; la mère de leur mère viendra demeurer avec eux après la mort de son mari.
En 1971, une partie des enfants ayant quitté la maison du chemin De La Rabastalière, Gérard Filion la vend à son fils Jean et il en achète une autre sur la montagne. Il la vendra par la suite à Guy Laliberté et deviendra propriétaire d’une autre maison, rue Saint-Laurent, dans Saint-Bruno. Sa dernière résidence sera un condo, rue Fortier, non loin de la belle maison blanche du début, siège de tant de souvenirs.
Gérard Flion a toujours été fier de ses enfants et petits-enfants. Et c’était réciproque. Ils savent très bien que leur père, ou grand-père, « a marqué le Québec par ses idées et son travail », affirment ses fils. Gérard Filion décédera en 2005, il a presque 96 ans.
Distinctions et fonctions officielles diverses
Compagnon de l’Ordre du Canada
Grand Officier de l’Ordre national du Québec
Membre de la Société Royale du Canada
Membre de l’Académie des Grands Montérégiens
Doctorat honorifique de l’Université de Montréal
Ordre du mérite de Saint-Bruno-de-Montarville
Temple de la renommée du Club de presse de Toronto
Président du Conseil de presse du Québec, 1983-1987
Vice-Président du Conseil des arts du Canada, 1962-1964
Président de l’Association canadienne des manufacturiers, 1971-l972
