Vers une surveillance citoyenne?

Agression au parc du mont Saint-Bruno

Après avoir proposé ses services de patrouilleur bénévole en monocycle au parc du Mont-Saint-Bruno, un citoyen de Saint-Bruno-de-Montarville reçoit une contravention.
L’agression d’une joggeuse au parc national du Mont-Saint-Bruno le 2 septembre a créé l’émoi chez les promeneurs, les sportifs et tous les amoureux du parc. Lundi, au moment de la rédaction de l’article, le suspect n’avait pas été retrouvé.
Le lourd dispositif policier mis en place les jours suivants, toujours actif aujourd’hui, est là non seulement pour les besoins de l’enquête, mais aussi pour rassurer les usagers du parc, comme l’a déjà mentionné le Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL).
« Pourquoi un si lourd dispositif de sécurité? Cela va coûter combien? Cela ressemble plus à une séance de relations publiques qu’autre chose. Pourquoi ne pas faire participer les citoyens comme moi, qui proposent gratuitement leur aide depuis plusieurs années à la SÉPAQ? »
Ramon Vitesse, un surnom qui lui sert aujourd’hui d’identité, habite depuis trois ans près du parc, à Saint-Bruno-de-Montarville.
Connu de tous, ou au moins aperçu par tous dans le parc, il se distingue par sa coupe mohawk et son monocycle qui lui sert de moyen de transport. « Je suis sept jours sur sept, plusieurs fois par jour au parc. J’ai ma carte d’abonnement et je suis très respectueux de tous. Si je n’y vais pas en monocycle, j’y vais pour faire de la course à pied ou encore y pique-niquer », explique ce journaliste et poète, comme il se décrit.
Contravention
Il parle de ses balades en monocycles au passé, car après plusieurs années de promenades, il vient de recevoir une contravention et un ordre de ne plus circuler sur les sentiers pédestres, alors qu’il avait proposé des services de patrouille gratuite à la Sépaq.
« J’avais offert à la Sépaq de patrouiller en monocycle dans les sentiers de marche, puisque les agents n’y circulent plus que pour des nécessités (arbre dangereux à couper, signalisations saisonnières à installer, urgence, etc.) à cause des compressions budgétaires. Nenni, j’aurais menacé des emplois syndiqués! Certaines connaissances ont avancé que, en somme, ce qui dérangeait nos braves en uniformes kaki, c’était la poésie du clown ayant choisi le bonheur de la nature en lieu et place d’une activité cadastrée. Mais bon, sans le souhaiter à personne, bien au contraire, à chacun de choisir, il est toujours possible de pourrir de l’intérieur! » a fait savoir le principal visé.

« J’avais offert à la Sépaq de patrouiller en monocycle dans les sentiers de marche, puisque les agents n’y circulent plus que pour des nécessités à cause des compressions budgétaires. » – Ramon Vitesse

Patrouille citoyenne
Est-ce qu’une patrouille de Ramon Vitesse en monocycle aurait empêché l’agression du 2 septembre? Impossible de répondre à cette question, mais n’est-il pas possible d’envisager une patrouille citoyenne?
« Je suis au parc tous les jours. On pourrait me donner une radio pour prévenir les agents du parc si j’aperçois quelque chose. Plutôt que de penser à l’idée, la Sépaq a préféré envoyer chez moi, un an après qu’elle m’ait averti, un agent de la faune, accompagné d’un agent du parc, et me donner une contravention pour avoir circulé en monocycle dans les sentiers », raconte M. Vitesse.
Averti par les agents du parc en octobre 2015, c’est en août 2016 qu’il recevra la visite de l’agent de la faune, seul habilité à dresser des constats d’infraction.
« Je ne me résous pas à me désigner coupable d’avoir roulé à monocycle dans les sentiers de marche du parc du Mont-Saint-Bruno. J’ai finalement payé le maudit constat d’infraction pour, après mûres réflexions, ne pas avoir à affronter un règlement alambiqué auquel s’ajoute une kyrielle de modifications épuisantes de niaiseries administratives déplaçant ici une virgule et là, noircissant un point obscur », indique-t-il.
Le parc, qui est interdit aux vélos, n’est en effet pas spécifiquement interdit aux monocycles qui, pour Ramon Vitesse, sont un mode de déplacement qui n’a rien à voir avec un vélo. « Un monocycle ne roule guère plus vite qu’un coureur, ne laisse aucune trace au sol (20-30 lb de pression pour des pneus ballons) et ne fait aucun bruit mécanique. Il est ridicule de le confondre avec un vélo, tel que visé par l’interdit sur les panneaux à l’entrée des différents sentiers », précise-t-il.
L’exemple du mont Saint-Hilaire
Au Centre de la nature du mont Saint-Hilaire, une montagne assez comparable en grandeur au parc du Mont-Saint-Bruno, les patrouilles bénévoles civiles font partie du quotidien. « Il y a, en ce moment, une soixantaine de patrouilleurs bénévoles et une trentaine sont actifs au moins une fois par mois », révèle Isabelle Pouliot, responsable des activités au Centre de la nature du mont Saint-Hilaire.
Après avoir signalé leur intérêt, les candidats sont sélectionnés avant d’être formés pour patrouiller sur le site appartenant à l’Université McGill.
« Lorsque les gens du public se présentent en tant que patrouilleurs, ils ne paient pas leur droit d’entrée. Après 17 heures de bénévolat, ils gagnent un abonnement à l’année. Cela permet aux patrouilleurs bénévoles de profiter de l’endroit à moindre coût et pour nous, cela permet d’avoir des yeux partout sur la montagne. Cela n’a aucun effet sur nos patrouilleurs salariés qui n’ont pas été réduits pour autant », de conclure Mme Pouliot.
Un exemple qui pourrait inspirer la Sépaq.
La direction du parc du Mont-Saint-Bruno explique que le monocycliste a été averti à plusieurs reprises avant de recevoir une contravention. « Un monocycle est concidéré comme un vélo », fait savoir Remy Chapados, en charge du parc du Mont-Saint-Bruno. « On a déjà des gardes parc en patrouille. Pour choisir un modèle alternatif, il faudrait analyser la situation, voir ce qui se fait ailleurs, Mais une patrouille ne se fera sûrement pas en monocyle », de conclure M. Chapados.