Un projet que beaucoup veulent améliorer

Projet de loi 122

 
Le projet de loi visant principalement à reconnaître que les municipalités sont des gouvernements de proximité et à augmenter à ce titre leur autonomie et leurs pouvoirs reste encore largement à préciser. Les villes devraient bientôt diffuser des mémoires pour proposer les modifications qu’elles souhaitent y apporter.
Ler 6 décembre, à l’Assemblée nationale, Philippe Couillard, premier ministre du Québec, Martin Coiteux, ministre des Affaires municipales, Richard Lehoux, président de la Fédération québécoise des municipalités, et Bernard Sévigny, président de l’Union des municipalités du Québec, ont signé une déclaration reconnaissant formellement le statut de gouvernements de proximité des municipalités.
« Nous avons pris l’engagement de reconnaître formellement les municipalités comme de véritables gouvernements de proximité. Nous l’avons fait avant, pendant et après la dernière campagne électorale. Au cours des derniers mois, nous avons travaillé avec nos partenaires du milieu municipal afin de concrétiser cette vision. Aujourd’hui, nous passons de la parole aux actes. Le geste que nous posons marquera une page dans notre histoire. En proposant de donner plus d’autonomie et de pouvoirs aux municipalités, nous leur donnons les moyens de se développer et de contribuer directement au rayonnement et à l’essor économique, social et culturel du Québec du 21 siècle », a déclaré le premier ministre.
« Aujourd’hui, nous avons franchi une étape majeure vers la modernisation de nos relations avec les municipalités. L’expression « créatures du gouvernement » appartiendra désormais au passé. Nous souhaitons que les relations entre le gouvernement du Québec et les municipalités soient à l’avenir basées sur la confiance réciproque, car c’est en travaillant ensemble en tant que partenaires que nous pourrons améliorer la livraison des services aux Québécois », a souligné le ministre Coiteux.

Un projet de loi pour offrir plus de liberté et de flexibilité aux municipalités

En plus de reconnaître officiellement les municipalités comme des gouvernements de proximité, le projet de loi propose de conférer à toutes les municipalités du Québec davantage d’autonomie et de pouvoirs. Six grands thèmes y sont d’ailleurs mis de l’avant. Ils visent concrètement à : rendre les municipalités plus autonomes dans leur mode de fonctionnement et dans leur relation avec leurs citoyens; favoriser le développement local et régional; favoriser la transparence et mieux informer les citoyens; préserver la confiance des citoyens envers les élus et les institutions municipales.

« Nous avons pris l’engagement de reconnaître formellement les municipalités comme de véritables gouvernements de proximité. Nous l’avons fait avant, pendant et après la dernière campagne électorale. » – Philippe Couillard

Un nouveau fonds

Le gouvernement souhaite par ce texte donner aux municipalités les outils nécessaires pour faciliter leur développement économique. Il souhaite ainsi créer un nouveau programme d’aide, le Fonds d’appui au rayonnement des régions (FARR). Le FARR, doté à terme d’une enveloppe annuelle de 100 millions de dollars, visera à soutenir la mobilisation ainsi que la coordination des élus locaux autour d’initiatives ayant un rayonnement régional. Le gouvernement entend appuyer la concertation à l’échelle régionale pour la concrétisation de projets de développement économique dont les retombées dépassent les limites territoriales d’une seule MRC.

Critique du projet de loi

Le projet de loi 122 soulève cependant quelques inquiétudes. Certaines municipalités ne retrouvent pas, dans les propositions du gouvernement, un équilibre entre le pacte fiscal qui leur a été imposé de 2016 à 2019, un pacte venant largement réduire les capacités financières des municipalités, et le nouveau projet de loi. D’autre part, plusieurs Villes indiquent que ce projet ne leur propose pas de réelles avancées.
En 2015, Québec avait réussi à faire accepter des compressions de plus de 300 millions par année aux municipalités québécoises en échange de pouvoirs accrus dans leurs négociations avec leurs employés. Des compétences que certaines municipalités disent ne jamais avoir vues.
Les municipalités devraient déposer plusieurs mémoires pour apporter les modifications souhaitées au projet de loi 122.
La déclaration, les mesures visant à moderniser les relations entre Québec et les municipalités ainsi que le projet de loi sont disponibles sur le site Web du ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire à l’adresse suivante : ce lien ouvrira une nouvelle fenêtre – www.mamot.gouv.qc.ca.

Les mêmes questions ont été posées aux maires de Saint-Bruno-de-Montarville, Sainte-Julie et Saint-Basile-le-Grand. Les réponses sont loin d’être similaires.

Martin Murray, maire de Saint-Bruno-de-Montarville

Êtes-vous satisfait ou pas du projet de loi 122?

Dans l’ensemble, oui, même si pour moi, ce projet de loi aurait pu aller beaucoup plus loin en matière de financement pour les municipalités.

Quelles sont les choses positives et négatives que cette loi apporte?

Quelques éléments plus significatifs pour moi :
· obligation d’adopter une politique de consultation (important de s’assurer que les citoyens ont leur mot à dire);
· mise sur pied du Fonds d’appui au rayonnement des régions (FARR)- enveloppe de 100 millions de dollars à terme;
· possibilité d’exiger des contributions aux fins de parcs, et dans certaines conditions, une contribution qui serait supérieure à 10 % de la superficie du site.
Négatif :
· le financement des municipalités repose toujours et principalement sur la taxe foncière.

Qu’est-ce que la loi 122 changera pour la Ville concrètement?

Dans un horizon prévisible, l’impact ne devrait pas être majeur. On ne parle surtout pas de bouleversement, mais plutôt de continuité.

Quelle est la première chose que va vous permettre de faire ce projet de loi?

Il faut bien voir que c’est un projet de loi. Il est possible qu’il subisse des modifications plus ou moins importantes à la suite de la commission parlementaire qui devrait se tenir en février. Comme mentionné précédemment, je ne vois pas d’impact majeur pour notre municipalité.

Y a-t-il un réel transfert de compétences du gouvernement vers votre municipalité et si oui, nécessite-t-il un transfert de financement?

Sur la base de ce que j’ai lu et entendu, il n’y a pas véritablement de transfert de compétences. On parle d’élargir le pouvoir des municipalités dans les domaines existants. On parle aussi d’une reddition de comptes moins tatillonne vis-à-vis du gouvernement.

Quel est le transfert de compétences que vous auriez aimé avoir et que cette loi n’a pas pris en considération?

J’aurais aimé qu’on s’attaque au problème du financement des municipalités qui repose et reposera toujours essentiellement sur les taxes foncières, alors que les municipalités ont des champs d’intervention de plus en plus variés et de plus en plus complexes.

Est-ce que cette loi va permettre à la Ville de faire des économies?

Des économies substantielles? Pas vraiment. L’abolition de l’obligation de publier les avis publics dans les journaux peut être vue comme une source d’économies, mais elle représente aussi, à l’échelle québécoise, une perte de revenus pour les journaux. La question qui se pose : ne vient-on pas affaiblir encore plus la presse imprimée, qui est un outil nécessaire en démo.

Suzanne Roy, mairesse de Sainte-julie

Êtes-vous satisfait ou pas du projet de loi 122?

Je suis très satisfaite. Tout au long de mon mandat de présidente de l’UMQ, de 2014 à 2016, j’ai milité pour que les municipalités soient reconnues comme des gouvernements de proximité, et ce, parce qu’elles sont imputables aux citoyens qu’elles desservent et parce qu’elles sont les mieux placées pour prendre des décisions qui concernent leur territoire. Ce projet de loi révolutionne le milieu municipal et aura un impact direct sur la qualité de vie des citoyens. Il nous octroie la marge de manœuvre nécessaire pour intervenir nous-mêmes sur notre territoire afin de régler les enjeux locaux, et ce, dans plusieurs domaines. Nous aurons ainsi plus de contrôle sur l’aménagement du territoire, les limites de vitesse, etc. De plus, grâce aux dispositions prévues dans ce projet de loi, la reddition de comptes sera effectuée en faveur des citoyens, qui seront ainsi en mesure de savoir ce que la Ville a réalisé concrètement dans tel ou tel dossier, par exemple.

Quelles sont les choses positives et négatives que cette loi apporte?

Ce projet de loi nous apporte la reconnaissance du statut de gouvernement de proximité; une plus grande marge de manœuvre sur l’aménagement du territoire et le développement économique; une plus grande transparence et une meilleure transmission de l’information aux citoyens; une diminution du fardeau administratif et une autonomie accrue; une gestion plus efficace de la fiscalité et des finances municipales; et, enfin, une meilleure adéquation entre les besoins des citoyens et la gouvernance et les pouvoirs de leur municipalité.

Qu’est-ce que la loi 122 changera pour la Ville concrètement?

Ce projet de loi nous permettra d’être plus efficaces! Lorsque nous aurons pris une décision dans un dossier, nous n’aurons plus à faire un détour par Québec avant de pouvoir passer à l’action.

Quelle est la première chose que va vous permettre de faire ce projet de loi?

Cela nous apportera plus de marge de manœuvre au quotidien. Cela va nous libérer de la paperasse pour nous permettre de réfléchir et d’agir rapidement en ce qui concerne les enjeux locaux.

Y a-t-il un réel transfert de compétences du gouvernement vers votre municipalité et si oui, nécessite-t-il un transfert de financement?

Il y a transmission de certains pouvoirs, mais pas de transfert de financement. Le transfert de financement n’est pas véritablement un enjeu dans le cadre de ce projet de loi, puisqu’il s’accompagne de la création d’un Fonds d’appui au rayonnement des régions (FARR), doté d’une enveloppe de 100 millions de dollars, et de l’instauration d’un chantier sur le développement économique local et régional, auquel seront conviés les partenaires municipaux.

Quel est le transfert de compétences que vous auriez aimé avoir et que cette loi n’a pas pris en considération?

Cette loi est une loi-cadre, une loi de base, dont le principe-clé est la reconnaissance. Il faut aussi se rappeler qu’elle en est encore au stade de projet de loi. Ce projet de loi contient déjà plusieurs grandes avancées. J’espère qu’il sera adopté tel quel et que les partis d’opposition sauront en reconnaître le bien-fondé et collaboreront à son adoption.

Est-ce que cette loi va permettre à la Ville de faire des économies?

Oui, ne serait-ce que par l’allégement du fardeau administratif. Cela générera d’importantes économies de temps pour les employés, qui pourront accorder davantage de temps aux services aux citoyens au lieu de remplir de la paperasse, par exemple.

Bernard Gagnon, maire de Saint-Basile-le-Grand

Êtes-vous satisfait ou pas du projet de loi 122?

Non! Il faut regarder de manière plus large que le projet de loi et se souvenir du pacte fiscal où l’on promettait une plus grande autonomie des municipalités et un plus grand transfert de compétences. On a dû renoncer à 425 000 $ par année avec le pacte fiscal 2016-2019, sans avoir été consultés, en échange de pouvoirs accrus dans la négociation avec nos employés, mais cela ne se fera jamais. Le gouvernement a reculé.

Quelles sont les choses positives et négatives que ce projet de loi apporte?

Le projet de loi 122 permettra quelques assouplissements administratifs dans la gestion de la municipalité qui nous donneront une économie d’environ 14 000 $, essentiellement due à la fin de l’obligation de la publication dans les journaux de nos avis publics. Le pacte fiscal, lui, nous coûte plus de 2 millions de dollars.

Qu’est-ce que la loi 122 changera pour la Ville concrètement?

Ce projet de loi ne change rien pour la Ville. Être un gouvernement de proximité en tant que tel ne change rien pour nous. Comme je le disais précédemment, la seule économie que nous ferons avec ce projet de loi, c’est la latitude qu’il nous donne en choisissant le support pour la publication de nos avis publics. Ce texte nous demande d’avantager la qualité de nos soumissionnaire. Ce sera une charge en plus. On nous parle d’élargissement du pouvoir de taxation des municipalités sans rien nous préciser. On aura le pouvoir de limiter la vitesse dans notre ville, soit, mais cela ne nous donne aucun avantage économique. On épargne de part et d’autre quelques demi-journées de travail au sein de la municipalité, mais l’avantage économique est tellement petit que je n’ose même pas le chiffrer.

Quelle est la première chose que va vous permettre de faire ce projet de loi?

Cela ne changera rien pour la Ville.

Y a-t-il un réel transfert de compétences du gouvernement vers votre municipalité et si oui, nécessite-t-il un transfert de financement?

Il n’y a dans ce projet de loi aucun transfert de compétences.

Quel est le transfert de compétences que vous auriez aimé avoir et que cette loi n’a pas pris en considération?

Celui de se retirer du pacte fiscal. Nous n’avons jamais été consultés pour y adhérer. Les compétences pour gérer Saint-Basile, on les a. Ce projet de loi n’est pas encore entré en vigueur et devrait l’être au courant du mois de juin cette année. Est-ce que le gouvernement pourrait faire des efforts?

Est-ce que ce projet de loi va permettre à la Ville de faire des économies?

Ça nous coûte plus de 2 millions pour économiser 14 000 $ par année. Suzanne Roy, présidente de l’UMQ à l’époque, s’était offusquée du pacte fiscal. Aujourd’hui, elle se félicite de ce projet de loi. Elle consent donc au pacte fiscal désormais. Nous nous sommes retirés de l’UMQ l’an dernier, ce qui nous permet de faire une économie de cotisation de 25 000 $ cette année. C’est plus que ce que nous propose ce projet de loi. Plusieurs municipalités ont dû augmenter leur taxe pour combler le manque à gagner du pacte fiscal.