Un clic qui n’attire pas les vignerons
La SAQ ouvre son site Web aux petits producteurs
La Société des alcools du Québec (SAQ) a développé son site Internet pour donner une meilleure visibilité aux petits producteurs du Québec. Une visibilité que les principaux concernés jugent trop cher payée.
Cliquez, achetez, ramassez : voilà la nouvelle offre de la SAQ. La société d’État, qui possède le monopole sur les boissons alcoolisées, a ouvert, depuis peu, l’accès à son site Internet aux petits producteurs de cidres, vins et alcools. « C’est compliqué à distribuer, des produits de niche dans un réseau de 400 succursales. Avec la gestion de l’offre virtuelle, les produits sont entreposés et disponibles dans tous les points de vente du Québec. La SAQ se positionne pour être un leader dans la consommation en ligne », a expliqué Alain Brunet, président et chef de la direction de la SAQ, lors du Colloque des cidriculteurs artisans du Québec (CAQ) en mars dernier.
En passant par son Web, la SAQ s’engage à livrer la commande dans un délai de trois à cinq jours, dans la succursale qu’aura choisie le client. « La livraison sera gratuite pour des achats de plus de 75 $. Cette grande transformation ouvre la porte aux cidriculteurs, vignerons et producteurs d’alcool du Québec, car les producteurs avec de petits volumes auront dorénavant accès à l’ensemble du réseau de la SAQ », précise la société d’État.
Pas attirés
Les vignerons du Québec ne sont pas certains de voir là une grande différence dans leur motivation à être présents dans le répertoire de la SAQ. « Cela ne change rien. Ils vont vendre une de mes bouteilles 15 $ pour me donner 5 $. En quoi cela serait-il rentable ? Ce n’est même pas le coût de ma production. Je ne sais pas combien de millions de bouteilles à l’étranger ils achètent. Une chose est certaine, c’est que la production des petits vignerons ne leur fait pas concurrence », indique Thierry Kobloth, propriétaire du vignoble Kobloth à Saint-Bruno-de-Montarville.
C’est le même son de cloche pour le domaine Bouchard-Champagne, à Saint-Basile-le-Grand. « La cote que prend la SAQ pour nos produits est trop grosse pour que je désire traiter avec elle », confirme Richard Champagne, le propriétaire.
Avec cette nouvelle offre sur le Web, la SAQ n’aura plus à maintenir tous les produits sur les tablettes de ses magasins. « Les produits québécois sont un choix d’affaires pour la SAQ, mais aussi un choix du cœur. Nous avons pris position en faveur des produits québécois parce que nous y croyons et que le consommateur en veut », a affirmé le président de la SAQ. Ce dernier a souligné la grande qualité des produits québécois, qui sont d’ailleurs reconnus mondialement. Une reconnaissance que les petits producteurs aimeraient voir se concrétiser par une taxation plus abordable.
« La SAQ pourrait distribuer nos vins sans prélever des cotes astronomiques, ne serait-ce que pour favoriser les producteurs locaux. La SAQ jouerait là son rôle de société d’État », de conclure M. Kobloth.
