Saint-Bruno : que deviendra la maison 555, montée Sabourin?
Les propriétaires de la maison située au 555, montée Sabourin, à Saint-Bruno-de-Montarville, semblent dans une impasse. Ils souhaitent vendre leur propriété à un prix juste à la Ville afin de la préserver, mais cette dernière ne répond pas à leur offre. De plus, les restrictions liées aux changements de zonage compliquent la vente.
Les propriétaires de la maison située au 555, montée Sabourin, à Saint-Bruno-de-Montarville, souhaitent vendre leur demeure vieille de plus de 200 ans.
« Nous avons eu un ou deux acheteurs intéressés qui, après avoir contacté la Ville, ont été informés que la Municipalité disposait d’un droit de préemption sur la maison. La vente a ensuite été découragée en raison de problèmes de zonage. Il faut noter que la Ville a modifié le zonage du secteur à plusieurs reprises, à notre insu, ce qui dissuade les acheteurs », expliquent Peter Krakus et Teresa Krakus-Cunningham, les enfants de Stanislas Krakus, décédé à l’âge de 93 ans.
La Ville réfute
Le journal a interpellé le maire de la Ville, Ludovic Grisé Farand, afin de savoir cette dernière souhaitait acquérir la maison.
« Tout ce qu’il y a pour le moment, c’est un droit de préemption détenu par la Ville sur cette maison, comme c’est le cas pour une vingtaine d’autres terrains à Saint-Bruno. Cela signifie simplement que si le propriétaire souhaite vendre, il doit d’abord l’offrir à la Ville. Nous avons ensuite 60 jours pour décider si nous voulons l’acheter ou non. Je suis un peu surpris d’entendre que cela pose problème à la vente. Les propriétaires n’ont qu’à nous envoyer un courriel pour que nous retirions le droit de préemption dès que possible. Je peux vous dire d’ores et déjà que nous n’avons pas l’intention d’acheter cette maison. Peut-être que dans plusieurs années, nous aurions été intéressés, mais actuellement, ce n’est pas le cas et nous ne nous opposons absolument pas à sa vente. S’il y a eu des difficultés, c’est sans doute en raison d’un mauvais accompagnement dans le processus. Si les propriétaires souhaitent vendre, ils doivent nous transmettre un courrier pour connaître notre position, et je peux vous dire tout de suite que la réponse est non. Nous pourrons alors retirer notre droit de préemption. »
» Je peux vous dire d’ores et déjà que l’on ne veut pas l’acheter. » – Ludovic Grisé Farand
Rappelons que le droit de préemption est un droit de préférence permettant à la Ville d’évaluer l’opportunité d’une transaction au moment de la vente d’un immeuble, et de se retirer, le cas échéant.
Des complications
Les propriétaires indiquent au journal avoir déjà reçu, il y a quelques années, une offre d’achat de la Ville, mais bien en deçà de la valeur marchande. « Nous ne pouvions pas accepter, surtout après tout le travail qu’a effectué notre père pour rénover ce patrimoine de Saint-Bruno », explique Teresa Krakus-Cunningham, qui vit en Ontario mais qui doit venir régulièrement entretenir la maison à Saint-Bruno.
Les propriétaires ont dû déposer une demande à la Commission d’accès à l’information du Québec pour obtenir l’évaluation de leur maison réalisée par la Ville il y a quelques années. « Même si la Commission a statué en grande partie en notre faveur et que le rapport nous a été communiqué, le document était presque entièrement caviardé. Aujourd’hui, nous ne connaissons toujours pas le montant de l’évaluation faite par la Ville », précisent-ils.
Le maire de la Ville a indiqué au journal que ces questions relèvent du Service du greffe et qu’aucune décision politique n’est prise dans ce genre de dossier.
PPU Sabourin
La maison est présentée sur la couverture du Plan particulier d’urbanisme (PPU) Sabourin que l’ancienne administration de la Ville avait déposé. Dans le document, on parle de l’endroit comme d’un bâtiment « d’intérêt patrimonial dont la valeur est de bonne à exceptionnelle ».
On peut également y lire que « Le secteur Sabourin est le plus grand site restant de la Ville de Saint-Bruno-de-Montarville appelé à s’urbaniser. (…) Le développement du secteur Sabourin revêt une importance hautement stratégique pour la Ville ».
Lorsqu’on demande si l’adresse est en danger en raison de la construction future de ce quartier, le maire actuel semble prendre une direction inverse. « Au contraire, on est fiers d’avoir des bâtiments patrimoniaux de ce genre. On va laisser une place intéressante dans le PPU Sabourin à cette maison. Cela ne nous gêne pas. On en est fiers. On va la mettre en valeur », de conclure le maire de la Ville.
La plus ancienne
« C’est l’une des plus vieilles maisons de Saint-Bruno-de-Montarville, peut-être même la plus vieille, d’indiquer au journal la présidente de la Société d’histoire de Montarville, Colette Deslières. On situe la construction de cette maison entre 1780 et 1824. Il est difficile de cerner avec exactitude la date. Une chose est certaine, c’est qu’elle fait partie du patrimoine de Saint-Bruno. »
L’amour du patrimoine
Stanislas Krakus est un immigrant polonais arrivé au Québec en 1957. En 1968, il achète une maison presque en ruine à Saint-Bruno-de-Montarville pour la rénover entièrement, tout en respectant l’architecture et les matériaux de l’époque.
« La maison était complètement à l’abandon : fenêtres cassées, bois pourri, plancher partiellement manquant. Notre père et sa famille, immigrants, avaient des moyens limités et ont donc entrepris de la restaurer avec le plus de soin possible. Un historien a visité la maison il y a une trentaine d’années et il a effectué des recherches, établissant qu’il s’agissait de l’une des plus anciennes de la région, construite à la fin du XVIIIe siècle », indiquent au journal Peter Krakus et Teresa Krakus-Cunningham, les enfants de M. Krakus, décédé il y a peu à l’âge de 93 ans. Cependant, la première date confirmant son existence dans des actes notariés est 1824.
Un musée
Pour Stanislas Krakus, qui avait rencontré le journal alors qu’il vivait encore dans sa maison, ses dernières volontés étaient de voir sa demeure conservée « parce qu’elle a rempli sa fonction. Elle a toujours fait vivre ses occupants, autrefois des familles de cultivateurs. Elle doit être conservée ».
« Durant ses dernières années, il a accueilli plusieurs conseillers municipaux et un maire à la maison, leur offrant des visites et du thé, les encourageant à transformer la maison en musée ou en centre communautaire pour les habitants de Saint-Bruno.
Pendant de nombreuses années, diverses administrations municipales lui ont rendu visite et ont continué à promettre d’acheter la maison », de conclure ses enfants.
Le maire actuel de Saint-Bruno, Ludovic Grisé Farand, a indiqué clairement qu’il n’était pas envisagé, aujourd’hui pour la Ville, d’acheter la maison.