Saint-Bruno: la vie d’artiste peintre de VéroniKaH
VéroniKaH, dont le nom de naissance est Véronique Grauby, est une artiste peintre qui, à travers ses expériences, a réussi à vivre de son art et plus spécifiquement à être libre de peindre pour qui elle le désire.
L’histoire de Véronique débute à l’adolescence lorsqu’on diagnostique chez elle un trouble alimentaire. À l’aube de ses soixante ans, la maladie fait toujours partie de sa vie. « C’est un malheur, une douleur que je porte tous les jours avec moi », mentionne-t-elle.
Au début des années 2000, elle est admise à l’Institut universitaire en santé mentale Douglas. C’est à cet endroit que VéroniKaH devient artiste grâce à une question de son psychologue. Ce dernier lui demande pourquoi elle n’a pas réalisé son rêve de devenir une artiste. Ce rêve d’enfant avait rapidement été mis de côté en raison de l’aspect financier. « Mes parents me disaient que c’était impossible de vivre de son art », explique celle qui a étudié par la suite en marketing. « J’ai commencé à peindre ma première toile à l’hôpital. J’avais besoin d’aller chercher à l’intérieur de moi comment je me sens. »
Autodidacte dès le début, Véronique, à la sortie de l’hôpital, décide de mettre sur pause sa carrière en marketing pour donner une chance à son art. « Quand tu as un don, comme j’ai, tu n’as pas le choix que de le faire vivre. »
Lorsque l’artiste peint accroupie au sol, au-dessus de sa toile, dans son atelier très bien rangé, elle arrive à quitter la douleur que lui apporte sa maladie. « C’est comme si, pour quelques heures, je pouvais oublier que je suis dans mon corps, car mon problème, c’est que je ne suis pas bien dans mon corps. C’est un time out de ma souffrance de l’anorexie. »
« C’est plus qu’une œuvre sur toile, c’est une expérience et un partage d’émotions. » – VéroniKaH
Travailler à la maison
Le solarium de sa maison est devenu son atelier. Le matériel qu’utilise aujourd’hui l’artiste est rangé minutieusement dans une petite armoire. On y retrouve quelques spatules et pinceaux, de la texture et des pigments de couleurs. À travers les années, l’artiste peintre a changé de style et développé différentes techniques. Si, au départ, les toiles étaient très instinctives, créées de toutes pièces en quelques heures sous le coup de l’inspiration, aujourd’hui, l’artiste peut passer plusieurs semaines sur un même projet.
Elle procède à partir d’images qui l’inspirent, puis débute un travail de moine à l’aide de sa tablette. Bord de mer, une œuvre récemment terminée par l’artiste, lui a pris un temps fou, en voyage au Mexique, pour travailler chacune des pierres de la toile. Grâce à un fournisseur qu’elle qualifie d’incroyable, son œuvre, au départ numérique, est imprimée par la suite sur une toile. Elle peut ensuite travailler les textures et les reliefs de la toile dans son solarium chez elle.
Si, désormais, elle peint pour le plaisir, pour des commandes personnalisées ou pour des fondations, Véronique a dû commencer en galerie, le chemin prédestiné pour les artistes qui souhaitent être reconnus. Encore aujourd’hui, alors que les toiles de VéroniKaH ont remporté des prix et ont été exposées outre-mer, l’artiste se fait parfois refuser des occasions de peindre auprès de fondations en raison du manque d’authentification des galeries sur ses toiles. « Aujourd’hui, ça ne me dérange plus, j’ai une liste de gens et de fondations qui veulent avoir mes œuvres, mais ç’a déjà été difficile sur l’estime de ne pas être reconnue parce que je ne suis plus dans les galeries. »
Exposer à la maison
Au départ, Véronique comptait sur une gérante pour la vente et l’exposition de ses œuvres dans les galeries. « Les galeries prennent de 50 % à 70 % de la valeur d’une œuvre », mentionne-t-elle. Si cette part de revenu est déplorable, selon elle, elle a quitté le milieu des galeries lorsqu’elle s’est aperçue que la personne responsable de ses œuvres profitait d’elle au-delà du prix de vente. « J’ai donc décidé de transformer ma maison et c’est devenu mon lieu d’exposition. »
Avant la pandémie, elle y organisait des journées portes ouvertes pour que les gens viennent, un peu comme dans une galerie. Installée à Saint-Bruno, l’artiste a dû revoir son modèle d’affaires lorsque les mesures d’isolement ont été décrétées par les gouvernements. Elle explique toutefois que c’était un bien pour un mal. Elle s’est aperçue que plusieurs visiteurs photographiaient ses oeuvres et, sans les acheter, reproduisaient l’image pour décorer leur maison. « Aujourd’hui, je reçois les gens sur invitation et je le vois qu’ils sont vraiment intéressés et respectueux de mon travail », mentionne l’artiste, qui a décoré les murs de sa maison de toiles immenses ou de reproductions uniques. Certaines de ses œuvres sont imprimées sur fond métallique en plus petit format que celui qu’elle a l’habitude de travailler.
À travers ce parcours, VéroniKaH réussit à vivre de son art depuis de nombreuses années. « Je suis fière de vivre de mon art. C’est plus qu’une œuvre sur toile, c’est une expérience et un partage d’émotions. »