Saint-Bruno : entrevue avec l’ancien patron du Förena
Le président du Groupe SKYSPA, Patrick Rake, a accepté de répondre aux questions du journal après la vente surprise, à la corporation Strøm, de son groupe qui compte le spa Förena à Saint-Bruno-de- Montarville.
Depuis quand la vente à Strøm est-elle officielle?
La nouvelle est officielle depuis le 2 avril à midi. On a vendu, moi et mes partenaires. On a vendu la totalité du Groupe SKYSPA à la corporation Strøm. Cela incorporait nos quatre spas, dont le dernier, le Förena à Saint-Bruno-de-Montarville, ainsi que le siège social, qui était le centre névralgique de nos spas au Québec. Cela comptait 300 personnes qui travaillaient pour nous. Elles ont toutes transféré avec la corporation Strøm.
Pourquoi avoir vendu Förena après avoir fait le plus dur?
J’aurai 60 ans cette année et tous mes partenaires d’affaires ont entre 55 et 70 ans. Quand on a commencé à avoir des discussions avec la corporation Strøm, ce n’était pas vraiment dans nos cartons de vendre. On y pensait, mais sur une couple d’années. On voulait optimiser Förena et on avait des objectifs de développement. Lorsqu’on s’est fait approcher, c’est évident que l’on se disait vouloir encore continuer quelques années, mais pas dix ans. Il n’y avait personne qui voulait continuer jusqu’à 70 ans. Donc, on prévoyait une sortie à un moment donné et on s’est mis à en parler ensemble. Je me suis aperçu, à un moment donné, en tant que président de l’agence, que je suis un développeur et que Förena, c’est un projet de développement. Förena ne restera pas comme c’est actuellement. Pour nous ou pour la corporation Strøm, le projet est le même. C’est de développer cet endroit parce qu’il y a quatorze acres de terrain et il n’y en a que quatre ou cinq de développés. Vous comprendrez que le potentiel est là. On ne parle pas d’un terrain en Gaspésie, on parle à quinze minutes du pont Jacques-Cartier de Montréal, qui est dans un supercadre environnemental. Tout le monde aurait voulu avoir ce terrain-là. Au bas de la montagne, à côté de la Sépaq, à côté de la station de ski, on comprend que c’est un pôle récréotouristique important. Mais lorsqu’on fait un projet de la sorte, on parle de trois ans de préparatifs et de réalisations. Cela veut dire qu’il y a environ un an et demi où l’on fera nos préparatifs, la planification et en même temps, il faut s’occuper du côté financier. On sait, la première phase a coûté 13 millions, avant la pandémie, on peut imaginer qu’aujourd’hui, cela aurait coûté pas loin de 20 millions maintenant. Ensuite, on a un an et demi pour le construire, au moins, s’il n’y a pas de problèmes. Ensuite, il faut rentabiliser le projet et avant qu’il n’atteigne le seuil de rentabilité, on parle d’un autre trois ans. On est rendus à six ans. Quand on a 40, 41 ans, comme le propriétaire de la corporation Strøm qui vient de nous acheter, ce n’est pas un problème, car 41 plus 6, cela fait 47 ans. Mais lorsqu’on est rendu à 60 ans, on arrive pas loin de 70 ans. Cela devient un choix de vie. C’est essentiellement à cause de cela que l’on a procédé à la vente. Il y avait aussi une super belle opportunité, car on parle de la corporation Strøm, qui était notre compétiteur principal depuis au-dessus de quinze ans.
Vous vendez à votre principal concurrent, ça ne vous gêne pas?
C’est la meilleure chose qui peut se passer dans le monde des affaires, lorsqu’un concurrent acquiert l’autre. Il faut que l’on ait les mêmes valeurs, par exemple. Il y a du personnel qui est allé chez eux, il y a du personnel qui est venu chez nous. Cela fait longtemps que je connais Strøm. On sait que l’on a les mêmes valeurs, alors pour lui, c’est gagnant cette transaction. Il va continuer les affaires, car il n’y a aucun changement à apporter et de notre côté, on sait que les projets continueront à se réaliser parce que nous savons que tout notre personnel continuera. C’étaient les accords de base lorsqu’on s’est entendus. Ce qui est merveilleux pour Saint-Bruno, c’est que Förena continuera à se développer. Les projets ont déjà été évoqués, dessinés, planifiés. Je ne sais pas si Strøm voudra faire un hôtel. Ces gens vont se donner le temps d’analyser ça et ensuite, ils se mettront en mode développement assez rapidement, car ce sont des développeurs. Ensuite, vous verrez avec eux les choses qu’ils veulent faire.
Vous n’habitez pas très loin et vous vous rendiez tous les jours à Förena, ce sera toujours le cas, désormais?
C’est l’une des premières choses que j’ai réglées avec Strøm, de continuer à avoir accès au Förena. Parce que ce sont tous mes amis, ma famille, quelque chose que j’ai bâti, et je ne me voyais pas ne plus y aller ou n’y aller qu’une fois de temps en temps. Sûrement que l’on me demandera mes avis et cela me fera toujours plaisir de le faire, mais y aller, cela fera partie de mes habitudes. Je m’en vais un mois en vacances. Là, je suis fatigué, avec toutes ces émotions. On comprendra que faire une transaction comme celle-là, ç’a été difficile sur le plan des émotions.
Vous avez un petit pincement au coeur de laisser Förena à un autre?
Effectivement. Oui, j’ai un deuil à faire. Je suis passionné et c’est ça qui m’a fait avancer, et ce n’est pas parce que j’ai fait cette transaction que je ne l’ai plus. J’aime ce que j’ai fait et les gens que j’ai rassemblés pour le faire. Première des choses, c’était le temps pour moi de passer à autre chose. La pandémie a été quelque chose de difficile à passer. On a des enjeux importants et notre projet passe par faire des développements et j’ai fait le choix personnel de ne pas aller dans une autre décennie. Je voulais me retirer au bon moment. Aussi, si j’avais vendu à une corporation américaine qui n’y connaît rien là-dedans, premièrement, elle aurait voulu que je reste, car elle n’y connaît rien, et elle n’aurait probablement rien respecté de ce que l’on fait. Avec Strøm, c’est non seulement une corporation québécoise, régionale, qui a son siège à Chambly, donc, pour moi, c’était naturel, mais en plus, ils ont les moyens.
Pour le personnel actuel, rien ne change?
Rien ne change pour eux, je m’en suis assuré. Le siège social reste pour l’instant à Boucherville et tout le personnel qui est là, que ce soit mon département de comptabilité, de marketing, des ressources humaines et de l’opérationnel, les gestionnaires, les gens restent tous là. Il n’y a aucune mise à pied, parce que le groupe Strøm est en train de développer. Ils ont d’autres projets au Canada et à l’international. Ils ont besoin des talents et l’une des premières choses qu’ils ont remarquées dans notre organisation, c’est notre équipe de professionnels. C’est tellement difficile de trouver des talents, de nos jours, et de les garder dans des valeurs d’entreprise et eux sont très bons à cela.