Pomiculteurs et vignerons se croisent les doigts

Variation de température et récoltes

Les changements radicaux de température qu’a connus la province ces dernières semaines inquiètent grandement les pomiculteurs; ceux-ci pourraient perdre une bonne partie de leur récolte si un nouveau gel au sol survenait. De leur côté, les vignerons ne se plaignent pas trop pour l’instant, mais se croisent eux aussi les doigts pour que la saison soit prospère.

À la Ferme Trinité, à Saint-Bruno, on surveille de près l’évolution des bourgeons de chacun des 500 pommiers centenaires du verger. Élizabeth Ménard, présidente de la Compagnie des arts et des métiers traditionnels, gestionnaire des lieux, estime que l’évolution des boutures est un mois d’avance et que si une baisse importante de température survenait, elle mettrait en péril la récolte.

« Nous n’avons aucune idée de quoi va avoir l’air la récolte cette année, puisqu’elle est en avance; les bourgeons ont déjà éclos et la sève est montée. Nous sommes sur un pied d’alerte, parce que si nous décidons de tailler les arbres et que la température descend en dessous de – 9 degrés Celsius, nous allons leur créer de graves blessures et compromettre une bonne partie de notre récolte », souligne Mme Ménard, qui se souvient d’avoir perdu la moitié de ses pommes il y a deux ans avec de pareilles conditions climatiques.

Des vignes très résistantes

Au Domaine Bouchard-Champagne, à Saint-Basile, les vignes se portent bien et ne souffrent pas des caprices climatiques de Dame Nature; celles-ci sont très résistantes au froid, jusqu’à – 35 degrés Celsius.

« Les 25 000 vignes que compte le Domaine passent tous les hivers dans leur plus simple nudité, sans couverture protectrice, de souligner le propriétaire, Richard Champagne. Les coups de chaleur subis dernièrement ont réveillé un peu les vignes, mais elles se sont rendormies quand la température normale de saison est revenue.»

Comparativement à la saison pluvieuse de 2011, qui n’a pas aidé à la productivité des raisins, M. Champagne croise les doigts pour que le soleil soit bien présent cette année. « Si le temps chaud que nous avons connu veut bien persister, on va avoir une superbe récolte. La chaleur, c’est du bonbon pour les vignes! »

En avril, ne te découvre pas d’un fil

Si l’on se fie aux prévisions de Météo Média, les deux prochaines semaines s’annoncent clémentes avec des températures vacillant entre – 5 et 13 degrés Celsius. Mais comme le dit le dicton : « En avril, ne te découvre pas d’un fil », et l’on pourrait ajouter : « Parce qu’en mai, tu vas te moucher ». C’est le constat que font Roxanne et Thierry Kobloth, du Vignoble Kobloth à Saint-Bruno.

« La période de l’année à surveiller pour les raisins est la fin mai. Un coup que les bourgeons ont éclos, une dernière gelée importante, qui arrive en temps normal à la fin du printemps, pourrait alors détruire la récolte, explique Mme Kobloth. Par contre, tant que les bourgeons restent blancs, tout est de bon augure. »

Si la belle température était restée deux ou trois jours de plus, le Vignoble Kobloth aurait vu ses bourgeons éclore hâtivement et le climat rafraîchi des derniers jours aurait effectivement eu un impact sur la récolte.

Mme et M. Kobloth n’ont pas couru de risque, ils ont conservé les couvertures hivernales au-dessus des 14 000 plants de vignes en place. « Avec le beau temps à venir, nous allons être prudents. Nous allons relever les couvertures, sans les retirer totalement au cas où il y aurait un gel au sol dans les prochaines semaines, ajoute Roxanne Kobloth. Nous ne pouvons rien prévoir, même pas les vendanges qui, en temps normal, débutent fin septembre début octobre; peut-être que cette année elles seront aussi devancées. »

Quoi qu’il en soit, les amateurs de vin seront tout de même bien servis; la récolte de 2012 sera embouteillée à l’automne 2013.