Enfants recherchent éducatrices dans milieux familiaux subventionnés

Le monde de la petite enfance est en pénurie de milieux familiaux subventionnés. Le CPE Les Copains d’abord, qui encadrait près de 200 milieux familiaux subventionnés, n’en compte plus qu’une centaine aujourd’hui.

« Deviens responsable d’un service de garde en milieu familial. » C’est presque comme un cri du cœur que le bureau coordonnateur du Centre de la petite enfance (CPE) Les Copains d’abord a lancé en imprimant une brochure pour attirer de nouvelles éducatrice en milieu familial subventionné.

La très grande majorité des responsables en service éducatif (RSE) sont des femmes, même si la profession est ouverte aux hommes. « Je n’ai eu qu’un seul homme depuis que je suis en fonction et la réponse des parents a été très bonne », explique Renée-Claude Lauzier, coordonatrice du bureau de coordination du CPE Les Copains d’abord.

Hommes ou femmes, peu importe, il manque de RSE dans les milieux familiaux subventionnés et la situation est critique. « On a perdu une centaine de milieux familiaux. Aujourd’hui, nous en coordonnons 98. Avant la pandémie, nous en avions 180. Nous avons perdu énormément de milieux familiaux. »

Sans milieux familiaux, les CPE n’auraient pas la capacité d’offrir un service de garde à une grande majorité de Québécois. « Il y a plus d’enfants dans les milieux subventionnés que de CPE que nous coordonnons dans nos cinq installations à McMasterville, à Saint-Mathieu-de-Beloeil ou encore à Saint-Bruno-de-Montarville. Nous avons une capacité de 1 020 places en milieu familial. »

Une éducatrice passionnée

Cela fait maintenant plusieurs années que Sylvie Séreau a choisi de faire du sous-sol de sa maison à Saint-Basile-le-Grand une milieu familial, où 6 enfants de 0 à 5 ans s’amusent. « J’ai déjà eu 9 enfants à m’occuper lorsque nous étions deux, avec ma fille qui était assistante. Comme je suis seule désormais, je suis revenue à 6 enfants. » Et c’est la règle, le CPE coordonnateur vérifie au moins trois fois par année si l’environnement du milieu familial est sécuritaire pour l’enfant en rendant des visites à l’éducatrice.

En plus des vérifications faites par le CPE au moment d’autoriser une personne à proposer un milieu familial subventionné, le CPE est à l’écoute des demandes de ses milieux familiaux. « À la moindre interrogation, si j’ai besoin d’information spécifique sur n’importe quel sujet en lien avec ma pratique, j’appelle le bureau coordonnateur et l’on m’informe », nous précise Sylvie, qui nous a ouvert les portes du sous-sol de sa maison et de la cour arrière, aménagés pour les enfants.

Cette maman, qui compte parmi ses protégés son petit-fils, voit grandir au fil des années chacun des enfants pour ne les quitter que pour la première année du primaire. Sylvie a déjà travaillé dans un CPE et le leitmotiv de son activité est de voir les enfants jouer. « Je suis née là-dedans. Ma mère était éducatrice jusqu’à l’âge de 79 ans. C’est facile pour moi. »
Pour aider ses milieux familiaux, surtout l’hiver, le CPE organise des activités auxquelles tous les milieux familiaux peuvent participer.

Sylvie ne connaît pas la crise. « Je n’ai jamais manqué d’enfants. Lorsque je me promène dans Saint-Basile, je me fais souvent approcher par des personnes que je connais, car j’ai gardé leurs enfants. Cela devient vraiment une grande famille. Ce que je privilégie avec les parents, c’est surtout la communication. »

Incitatifs financiers

Aujourd’hui, Sylvie gagne 31,23 $ par enfant par jour, et ce montant inclut tous les investissements en jouets, en installations de toutes sortes que l’éducatrice doit faire régulièrement. Un montant pas forcément assez valorisant pour attirer de nouvelles professionnelles en milieu familial subventionné. Ce montant sera cependant bientôt réévalué à la hausse.

Plusieurs incitatifs ont été mis en place par le gouvernement récemment pour pallier le manque criant de structure : un montant de 500 $ par mois pour des milieux familiaux subventionnés pouvant accueillir 9 enfants, et 3000 $ pour ceux pouvant accueillir 6 enfants afin de pouvoir s’équiper avant leur ouverture. Cet incitatif financier est prévu pour quatre ans.

Mme Lauzier explique aussi ce manque de milieux familiaux par le départ de beaucoup à la retraite. « Nous recevons des appels de parents qui sont déprimés, car ils n’ont pas de place pour leurs enfants. Ils sont alors sur liste d’attente et, en attendant, ils ne peuvent pas retourner travailler ou ils trouvent une place dans une garderie en milieu familial non subventionné qui coûte bien plus cher. » Au lieu de payer 8,50 $ en CPE ou dans un milieu familial subventionné, il n’est pas rare de devoir payer, quand l’endroit n’est pas subventionné, plusieurs dizaines de dollars par jour pour faire garder son enfant. D’autre part, un milieu familial non subventionné n’est pas sous le contrôle d’un CPE.

Comme il manque une centaine de milieux familiaux subventionnés sur le territoire du CPE Les Copains d’abord, les places sont très en demande.

Une grande famille

Audrey Caron, maman de deux enfants de 5 ans et de 2 ans et demi, a trouvé un milieu familial subventionné à Chambly qui peut s’occuper de ses enfants.Elle ne les changerait de place pour rien au monde. « J’ai eu l’adresse par le bouche à oreille. J’aime avoir, en milieu familial, cette stabilité. C’est vraiment un milieu familial. Tout le monde se connaît et lorsqu’il y a des imprévus, on s’arrange entre parents. C’est pour moi la situation idéale. Autour de moi, je le vois, des gens se questionnent à savoir s’ils resteront à la maison pour garder leurs enfants. »

Pour le CPE Les Copains d’abord, les personnes qui se lancent dans la mise en place d’une structure familiale subventionnée ont entre 30 et 40 ans généralement. « Lors des deux dernières années, nous n’avons eu aucune demande », de conclure Mme Lauzier.