Réinventeur de saucisses

La première succursale d’Ils en fument du bon situé rue Jean-Talon, à Montréal.
Felipe St-Laurent n’a pas toujours eu un parcours facile. Il a toutefois persévéré et se retrouve aujourd’hui le maître de la saucisse haut de gamme.
Le Grandbasilois raconte que les années où il a fréquenté les écoles de Saint-Basile-le-Grand et de Saint-Bruno-de-Montarville ont été particulièrement houleuses. Son hyperactivité lui causait d’importants problèmes de concentration. « J’en arrachais à l’école. Je terminais mes années avec une moyenne d’environ 67 %. » À ce moment-là. Il ignorait que cette hyperactivité l’aiderait à développer une créativité culinaire hors pair.
Il réussit malgré tout à terminer son secondaire et à s’inscrire à l’école d’hôtellerie. Alors qu’il venait de terminer ses cours, il fit la rencontre d’Ulysse, un maître charcutier d’origine suisse qui faisait sa propre charcuterie dans son garage. Il ignorait encore que cette rencontre allait changer sa vie à jamais. « J’étais fasciné par le travail qu’il faisait. Les Européens avaient beaucoup d’avance sur nous dans le domaine de la charcuterie. »
Il proposa à ce spécialiste de travailler gratuitement une journée par semaine pour apprendre sa méthode. On peut dire qu’il a vraiment commencé au bas de l’échelle. « Pendant trois mois, il m’a fait nettoyer des boyaux d’agneau. » Felipe St-Laurent n’a toutefois pas baissé les bras et a atteint son objectif : apprendre à préparer de la charcuterie haut de gamme.
Quelques années plus tard, Felipe St-Laurent, alors gérant au pub Sainte-Élisabeth à Montréal, eut l’opportunité de gérer un service de traiteur en partenariat avec Guy Laliberté, Garou et Marc Bolay. Il a travaillé dans les plus grands événements jet-sets de la province. « Entre autres, pendant trois ans, je m’occupais de toutes les réceptions du Cirque du Soleil. Les affaires roulaient sur l’or. »
Malgré tout, le Granbasilois sentait qu’il lui manquait quelque chose. « Je venais d’avoir 34 ans et j’avais vraiment envie de faire quelque chose qui me ressemble. Un jour, j’ai repensé à Ulysse, qui m’avait confié que son seul regret était de ne pas avoir fondé sa propre entreprise. J’ai donc décidé de tout lâcher et de me lancer dans la confection de saucisses. »

« J’en arrachais à l’école. Je terminais mes années avec une moyenne d’environ 67 %. » – Felipe St-Laurent.

Débuts difficiles
Felipe St-Laurent décida donc de créer des saucisses en utilisant la méthode enseignée pas son vieil ami et en y incorporant son propre style. « J’utilise des légumes frais et de la viande de première qualité, mais au lieu de hacher le tout finement, j’incorpore de gros morceaux à la recette de base de mes saucisses. »
Il avoue que les débuts ont été assez difficiles. « Moi, qui travaillais dans les plus grands partys, je me retrouvais seul chez moi à faire des saucisses haut de gamme farfelues et à les vendre sur Internet. Il fallait vraiment que je croie à ce projet. » Toutefois, en peu de temps, cette vente de charcuterie devint virale sur les médias sociaux. « J’ai bâti mon succès sur l’originalité et la rareté du produit. »
Parmi les saucisses les plus populaires, on retrouve celle au bacon et fromage en grains, celle au fromage bleu et porto, celle à la viande fumée et celle au Kraft Dinner. « Celle-là, je l’ai créée pour mon ami Phil Grisé, le propriétaire des boutiques Empire. Elle est devenue si populaire qu’elle est maintenant mon plus gros vendeur. Chaque semaine, je dois faire cuire 30 kilos de Kraft Dinner pour répondre à la demande. »
Nul n’est prophète en son pays
Quand est venu le moment d’ouvrir un commerce tellement les ventes augmentaient, Felipe St-Laurent est allé cogner à la porte du CLD de la Vallée-du-Richelieu. Bien que le produit qu’il présentait ait conquis l’équipe, le nom qu’il souhaitait donner à son entreprise, Ils en fument du bon, causa problème. « La direction refusa de me financer si j’utilisais ce nom. J’avais beau leur expliquer le sens de ce nom, je n’ai jamais réussi à les convaincre, J’ai donc décidé de me tourner vers Montréal pour lancer mon commerce. »
Aujourd’hui, trois succursales d’Ils en fument du bon sont en opération, dont deux à Montréal et une à Québec. Le spécialiste de la saucisse espère ouvrir deux nouveaux commerces sous peu sur la Rive-Sud et la Rive-Nord (Montréal). « Si le CLD m’avait fait confiance, cela leur ferait une belle publicité aujourd’hui », lance-t-il.
À la télévision
Le succès de saucisses d’Ils en fument du bon a été tel que le directeur de la chaîne Zeste,  Sébastien Arsenault, décida de confier une émission de télévision à Felipe St-Laurent. « Quand j’ai compris que l’équipe acceptait mes idées de A à Z, j’ai accepté de relever le défi. C’est ainsi que l’émission Le pimp de la saucisse vit le jour.
L’émission en est aujourd’hui à sa deuxième saison et une troisième est prévue. « Au cours de ce projet, j’ai eu la chance de rencontrer de grands chefs tels que Daniel Bolud, à New York. Je suis aussi allé en Suisse pour cuisiner là-bas et ainsi rendre hommage à Ulysse », conclut-il.